Plan d'action du gouvernement Sellal : la carotte et le bâton

Derrière le Plan d'action, celui de la répression
Derrière le Plan d'action, celui de la répression

Alors que le gouvernement Sellal mène tambour battant la promotion médiatique de son "plan d'action" pour "regagner la confiance du citoyen", son système répressif s'abat sur ce citoyen : sit-in des familles de disparus interdit, arrestation de militants des droits de l'homme, traque des gardes communaux...

Ces deux derniers jours, le "plan d'action" du gouvernement Sellal qui est au centre des débats parlementaires, a révélé ce qu'il cache, derrière les subventions alimentaires et l'assainissement des services publics : la politique de la "Charte pour la paix et la réconciliation nationale" dont il est un véritable Cheval de Troie. Alors que le gouvernement fait croire qu'à travers le "plan d'action" qu'il veut "regagner la confiance du citoyen", par des mesures ponctuelles et de trompe-l'oeil, le pouvoir politique du "programme de Bouteflika" ne s'embarrasse pas de ces faits de l'urgence alimentaire et d'assainissement de la voierie publique pour renouer avec sa véritable nature répressive qui, depuis 1999, n'a eu de cesse d'être justifiée par la politique de la concorde civile dont c'est la 7ème année de la promulgation et qui constitue la seule base idéologique de ce "plan d'action" du gouvernement Sellal.

Plusieurs faits viennent confirmer l'immense décalage entre un "plan d'action" qui prétend promouvoir la citoyenneté et les répressions contre cette citoyenneté même au nom de la politique de la réconciliation nationale. Le sit-in des familles de disparus à Alger qui se sont mobilisées pour dénoncer l'arnaque de la "charte pour la paix…" qu'elles ont qualifiée de "texte de la honte" a été empêché par les forces de l'ordre qui ont réprimé les manifestants.

A cette interdiction musclée, s'ajoutent les interpellations et les arrestations arbitraires des militants des droits de l'homme, la répression continue des gardes communaux durant tout cet été 2012 parce qu'ils voulaient remettre au chef de l'Etat une plateforme de revendications liées à leur longue lutte antiterroriste, oubliés et muselés par la politique de concorde nationale qui, au coté des Patriotes, les a désarmés et avilis. En marge des débats parlementaires sur le "plan d'action", le ministre de l'Intérieur et des collectivités locales, Daho Ould Kablia, est revenu à la charge en signifiant à ce corps constitué qu'il n'aura pas le statut de police municipale au moment même où l'assainissement de l'environnement, la chasse aux marchés informels, a grandement besoin d'une police municipale aguerrie.

D'autres faits mettent en exergue la nette opposaition entre ce "plan d'action" socioéconomique du gougernement Sellal et sa base politique qui en est la négation. La récente visite du Haut-Commissaire des Nations-unies aux droits de l'homme, Navi Pillay, les 24 et 25 septembre derniers, a mis entre parenthèse le "plan d'action" du gouvernement au moment même où il faisait l'objet d'un matraquage médiatique par ségments sectoriels de la vie socioéconomique du pays réduite à une peau de chagrin. Le Président de l'APN, des ministres, le Président de l'Observatoire des droits de l'homme sont montés au créneau pour crier au scandale suite à la demande du Haut-Commissaire d'une mission d'enquête d'experts internationaux indépendants sur le dossier des disparus durant la décennie noire, lui rétorquant que l'Algérie n'a rien à cacher et qu'elle n'a pas besoin d'"un guide extérieur".

D'autres sorties encore plus avérées sur ce que tente de cacher ou de faire oublier ce "plan d'action" comme projet de société entièrement conçu sur la base idéologique de l'islamisme politique porté et promu par la concorde nationale ont été celles du ministre des Affaires religieuses et des Wakfs, Bouabdellah Ghlamallah, qui a été le premier de la nouvelle équipe gouvernementale, avant même que le Prmeir ministre n'ait fait de déclarations publiques, à annoncer les "couleurs" politiques du "plan d'action": un projet de décret sur l'indépendance des imams dans lequel il exploite les alinéas juridique du texte de "Charte pour la paix et la réconciliation nationale" pour, par ailleurs, demander l'institutionnalisation d'un clergé islamique tout en prétendant apporter par cette campagne de promotion avancée de la concorde nationale un regain d'activités en création d'emplois au "plan d'action de Sallal" par l'argent de la Zakat. Sur cette lancée médiatique, Farouk Ksentini mène une campagne pour la réhabilitation du FIS d'Abassi Madani en suggérant que "la charte pour la paix" doit connaitre un second souffle à la faveur même du "plan d'action" aux "réformes" du chef de l'Etat par son élargissement à l'amnistie générale du terrorisme islamiste.

