Meeting des cadres du FFS : la révolution pacifique à l’épreuve

Samir Bouakouir, militant du FFS.
Samir Bouakouir, militant du FFS.

La révolution pacifique semble avoir commencé au sein du FFS. Initiée par des cadres irréductibles à la compromission et à la soumission à la dictature, en refusant de cautionner la dérive politique de la direction de leur parti.

Suite à un long entretien avec Samir Bouakouir, qui est considéré comme l’un des principaux initiateurs de la ligne de fracture, qui s’est nettement dessinée entre la direction du parti et les cadres et militants solidaires autour de la question de l'autonomie du FFS vis-à-vis du pouvoir et de ses clans et considéré également parmi les principaux organisateurs du meeting prévu à cet effet, jeudi 12 juillet 2012, j’ai tenté d’esquisser ici, l’état d’esprit et les objectifs que recèle cette action collective.

La confusion, qui règne au sein du FFS, ainsi que dans la majorité des autres formations politiques, à laquelle s’ajoutent l’immobilisme et l’incertitude dans laquelle est plongé le pouvoir algérien, a amené un nombre important de cadres de ce parti à provoquer une ligne de rupture avec leur direction, qui n’est, "ni une dissidence comme on n’en a connu dans le passé, encore moins un mouvement d’humeur passager." Il s’agit en fait d’une première assemblée citoyenne d’envergure, qui se donne comme objectif, "la remobilisation de la population, la réhabilitation de la politique et la fondation des bases d’un véritable débat démocratique." De ce fait, cela confère à cette action une place centrale dans l’activité de l’opposition et dans la vie politique algérienne en général et peut-être l’amorce d’un processus d’une véritable révolution pacifique.

Partant du constat qu'"il n’y a aucun signe manifeste qui laisserait deviner une quelconque volonté au plus haut sommet du pouvoir d’engager le pays dans une transition démocratique." Lorsque l’on sait que le leurre des réformes politiques engagées l’année dernière ont au contraire abouti à des lois plus répressives et plus liberticides. Que les prévisions de grandes décisions révolutionnaires annoncées par le parti comme promesse à sa participation aux législatives, Assemblée constituante, dissolution de la police politique, une ouverture politique et médiatique et la consécration du libre exercice des droits politiques fondamentaux, dont le droit de manifestation, qui se sont révélés un simple saupoudrage envers des militants désabusés. Alors que l’opinion publique, avec une longueur d’avance sur les "professionnels" de la politique, est restée médusée et incrédule devant cette décision de participation et de collaboration avec un pouvoir despotique, dont elle a boycotté dans l’absolu l’imposture.

L’enjeu de cette action dépasse le cadre du FFS. Il concerne tous ceux qui militent  pour la construction de l’alternative démocratique, toutes organisations sociales, politiques, économiques et culturelles, pour constituer un front d’opposition radical. La dynamique de rassemblement qu’initient les cadres du FFS par cette action "vise à son élargissement aux jeunes, aux intellectuels, aux syndicalistes, aux acteurs de l'économie productive et créatrice de richesses, aux femmes, aux hommes de médias et autres artistes qui récusent la fatalité et qui résistent avec dignité et courage."

"La vitalité politique de ce mouvement démocratique dépendra de l’émergence de nouvelles élites, fortes de l’expérience démocratique avortée et qui aura comme tache préalable de porter les valeurs démocratiques au cœur de la société." Ils auront comme fardeau de "faire sortir la politique des logiques d’appareils qui ont stérilisé le débat politique et provoqué le désengagement citoyen. Faire preuve d’imagination pour réinventer de nouvelles formes de lutte et d’organisation, promouvoir la culture démocratique en bannissant les comportements autoritaires et sexistes, en opposant l’argument à l’insulte et à l’invective. Lutter contre les tentatives de domestication par le pouvoir. Bannir les tentations qu’assurent l’immunité parlementaire, pour espérer engranger des profits ou faire fructifier, dans l’impunité, les affaires et les trafics de tous genres." Être vigilant et contourner "la stratégie permanente du pouvoir, qui puise sa force dans la lâcheté, la démission et la compromission des élus politiques", des cadres de l’administration, du système judiciaire et de tout autre organisme de la fonction publique. Parce que "le pouvoir ne veut pas de partenaires politiques, mais des clientèles et des relais qu’il gratifie généreusement en retour et auxquels il assigne des missions, dont la plus importante est de semer la confusion et de polluer l’espace public."

