Abderrahmane Fardeheb : mon idéal assassiné

Abderrahmane Fardeheb, assassiné par un groupe armé, le 26 septembre 1994.
Abderrahmane Fardeheb, assassiné par un groupe armé, le 26 septembre 1994.

Aujourd’hui tu comptes 18 années sous terre. Ta mort tragique a fait de nous des orphelins.

Tu aimais la vie, tu adorais tes enfants auxquels tu consacrais une grosse partie de ton temps, tu te vouais à ta famille, tes amis, tes étudiants, sans compter. Aujourd’hui, il me reste de toi Amel et Mourad qui ont grandi et qui s’inspirent de ton parcours riche d’enseignements. Tu leur as laissé en héritage la voie à suivre, l’amour du travail et l’honnêteté.

Il me reste aussi nos rêves brisés et tes éclats de rire qui éveillent des résonances profondes dans mon être. Je me souviens encore et toujours de ton combat sans cesse  renouvelé pour les plus démunis, les laisser pour compte. Et aujourd’hui, toujours, j’en viens à me demander : pourquoi ? Pourquoi ? 

L’ignorance et la bêtise humaine ont engendré ce qu’il y a de plus abject et ignoble : l’assassinat pour des idées politiques, pour l’amour de ce qui est créé sur terre et exerce l’attrait, pour la liberté de s’exprimer…

Qu’ont-ils fait de tes engagements, ton intelligence, ton humanisme, ton honnêteté, ta discrétion, ta faim jamais repue de vérité et de justice, toi le militant de la première heure, progressiste fervent et dévoué ?

Les murs de l’université, de la section syndicale, résonnent encore de tes pas, de tes éclats de voix pour défendre les droits des travailleurs opprimés et humiliés. Tu rêvais d’abolir l’ignorance, la hogra, la condamnation de l’autre pour ses idées. 

Oui , tu rêvais d’une Algérie prospère, d’un monde meilleur. Hélas des hommes, aveuglés par l’incapacité d’estimer à leur juste valeur tes qualités, t’ont assassiné. Et moi... aujourd’hui plus que jamais, je viens me désaltérer à la source de ton idéal inachevé. Je me nourris de tes rêves interrompus, rêvant de construire un édifice de ta vie sacrifiée, tes droits les plus absolus à la vie odieusement piétinés. Je formulerai,  indéfiniment, des vœux afin que les droits de l'Homme soient enfin respectés et la liberté défendue.

Que justice soit faite un jour.

Des individus décérébrés et fourbes ont lâchement planifié ton assassinat, forts du droit que leur procurent leurs armes. Ils t’attendaient sournoisement en bas de notre domicile, ce 26 septembre 1994. Ils t’ont froidement tué sous les yeux de notre fille Amel  immobilisée par la douleur. Ils t’ont empêché de rejoindre l’université. Ils t’ont enlevé le droit de dire et d’enseigner ce en quoi tu croyais : l’amour de ton pays, qui, malheureusement, à présent, sert de lit à l’intégrisme, à l’oisiveté, à  la corruption et à l’expansion de la terreur.

Et maintenant ce pays que tu aimais tant est estropié et abrite des milliers de veuves et d’orphelins.

Abderrahmane, tu n’es pas mort, ton âme flotte toujours parmi nous en qui tu croyais et que tu aimais. Tes idées continuent à faire leur chemin et se réalisent. Tes enfants perpétuent ton combat pour le progrès, la paix, la modernité. Tu étais un grand homme et les grands hommes ne meurent jamais.

Aujourd’hui l’université d’Oran te rend hommage.

Le 26 septembre, l’Ecole normale supérieure Es-Sénia accueillera ta famille, tes amis, la communauté universitaire pour se souvenir et évoquer l’homme que tu étais.

Cet hommage est à l’initiative d'Adnan Mouri qui est rentré en contact avec Amel, notre fille pour mettre sur pied ce projet qui se réalise aujourd'hui. A présent ce sont les jeunes qui reprennent le flambeau, des jeunes en qui tu croyais, et tu n'avais pas tort.

Abderrahmane, Allah yerhamek.

Zoulikha Fardeheb

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Commentaires (7) | Réagir ?

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algerie

merci

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algerie

merci

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