Epuisement des hydrocarbures : quel modèle de consommation énergétique

l’Algérie détient 2,37% des réserves mondiales prouvées de gaz naturel, contre pour le pétrole, 1% selon certaines statistiques  de janvier 2011
l’Algérie détient 2,37% des réserves mondiales prouvées de gaz naturel, contre pour le pétrole, 1% selon certaines statistiques de janvier 2011

Le gouvernement algérien vient d’apporter encore une fois des amendements à l’actuelle loi des hydrocarbures.

Dans ce contexte, j’ai lu attentivement la contribution parue dans El Watan en date du 3 octobre 2012 gaz de schiste ou énergie solaire, de mon ami Nazim Zouioueche, ancien PDG de Sonatrach et longtemps responsable de la partie névralgique de Sonatrach l’amont, position très nuancée, ainsi que le point de vue de Abdelmajid Attar également ancien PDG de Sonatrach qui est pour l’exploitation du gaz schistes Nous pouvons ne pas être d’accord mais il faut respecter les idées d’autrui. Le débat contradictoire est de mon point de vue essentiel pour faire avancer les idées et éviter de se tromper dans l’action. Cette présente contribution se veut un apport au débat qui engage l’avenir du pays.

Sonatrach c’est l’Algérie et l’Algérie c’est Sonatrach

Car après 50 années d’indépendance politique, l’économie algérienne est une économie totalement rentière, tertiaire (83% du tissu économique composé du commerce et des petits services selon l’ONS. Plus de 90% du tissu industriel est constitué de PMI/PME organisées sur des structures familiales. On peut démontrer facilement que le taux de croissance officiel hors hydrocarbures de 5/6% a été permis pour 80% par la dépense publique via les hydrocarbures. En 2012,Sonatrach c’est l’Algérie et l’Algérie c’est Sonatrach 98% d’exportation d’hydrocarbures état brut et semi brut (gaz et pétrole) et important 70-75% des besoins des ménages et des entreprises publiques et privées dont le taux d’intégration ne dépasse pas 15% après 50 années d’indépendance politique. Sonatrach a engrangé selon les bilans financiers de Sonatrach de 2000 à juin 2012 560 milliards de dollars et allant vers 600 milliards de dollars fin 2012. Cela a permis d’augmenter les réserves de change estimées à 56 milliards de dollars en 2005, 77,78 milliards en 2006, 110 milliards en 2007 à 138,35 milliards de dollars en 2008, à 147,2 milliards en 2009, à 157 milliards de dollars fin 2010, 188 milliards de dollars fin 2011 et allant vers 200 milliards de dollars fin 2012 et essentiellement grâce à la rente des hydrocarbures. Cette richesse virtuelle alimente la dépense publique devant différencier pour ce cas la part devises et la part dinars(les salaires étant versés en dinars). Pour la période récente de 2000 à 2014, elle est passée successivement de 55 milliards de dollars en 2004, à 100 milliards de dollars en 2005 puis à 140 milliards de dollars fin 2006 et qui a été clôturée entre 2004/2009 à 200 milliards de dollars, mais faute de bilan on ne sait pas si l’intégralité de ce montant a été dépensé. Quant au programme d’investissements publics 2010/2014, le gouvernement a retenu des engagements financiers de l’ordre de 286 milliards de dollars) et concerne deux volets, à savoir le parachèvement des grands projets déjà entamés entre 2004/2009, l’équivalent de 130 milliards de dollars (46%) et l’engagement de projets nouveaux pour un montant de 156 milliards de dollars. Il n’existe pas de proportionnalité entre cette importante dépense publique et les impacts économiques, le taux de croissance 2000/2011 n’ayant pas dépassé en moyenne 3% alors qu’il aurait dû être plus de 10%.

Pourquoi des amendements de la loi des hydrocarbures ?

