Les essais nucléaires français en Algérie sont la cause de cancers
La justice française estime qu’il y a un "lien vraisemblable" entre les essais nucléaires menés en Algérie et en Polynésie et les cancers subis par les militaires français y ayant participé.
Florent de Vathaire, de l'Inserm, chargé par la justice française de mener des expertises médicales indique dans le quotidien français, Le Parisien, avoir établi un "lien vraisemblable" entre les essais menés en Algérie et en Polynésie et les cancers subis par des militaires français y ayant participé. C’est une première pour les soldats victimes de ces essais dont la plupart sont aujourd’hui décédés. Cependant, en France, on n’évoque pas le cas des civils, non protégés, tenus dans l’ignorance sur ces essais. Ils seraient des dizaines de milliers d’Algériens à avoir été contaminés comme les militaires. Voire plus.
Florent de Vathaire, directeur de recherche en épidémiologie à l’Inserm, explique avoir pu, "en rassemblant de nombreux éléments, (...) construire un faisceau de présomptions, qui permet de dire que le lien entre les retombées radioactives et les cancers est vraisemblable pour certains des cas expertisés".
Ces rapports d’expertise ont été réalisés à la demande de la juge d’instruction Anne-Marie Bellot, en charge de l’enquête ouverte à la suite de la plainte déposée fin 2003 par l’Association des victimes des essais nucléaires (Aven). Elles accréditent l’existence d’un lien probable pour six personnes sur les quinze qu’il a expertisées, précise Le Parisien, qui a pu consulter les documents.
Mais l’expert nuance : "D’un point de vue scientifique on ne pourra jamais affirmer avec certitude telle ou telle causalité et ce pour une raison simple : ces cancers ou ces leucémies ne sont pas uniquement causés par les radiations".
Il précise qu’il souhaite également "lancer rapidement une étude globale sur les Polynésiens qui étaient âgés de moins de 5 ans à l'époque des essais", car "on sait aujourd’hui avec certitude, des études récentes le prouvent, que de faibles doses de radioactivité peuvent avoir de graves conséquences sur la thyroïde des jeunes enfants comme le déclenchement de cancers ou d’autres pathologies".
Secret-défense
L’expert déplore n’avoir "pas eu accès à toutes les données. Il reste des informations classées secret-défenses. En plus à l'époque, les instruments de contrôle des radiations qu’utilisaient l’armée et le CEA n'étaient pas adaptés pour détecter toutes les formes d’expositions aux rayonnements", souligne-t-il.
Une information judiciaire contre X a été ouverte en septembre 2004 à Paris relatives aux conséquences sur les personnes civiles et militaires qui y assistaient des essais nucléaires français, menés au début des années 1960 au Sahara, et jusqu'à 1996 en Polynésie française.
Le premier site d’essais français au Sahara se trouvait à Reggane, dans le plateau du Tanezrouf. C’est justement dans le secteur qu’ont eu lieu du 13 février 1960 au 25 avril 1961 les quatre premiers tirs atmosphériques. A cette époque, Reggane et la région du Touat étaient déjà habitées par une population sédentaire. Les retombés atmosphériques ont été enregistrées dans tout le Sahara, les retombées radioactives ont été enregistrées jusqu’à plus de 3000 km du site.
Les six premiers tests de bombes ont eu lieu avant l’indépendance. A partir des accords d’Evian, signés le 18 mars 1962, la délégation du FLN a accepté, dans une "annexe secrète", que la France utilise des sites sahariens pour des essais nucléaires, chimiques et balistiques pendant cinq années supplémentaires. A ce propos, onze essais ont été menés du 5 Juillet 1962 jusqu’en février 1966.
Quelque 150 000 civils et militaires ont participé aux 210 essais nucléaires français conduits de 1960 à 1996 au Sahara algérien et en Polynésie française. Concernant l'Algérie, les effets sur la santé et l'environnement à Hamoudia et dans le Touat incommensurables. Certains n'hésitent pas à accuser les autorités françaises de l'époque d'avoir fait des Algériens des cobayes de la tristement célèbre opération "Gerboise bleue". Et l'espèce, rien n'est fait par les autorités française pour indemniser les dizaines de milliers de victimes de ces essais nucléaires.
En clair, encore un dossier à ajouter au lourd contentieux historique algéro-français.
LM/AFP
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