S’imposer à soi une discipline et faire sortir l’organisation politique des "logiques basées sur des liens d’intérêts familiaux, tribaux et régionalistes, en privilégiant la conception de l’organisation politique moderne, au sens où la science politique l’entend, c’est-à-dire en termes de reflets des contradictions de classes". "Chassez le squatté des appareils politiques par des individus sans formation ni conscience politique", ne se légitimant que par leur allégeance à leur président dans sa posture de zaïm omnipuissant et omnipotent.

"Dépasser le nationalisme populiste qui a servi de mamelle nourricière à un système autoritaire, corrompu et prédateur. La mystique d’un peuple uni autour de ses dirigeants, qui n’est qu’une fiction entretenue par l’idéologie nationale populiste qui structure encore la culture politique dominante, pour réinventer un projet national moderne et démocratique."

Ce, qui est le plus à craindre de la réaction de la direction du parti, est qu’après le deal, le FFS semble s’enfoncer dans la surenchère de la collaboration, par la délation cette fois, pour la répression de la liberté d’expression. La commission de préparation du Meeting populaire du 12 juillet, accuse la direction actuelle du FFS de  "s’approprier les méthodes violentes du pouvoir en faisant appel à des Baltaguias". Elle aurait, selon elle, saisi le fédéral de Tizi-Ouzou, connu pour ses liens avec le milieu de la délinquance de cette ville, pour tenter de perturber le meeting. Elle met en garde contre toutes formes de provocations et porte l’entière responsabilité d’éventuels débordements sur la direction actuelle. Les cadres et militants du FFS réaffirment à l’occasion leur attachement au principe de la non-violence. Leur démarche est plus que pacifique, elle dénote surtout un souci de rassemblement en laissant même la porte ouverte au Premier secrétaire du FFS à venir s’exprimer librement lors de ce meeting populaire.

Youcef Benzatat

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Commentaires (2) | Réagir ?

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laid baiid

On y est pour un FFS II Bis.... Said Boutef est vraiment très très rusé... Mais il faut qu'il est un fin stratège...

Si cette intelligence serait mise du côté positif, l'Algérie serait jalousée..

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karim Aït Aïssa

Les journaux, les formations ainsi que les personnalités politiques en opposition contre le pouvoir en place à Alger, n’ont pas réussi à faire amarrer l’Algérie à son port d’attache, quand bien même ils ont déployé des efforts à la hauteur de leurs convictions, la raison, à mon sens, trouve son explication dans le fait qu’ils n’ont pas eu ce soutien nécessaire qui à fait basculer les choses dans les pays qui fonctionnent, a savoir l’opinion publique.

Ils n’ont pas le soutien car cette opinion publique, chez nous, n’existe qu’à l’état embryonnaire.

Pour que cet embryon puisse se développer d’une façon fulgurante, il faut secouer les consciences, et pour secouer les consciences, il faut de l’inédit.

L’inédit, par rapport à l’ambiance actuelle, est dans la rénovation du FFS –à la façon du RCD-, laquelle rénovation, si Monsieur Aït Ahmed le voudra bien, provoquera une réaction en chaine dans les autres formations que leurs bases n’attendent que le déclic pour faire le grand nettoyage, FLN surtout…

C’est à ce moment qu’on peut espérer un regain d’intérêt pour la chose politique, indispensable au développement de l’opinion publique, CQFD. ck