Comme j’ai eu à le démontrer longuement dans revue de renommée internationale Stratégie-Paris France Agir a consacré son numéro 50- semestriel - qui vient de paraitre le 28 septembre 2012» avec nombreux experts internationaux des deux rives de la méditerranée sur le thème «l’énergie au cœur de la stratégie et de la coopération méditerranéenne et africaine», et dans une autre contribution au magazine Jeune Afrique parue le 30 septembre 2012, le constat est que les derniers appels d’offres entre 2008 et 2012 se sont avérés un véritable échec ayant attiré que des compagnies marginales, n’ayant pas de savoir technologique et comptant sur Sonatrach pour supporter la majorité des coûts, les grandes compagnies n’ayant pas soumissionné. Sonatrach depuis des années n’a pas découvert de réserves rentables substantielles tant du pétrole et du gaz importants, car pouvant découvrir des milliers de gisements mais non rentables financièrement et ayant fait fuir bon nombre de cadres compétents. Et dans ce cadre comment ne pas rappeler que l’élite algérienne est caractérisée par sa marginalisation sociale selon la revue américaine Foreign Policy de juillet 2010. A cet effet, la revue américaine a classé l’Algérie parmi les plus vulnérables au monde avec une note de 8,6, l’Algérie risquant de se retrouver sans son intelligentsia pour construire son avenir. Ainsi, nous assistons à un déficit du service de la dette inquiétant, passant de 2-3 milliards de dollars en 2002 à 12 milliards de dollars 2011-2012(appel aux compétences étrangères et fuite de cerveaux algériens). Suite à ce constat, le Conseil des ministres a d’adopté le 17 septembre 2012 des amendements relatifs à l’ordonnance n°06-10 du 29 juillet 2006 modifiant et complétant la loi n°05-07 du 28 avril 2005. Je précise que l’Algérie détient 2,37% des réserves mondiales prouvées de gaz naturel, contre pour le pétrole, 1% selon certaines statistiques de janvier 2011. Selon les statistiques internationales les réserves pétrolières de l’Algérie seront épuisées horizon 2020. Pour le gaz naturel, selon les extrapolations de l’organisme de régulation CREG, la consommation intérieure devrait passer de 35 à 50 milliards de mètres cubes gazeux horizon 2017. Mais ce calcul ayant été fait avant que ne soient décidés suite aux coupures d’électricité en 2012, le doublement des capacités électriques(Une enveloppe de près 2O milliards d’euros pour soutenir le programme d'investissement de la Sonelgaz, visant à installer une capacité électrique supplémentaire de 12.000 MW d'ici à 2016) privilégiant les turbines à gaz et des centrales fonctionnant au gasoil dans le Sud, allant donc vers plus de 60/70 milliards de mètres cubes gazeux en cas de non rationalisation des couts de l’énergie, incompressible si l’on veut un réel développement intérieur. A cela, s’ajoute le volume exportable extrapolé tant à travers les canalisations que pour le GNL, 85 milliards de mètres cubes gazeux donnant un épuisement horizon 2030. Ainsi l’Algérie sera sans pétrole et sans gaz conventionnel au moment où la population approchera 50 millions d’habitants.

Les amendements et la problématique du dualisme fiscal

L’énergie étant au cœur de la sécurité nationale cela explique les amendements à la recherche de nouveaux gisements qui ne s’appliquent pas aux gisements actuellement en production, qui restent soumis au régime fiscal en vigueur introduisant le dualisme fiscal ,contraire à l’unicité du Droit, dont il conviendra de mesurer l’opérationnalité. Le projet de la nouvelle loi sur les hydrocarbures propose l'augmentation de l'Impôt complémentaire sur le résultat (ICR) pour taxer les super profits réalisés par les groupes étrangers activant dans le domaine minier algérien, un impôt qui va remplacer la Taxe sur les profits exceptionnels (TPE), dont l’application avait été à l’origine de plusieurs contentieux entre le groupe Sonatrach et ses partenaires. Pour la TPE, selon la nouvelle monture, elle continuera à être en vigueur et sera appliquée seulement aux contrats de partage de production, conclus sous l’empire de l'ancienne loi de 86-14 du 19 août 1986. La TPE s’applique à la part revenant à l’associé étranger lorsque la moyenne des prix du pétrole Brent est supérieure 30 dollars. Son taux oscille entre 5% et 50% des gains, selon le type du contrat de partage de production. Le profit net d’un gisement donné est la valeur de sa production annuelle moins les coûts d’exploitation et les montants relatifs au payement de la redevance mensuelle, de TRP et de l’ICR. Rappelons que plusieurs compagnies étrangères avaient procédé à l’arbitrage international réclamant l'institution des sommes versées au Trésor public au titre du payement de la TPE, estimant que la loi de 2006 qui a institué cette taxe ne s'appliquait pas à elle car le contrat de partage de production, la liant à Sonatrach est antérieur à celle loi, (une loi étant rarement rétroactive) aboutissant en fin de compte à un règlement à l’amiable contraignant Sonatrach à reverser un montant estimé selon certaines sources à environ 6 milliards de dollars. Selon l’article 88 bis, inséré dans ce projet de loi, ces compagnies seront soumises à partir d’un seuil déterminé de bénéfices à un taux d'ICR de 80 % Si ce seuil n’est pas atteint l’ICR appliqué sera de 19%. Pour la TPE, elle continuera à être en vigueur et sera appliquée seulement aux contrats de partage de production, conclus sous l’empire de l'ancienne loi de 86-14 du 19 août 1986. Concernant justement la fiscalité, doit être posée la problématique des subventions généralisées sans ciblage, qui s’applique à bon nombre d’autres produis. Les subventions autant que les impôts indirects, (le montant des impôts directs étant le signe d’une plus grande citoyenneté) sont injustes, celui qui perçoit 10.000 dinars algériens, achetant au même prix que celui qui perçoit 500.000 dinars par mois. Pour le ministère de l’Energie, le prix réel des carburants devrait fluctuer 60 et 80 DA le litre sans subventions et pour l’électricité, la tarification, pour les clients résidentiels (ménages) varie entre 2 DA et 3,20 DA/kwh selon le niveau de consommation, alors que ce prix est entre 3,45 DA et 4,94 DA/kwh en Tunisie, et entre 5,27 DA et 6,40 DA/kwh au Maroc. Pour les clients industriels en Algérie, le prix oscille entre 1,48 DA et 2,15 DA/kwh selon le niveau de consommation, en Tunisie entre 2,35 DA 3,54 DA/kwh, et au Maroc entre 4,21 DA et 5,53 DA/kwh. Mais conserver cette politique, en plus des versements de salaires sans contreparties productives au nom d’une paix sociale fictive, coûte de plus en plus cher, tout en décourageant la production locale et en alimentant le processus inflationniste artificiellement compressé par les subventions. En effet, l’Algérie est devenue importatrice de produits raffinés dont le gasoil et l’essence sans plomb, sans compter les trafics aux frontières.

