Heurts au Gabon : 3 morts, le pouvoir loue la "réaction mesurée" de la police
Au lendemain des violents heurts lors d'une manifestation interdite du parti dissous d'André Mba Obame, l'opposition dénonce "l'acharnement" du pouvoir, en faisant état de trois morts, un bilan formellement démenti par les autorités qui louent "la réaction mesurée" de la police.
L'Union nationale (UN) de Mba Obame avait appelé à une manifestation interdite à Libreville contre le président Ali Bongo et pour réclamer à terme une nouvelle constitution et des élections. Depuis le retour de Paris le 11 août du principal opposant gabonais, après 14 mois d'absence pour raisons de santé, l'UN a clairement annoncé son intention de faire partir Ali Bongo du pouvoir, parlant d'une grave crise.
Le pouvoir a balayé cette idée jugeant qu'il n'y avait pas de crise au Gabon et estimant que M. Mba Obame, secrétaire exécutif de l'UN, avait franchi les limites légales en s'autoproclamant président de la République en 2011 et en organisant des rassemblements non-autorisés.
Dans la nuit de mercredi à jeudi, l'émetteur de TV+, télévision propriété d'André Mba Obame a aussi été incendiée par des hommes armés et encagoulés et la chaîne n'émet plus.
"Cet énième sabotage et cet acharnement du pouvoir contre TV+ confirment l'absence de liberté d'expression et de la presse au Gabon", a estimé Frank Nguema, directeur de la station, qualifiant le régime de "dictature".
Le gouvernement a, quant à lui, diffusé pendant la nuit un communiqué "louant la réaction mesurée des forces de l'ordre face aux nombreuses provocations dont elles font l'objet (...) Pour l'instant, il n'a été enregistré aucune perte en vie humaine". "Les interpellations se poursuivent pour que chacun réponde de ses actes", d'après ce communiqué qui ne précise pas le nombre des personnes appréhendées.
Polémique sur la manifestation
Selon le gouvernement, les troubles sont survenus en raison de "petits groupes organisés", qui "ont perpétré des actes de vandalisme dans un élan de provocation". Il assure qu'un "véhicule de la police a essuyé des tirs des manifestants qu'une frange de l'opposition tribaliste a équipés de calibres 12 conformément à leur déclaration de déstabiliser le pays".
Au contraire, le président de l'UN, Zacharie Myboto, a accusé la police mercredi soir d'avoir tiré sur les manifestants, en exhibant une douille: "La police charge, brutalise, tire avec des balles".
"Deux compatriotes (qui) ont perdu la vie à cause de la brutalité des forces de l'ordre", a affirmé M. Myboto lors d'une conférence de presse à l'issue de laquelle Mike Jocktane, cadre de l'UN a assuré qu'il "y avait un troisième décès".
La procureur de la République de Libreville, Sidonie-Flore Ouwé, a démenti formellement: "C'est une déclaration politico-politicienne. C'est une information non fondée".
L'UN, bien que dissoute, avait appelé à cette manifestation pour réclamer une "conférence nationale souveraine".
Des affrontements entre forces de l'ordre et groupuscules ont éclaté, avant l'heure prévue de la manifestation alors que le cortège constituée de 2 à 3000 personnes était violemment dispersé. Les manifestants réclamaient notamment le départ du pouvoir d'Ali Bongo. Ancien baron du régime passé dans l'opposition à la mort du président Omar Bongo en 2009, M. Mba Obame avait contesté la victoire de son fils Ali Bongo à la présidentielle. Il s'était autoproclamé président de la République en 2011, avant de se réfugier plus d'un mois dans une agence onusienne de Libreville. L'UN avait alors été dissoute.
L'immunité parlementaire de M. Mba Obame a été levée et il est poursuivi pour "trouble à l'ordre public". Il risque de deux mois à un an de prison, selon son avocat.
AFP
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