Affaire Merah (France) : Des documents secret-défense seront déclassifiés
La commission consultative du secret de la défense nationale a rendu un avis favorable à la levée partielle du secret sur les documents classifiés par la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) qui concernent le tueur de Toulouse, Mohamed Merah.
Le ministre de l'intérieur, Manuel Valls qui avait formulé cette demande le 17 juillet, transmettra dans les jours à venir au juge d'instruction les pièces déclassifiées de ce dossier. Selon nos informations, toute la partie qui concerne le travail de surveillance mené par la DCRI, avant les tueries, sur Mohamed Merah, ses déplacements, sa vie, ses relations, ses activités, sera versée. En revanche, les pièces susceptibles de dévoiler l'identité de personnes agissant pour le compte de la DCRI, restent classifiées.
Parallèlement à l'enquête judicaire ouverte après les tueries de mars à Toulouse et à Montauban, le ministre de l'Intérieur a ordonné une enquête administrative interne à la direction générale de la police nationale (DGPN) et à la DCRI dont les conclusions sont attendues fin septembre. Dans une lettre adressée le 30 juillet aux deux fonctionnaires de l'inspection générale de la police nationale (IGPN) chargés de rédiger ces conclusions, M. Valls fixe le cadre de leur mission. Le ministre rappelle que les actes terroristes commis les 11, 15 et 19 mars par le jeune Toulousain "constituent une forme d'échec pour les services chargés de détecter et de prévenir le terrorisme".
Les deux fonctionnaires, un contrôleur général et un inspecteur général, ont toute latitude pour finaliser leur mission. "Vous étendrez vos réflexions, si nécessaire, aux autres services ou directions qui auraient eu à connaître de cette affaire",précise le ministre, notamment la Direction générale des services extérieurs (DGSE) qui relève du ministère de la Défense et chargé du renseignement à l'étranger. Il demande par ailleurs aux deux fonctionnaires d'analyser "les relations fonctionnelles qui doivent s'établir entre renseignement intérieur et information générale", les deux composantes du renseignement policier en France.
Dysfonctionnement des services
Dans cette affaire, une question centrale reste à ce jour sans réponse : pourquoi, après avoir interrogé Mohamed Merah en novembre 2011, les services du renseignement ont estimé qu'il n'était pas "dangereux" ? Quelle qu'en soit la raison, pour le ministre de l'intérieur, ce raté qui a coûté la vie à sept personnes dont trois enfants, illustre a minima des dysfonctionnements entre les différents services chargés du renseignement français.
Aussi, dans sa missive du 30 juillet, le ministre demande aux deux fonctionnaires de l'IGPN de proposer "les axes d'amélioration notamment pour un pilotage plus efficient des services territoriaux appelés à traiter le renseignement, les modalités de coopération entre ces services et la qualité des liaisons avec les échelons centraux de façon à en tirer les conséquences administratives et organisationnelles".
En clair, mais sans le dire explicitement, le ministre considère que dans l'affaire Merah, la direction zonale du renseignement intérieur de Toulouse n'a pas suffisamment alerté sa direction centrale. Selon l'entourage de M. Valls, une forme de "routine" s'est instaurée dans la manière dont les services ont eu à traiter ce jeune homme. Une "routine" dont les services doivent se protéger, d'autant que la DCRI comptabilise quelques dizaines de Mohamed Merah dans ses dossiers.
Yves Bordenave
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