Ces amendements seront-ils efficaces ?

Le projet de loi attribue à l’entreprise nationale Sonatrach le droit exclusif en matière de transport d’hydrocarbures par canalisations et lui garantit la majorité dans les partenariats, aussi bien dans la production que dans la transformation des hydrocarbures et maintient la règle des 51-49%. Comme il y a lieu de signaler que le taux de profit dans les canalisations est inférieur de 30% en moyenne par rapport aux grands gisements de l’amont. Sonatrach continuera donc à supporter les surcouts au niveau des canalisations. La taxation des superprofits au-delà de 30 dollars dans l’actuelle loi ne répondait plus à la situation actuelle du marché où le cours dépasse les 90/100 dollars depuis plus de deux années. Dans ce cadre, l’annonce d’un assouplissement fiscal était nécessaire, l’Algérie n’étant pas seule sur le marché mondial face aux importantes mutations énergétiques qui s’annoncent, mais des concurrents qui veulent attirer les compagnies. En effet, reste la contrainte des 49-51% dont l’erreur a été de la codifier dans une loi de finances, mentalité bureaucratique d’une gouvernance dépassée des années 1970. L’Algérie étant un Etat souverain, le conseil des ministres pouvait décider pour certains secteurs stratégiques d’appliquer cette règle, et pas pour d’autres secteurs selon le moment et la conjoncture internationale sans être ligoté par une loi qui est par définition contraignante. Si pour l’amont gazier et pétrolier pour les grands gisements la règle des 49/51% peut être applicable, pour les gisements marginaux, cette règle risque de n’attirer que peu d’investisseurs sérieux. Pour le gaz non conventionnel, les réserves prouvées selon le rapport de l’AIE de 2011 sont de 6500 milliards mètres cubes gazeux (pouvant découvrir des milliers de gisements mais non rentables financièrement, les réserves se calculant selon le couple prix-coûts et la concurrence des autres sources d’énergie) qui requiert des techniques de pointe à travers le forage horizontal maîtrisé par quelques firmes.

