France : Le flic en chef Manuel Valls rétropédale sur le vote des étrangers
L'appel de 75 députés PS ce matin a remis le sujet sur la table. le ministre de l'Intérieur a tempéré leurs ardeurs.
La question du droit de vote des étrangers était lundi au coeur du débat politique, lancée par un appel de 75 députés PS, qui plaident dans Le Monde daté de mardi pour que la promesse de campagne de François Hollande en faveur de cette mesure soit tenue au plus vite.
"La réforme doit intervenir rapidement, pour se donner les moyens de l’appliquer lors des prochaines municipales" de 2014, écrivent ces élus de diverses sensibilités. "A celles et ceux qui nous disent que c’est trop tôt, et qu’il faut prendre son temps, nous répondons que c’est en commençant maintenant que nous aurons la possibilité de prendre notre temps pour faire cette réforme" qui "ne se fera pas en un jour" car elle nécessitera une réforme de la Constitution et "changera la nature du corps électoral".
Parmi les 75 signataires de cette tribune figurent Karine Berger, secrétaire nationale à l'économie pressentie pour devenir adjointe au porte-parole du PS, Elisabeth Guigou, Patrick Bloche, Laurence Dumont, Sandrine Mazetier, Christian Paul, Jean-Jacques Urvoas, Razzy Hammadi, Annick Lepetit, Patrick Menucci ou encore Axelle Lemaire, députée des Français de l'étranger (Europe du Nord).
Le porte-parole du PS, David Assouline, a peu après abondé dans le sens de ces élus, sans toutefois vouloir se prononcer sur le calendrier de mise en oeuvre de cette mesure, qui permettrait aux étrangers résidant en France d'exprimer leur vote lors des scrutins locaux. "Je ne vais pas, comme porte-parole du PS, m’ingérer dans les arbitrages sur le calendrier, mais partager cette conviction profonde que ce droit doit s’inscrire, parce qu’il est légitime, c’est la démocratie telle que nous la concevons au niveau local», a déclaré le sénateur. "Le PS souhaite bien entendu que cet engagement soit réalisé", a-t-il assuré.
"Revendication forte ? Non"
Mais au sein même du gouvernement, le ministre de l'Intérieur Manuel Valls a tempéré les ardeurs des partisans de cette mesure, en estimant qu'elle ne figurait pas au sommet des préoccupations des Français. "Est-ce que c’est aujourd’hui une revendication forte dans la société française ? Un élément puissant d’intégration ? Non", déclare le ministre de l’Intérieur au Monde daté de mardi. "Ça n’a pas la même portée qu’il y a trente ans. Aujourd’hui, le défi de la société française est celui de l’intégration", ajoute-t-il.
Ces propos de Manuel Valls ont fait réagir Olivier Besancenot, du Nouveau Parti anticapitaliste, qui s'est demandé si François Hollande et son ministre de l'Intérieur ne se partageaient pas deux rôles : "le flic gentil, le flic méchant". "Valls a le droit d’en penser ce qu’il veut, mais c’est une promesse de François Hollande», «une promesse de la gauche qui remonte à 1981", a commenté sur RMC l’ex-candidat trotskiste à l’Elysée.
"Calcul électoral"
Le député UMP des Alpes-Maritimes Eric Ciotti a quant à lui dénoncé un "calcul électoral en vue des prochaines élections municipales", à la suite de l’appel des 75 députés socialistes. "Cette imposture idéologique dont font preuve certains cadres socialistes ne relève certainement pas d’une démarche citoyenne mais purement et simplement du calcul électoral en vue des prochaines élections municipales (...). La ficelle est un peu grosse : cela fait 30 ans que le Parti socialiste ressort le droit de vote des étrangers pour séduire le vote communautaire", a-t-il estimé dans un communiqué.
En fin d'après-midi, le parti EE-LV, partenaire de gouvernement du PS, a souhaité que la loi sur le vote des étrangers soit achevée avant l'été 2013, rappelant également qu'elle figurait au programme de campagne du chef de l'Etat. EE-LV "réaffirme son attachement à la citoyenneté de résidence et demande au gouvernement de tout mettre en oeuvre pour que la loi constitutionnelle soit menée à terme avant l'été 2013", écrivent les porte-parole Elise Lowy et Jean-Philippe Magnen, dans un communiqué.
"La peur du Front national, ou la contrainte de la majorité des 3/5e au Congrès ou d’un référendum pour que cette loi puisse être mise en oeuvre, ne peut sans cesse servir d’argument pour que cette réforme nécessaire soit repoussée à la législature suivante ou considérée comme une revendication secondaire", selon le parti écologiste. "Visant à favoriser l’implication des étrangers non communautaires dans la vie publique et à renforcer leur intégration dans la communauté française, cette proposition doit trouver une concrétisation avant les élections municipales de 2014", estiment Elise Lowy et Jean-Philippe Magnen.
Avec AFP
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