Le Parlement turc autorise l’armée à intervenir en Syrie

La tension entre Damas et Ankara est montée d'un cran ces dernières 48 h.
La tension entre Damas et Ankara est montée d'un cran ces dernières 48 h.

Il ne s'agit pas pour autant de faire la guerre à la Syrie, cette autorisation revêt un caractère "dissuasif", précise le vice-Premier ministre turc.

Le Parlement turc a adopté, jeudi 4 octobre, une motion du gouvernement autorisant l'armée à conduire "si nécessaire" des opérations en Syrie, au lendemain du grave incident de frontière qui a coûté la vie à cinq civils turcs et provoqué une riposte d'Ankara. Déterminé à ne pas laisser l'attaque syrienne impunie, le gouvernement turc a demandé au Parlement l'autorisation formelle de mener des opérations militaires en territoire syrien au nom de la "sécurité nationale", ainsi qu'il le demande pour bombarder les positions des rebelles séparatistes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) en Irak. La Constitution turque prévoit que toute opération militaire extérieure doit être autorisée au préalable par le Parlement. Le texte a été voté par 320 députés contre 129 (sur 550 sièges) à l'Assemblée nationale, qui s'était réunie en session spéciale à huis clos, selon les chaînes de télévision turques.

Sitôt la séance parlementaire levée, le vice-Premier ministre turc Besir Atalay s'est empressé de préciser que le texte voté ne donnait pas mandat au gouvernement de faire la guerre à la Syrie. "Cette motion n'est pas une motion pour la guerre", a-t-il déclaré, précisant qu'elle avait une vertu "dissuasive". Le responsable gouvernemental a ajouté que la Syrie avait présenté ses excuses à la Turquie après les tirs d'obus qui ont tué 5 civils turcs et provoqué des bombardements de représailles turques sur des positions de l'armée fidèle au président Bachar al-Assad. "La partie syrienne admet ce qu'elle a fait et s'excuse. Ils assurent qu'une tel incident ne se répétera pas", a souligné Besir Atalay.

L'autorisation parlementaire votée jeudi permet au gouvernement, pendant une période d'un an, d'ordonner des opérations armées en Syrie. "Les activités hostiles visant le territoire turc sont sur le point de devenir une attaque militaire [...] et de ce fait sont de caractère à menacer notre sécurité nationale", justifie ce texte. La Constitution turque prévoit que toute opération militaire extérieure doit être autorisée au préalable par le Parlement.

Dès mercredi soir, le chef du gouvernement turc a fait part de sa détermination à riposter après le bombardement qui, selon un dernier bilan, a tué cinq personnes et fait une dizaine de blessés à Akçakale, récent théâtre de combats entre les troupes fidèles au régime du président Assad et les rebelles de l'Armée syrienne libre (ASL). "La Turquie ne laissera jamais impunies de telles provocations du régime syrien, qui menacent notre sécurité nationale, dans le respect du droit international et de ses règles d'intervention", a tonné le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan à l'issue d'une réunion d'urgence avec ses conseillers.  Après plusieurs incidents de frontière ces dernières semaines autour d'Akçakale, le bombardement de mercredi a suscité une intense émotion en Turquie et fait immédiatement remonter la tension avec son voisin. En juin dernier, le ton était déjà monté entre les deux capitales après la destruction d'un avion de chasse turc par la défense antiaérienne syrienne. Mais les menaces de représailles d'Ankara, qui appelle depuis des mois au départ du président Assad, étaient restées sans suite.

L'incident d'Akçakale a été fermement condamné par les Etats-Unis et par l'Otan, qui ont affiché une solidarité sans faille avec Ankara, un des 28 pays membre de l'Allliance atlantique. Un porte-parole du Pentagone a vu dans cet incident un "exemple du comportement dévoyé" du régime syrien et, dès mercredi soir, le Conseil de l'Otan s'est réuni en urgence à Bruxelles pour sommer la Syrie de "mettre un terme à ses violations flagrantes du droit international". De son côté, l'Allemagne appelle à la "mesure". "Nous sommes aux côtés de notre allié de l'Otan, la Turquie, mais nous appelons aussi à la mesure, à une réponse raisonnable à cette situation qui se détériore. Il faut maintenant désamorcer la situation", a déclaré le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle. Ces évènements "montrent que le risque d'embrasement, en raison du conflit civil persistant en Syrie, augmente. Il est d'autant plus important que la communauté internationale agisse", a-t-il jugé. "J'ai appelé tous les membres du Conseil de sécurité de l'ONU à assumer leurs responsabilités et à ne plus entraver la capacité d'action de la communauté internationale par une attitude de blocage", a-t-il ajouté.

Le Conseil de sécurité de l'Onu, saisi par la Turquie, devrait publier jeudi une déclaration condamnant vigoureusement les tirs syriens et demandant à Damas de respecter le territoire de ses voisins. Elle devait être entérinée dès mercredi soir mais la Russie, qui s'est systématiquement opposée jusque-là à toute condamnation de Damas, a demandé un report. Moscou pourrait proposer des modifications ou même une enquête internationale sur cet incident, selon un diplomate.

La détérioration de la situation entre Ankara et Damas le long de leur frontière commune ne doit toutefois pas occulter le reste de la situation en Syrie. Les combats que se livrent depuis fin juillet rebelles et forces gouvernementales pour le contrôle de la ville d'Alep (nord de la Syrie) se poursuivent jeudi, au lendemain d'un triple attentat à la voiture piégée qui a fait au moins 48 tués, en majorité des militaires, et une centaine de blessés. En outre, selon l'OSDH, dix-huit membres de la force d'élite de la Garde républicaine ont été tués jeudi matin à Qoudsaya, une banlieue ouest de Damas, par une explosion suivie d'échanges de tirs.

AFP

Plus d'articles de : L'actu en Algérie et ailleurs

Commentaires (0) | Réagir ?