Aussi, est-il clair qu'il y a plus qu'une discordance entre les subventions alimentaires, électriques, hydriques conçues pour reconquérir la confiance du citoyen et les manifestations politiques entièrement braquées sur la politique de la compromission avec Al Qaïda au Maghreb islamique dans ses maquis algériens et qui prétend, alors que la concorde civile vit ses treize années d'échec depuis l'investiture d'Abdelaziz Bouteflika, se redéployer au niveau africain.

Le rush des visites diplomatiques enregistrées à Alger depuis la tenue des législatives du 10 mai n'ont certainement pas été motivées par "la transparence" des élections et par la surprise de voir l'Algérie "indemne" des Révolutions arabes. La secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, le ministre des Affaires étrangères français, Laurent Fabius, le Haut-Commissaire des Nations-unies pour les droits de l'homme, Navi Pillay, le commandant en chef US de l'Africom, Carter F. Ham, n'ont porté qu'un bref regard sur les "réformes" de Bouteflika. Leur préoccupation majeure est la présence d'Al Qaïda au Maghreb islamique sur le sol algérien et au Nord-Mali et la politique de lutte antiterroriste menée par Alger depuis près d'un quart de siècle.

Leur préoccupation majeure est la voie diplomatique, la recherche d'une "solution politique négociée" prônée par Alger dans le conflit malien qui est l'extension de la politique de "la charte pour la paix et la réconciliation nationale" mise en échec à chaque attentat kamikaze ou simples attentats terroristes contre les forces de l'ordre ou les populations civiles.

Les propos ambigus du commandant en chef US de l'Africom sur la position de Wachington vis-à-vis de l'option militaire choisie par Bamako et la Cédéao par l'envoi de troupes ouest-africaines libérer les territoires du Nord-Mali des groupes terroristes d'Al Qaïda au Maghreb islamique a fait dire au pouvoir algérien avec une certaine euphorie, comme d'un soutien inespéré, que Wachington partage sa démarche du dialogue prônée dans le conflit malien en refusant catégoriquement l'option militaire. Sans prendre le temps d'analyser les nuances du propos de l'émissaire US qui a invité Alger à "faire la distinction entre ce qui est terroriste et ce qui ne l'est pas" dans le conflit malien en laissant entendre implicitement que dans le conflit malien, il ne faudrait pas se tromper d'ennemis.

En effet, la politique de dialogue défendue par Alger dans la crise malienne semble trier, comme elle l'a fait au temps du GIA et du GSPC, les groupes terroristes susceptibles de rédemption et les irréductibles. Sa préférence pour le groupe terroriste Ansar Eddine d'origine "touarègue" qui compte des transfuges du MNLA (Mouvement national de  libération de l'Azawad) indique que le dialogue préférentiel avec ce groupe terroriste a d'autres visées, principalement contrer les velléités indépendantistes du MNLA par le dialogue avec Aqmi.

Malgré les pressions internationales, dont principalement celles de la France, pour faire abandonner à Alger sa politique de dialogue au Nord-Mali, Alger reste sourde au danger continental africain que représente la branche maghrébine d'Al Qaïda. Ce mardi, c'est le président tunisien par intérim, Moncef Merzouki qui semble le lui rappeler.  Dans une interview au journal El Hayat basé à Londres, il a déclaré que Les "jihadistes sont un grand danger pour la région du Maghreb arabe, qui est en train de devenir un centre pour des terroristes (...) On dirait que le centre pour le mouvement terroriste se déplace maintenant d'Afghanistan et du Pakistan vers la région du Maghreb arabe. Et le grand danger est à nos portes". Pour l'Algérie, ce "danger" est au coeur même de la politique de réconciliation nationale que tente de masquer le "plan d'action" du gouvernement Sellal.

R.N

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