En Algérie, comme je l’ai suggéré dans plusieurs contributions locales et internationales, évitant des positions tranchées pour ou contre, on ne saurait minimiser les risques de pollution des nappes phréatiques au Sud du pays, 200 produits chimiques injectés dont 20%, selon un rapport du département américain, pouvant provoquer le cancer qui doivent préserver l’environnement et mettre en place des techniques adéquates. Et ce afin éviter surtout l’expérience désastreuse au Nigeria de pollution de centaines de milliers d’hectares au nom du profit maximum à court terme des compagnies. L’Algérie a-t-elle mis en place les mécanismes de contrôle renvoyant à la ressource pérenne que sont les ressources humaines ? Comme doit être opérer un arbitrage pour la consommation d’eau, un milliard de mètres cubes gazeux nécessitant 1 million de mètres cubes d’eau douce. Comme doit être pris en compte les coûts (en plus de l’achat des brevets) devant forer environ 600 puits moyens pour un milliard de mètres cubes gazeux. Sans compter la durée courte de la vie de ces gisements, environ 5 années pouvant récupérer une moyenne de 20/25% contre 85/90% pour les gisements de gaz conventionnel et les confits avec des pays riverains se partageant cette nappe dont le Maroc, la Lybie et la Tunisie. Cela concerne également l’investissement dans la pétrochimie dont la commercialisation est contrôlée par quelques firmes au niveau mondial. Cette filière nécessite pour sa rentabilité de grandes capacités de production, sans compter que les pays du Golfe ont déjà amorti les installations, l’Algérie partant avec un handicap des coûts d’amortissement élevés et un marché forcément limité. Pour les énergies renouvelables où l’Algérie a d’importantes potentialités, énergie d’avenir, un conseil des ministres en 2011 a prévu un programme qui vise à produire, à l’horizon 2030, 40% de l’électricité à partir des énergies renouvelables devant se traduire par l’installation d’une puissance de 12.000 mégawatts en solaire et en éolien avec un investissement sur plusieurs années de 60 milliards de dollars. Je partage le point de vue de Nazim pour qui doit être combiné le solaire et le gaz afin de réduire les couts et ce dans le cadre d’ un partenariat soit dans le cadre de Desertec ou d’autres est nécessaire et devant être conçu que dans le cadre du Maghreb.

Cependant exige un autre facteur déterminant qui doit être débattu sans passion évitant le chauvinisme nationaliste, car en Algérie personne n’est plus nationaliste qu’un autre, nous aimons tous l’Algérie, c’est la règle des 49-51% qui ne concerne pas que Sonatrach mais l’ensemble des autres secteurs. Il y a lieu d’éviter que l’Algérie via Sonatrach supporte les surcoûts tant qu’il y a la rente, pour des projets non rentables économiquement ou comme l’assainissement des entreprises publiques qui ont coûté plus de 50 milliards de dollars au trésor public entre 1971-2011, plus de 70% étant revenues à la case de départ. Ne serait-il pas souhaitable en dehors des secteurs stratégiques qui sont historiquement datés, un secteur stratégique aujourd’hui peut ne pas le devenir demain, d’avoir d’autres critères plus efficaces: balance devises excédentaire, l’apport technologique et managérial et un partage des risques.

En conclusion, l’axe stratégique est comment passer d’une économie de rente à une économie hors hydrocarbures. Fondement d’une bonne gouvernance et d’un Etat de droit, il y a urgence à la fois de réactiver le conseil national de l’énergie et d’entamer un large débat national sur la gestion de Sonatrach et le futur modèle de consommation énergétique, un seul département ministériel ne pouvant engager l’avenir du pays. C’est pourquoi un large débat national s’impose et le salue les apports de Nazim Zouioueche et Abdelmajid Attar.

Professeur Dr Abderrahmane Mebtoul,
Directeur d‘Etudes Ministère Energie Sonatrach 1974-1979, 1990-1995,2000-2006 auteur de plusieurs contributions internationales et d’ouvrages sur l’énergie

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Commentaires (2) | Réagir ?

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adil ahmed

merci

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kamel ait issi

Ah que j'aime cette question. "... En conclusion, l’axe stratégique est comment passer d’une économie de rente à une économie hors hydrocarbures... "

Le savoir ya si jillali. Les brevets de Lyes zerhouni, sont derriere des milliers sinon des millions de machines et techniques et derrive's a travers le monde. . . Decoder le genome, aujourd'hui requiere 11 millions de specialistes de haut niveau, qui requier une maitraise de la logique plus que mentale mais emotionelle. . . Mes brevets, et ceux d'autres encore plus brilliants et anonymes, de meme. . . Pas seulement les degats du regime allahiste pendant 50 ans, ou les 10 ans d'enfer. . . mais surtout depuis l'arrivee du nain a alger, c'est le seau qui a scelle' la degringolade... Le peu qu'il y avait a quitte' les lieux et d'une facon permanante. Tandis que beaucoup ont vaincu leur peur du danger physique et sont retourne's faire face aux barbouses, le nain a fini par les convaincre de degager et pour de bon - Le bouteflika a demontre' qu'on peut etre plus salope dans un 3 pieces que dans dans un turban taliban. son guamalah, benbouzid vont diriger le centre de recherche avancee a wed al harrach le PLUS GRAND DU MONDE !