"La parfumeuse" dans la presse algérienne : Une interview de Benchicou dans TSA

"La parfumeuse" dans la presse algérienne : Une interview de Benchicou dans TSA

Alors que le roman "La parfumeuse" (Editions Koukou) sort aujourd'hui 3 juillet pour la presse, Mohamed Benchicou se confie au journal électronique Tout sur l'Algérie (TSA)

"La femme de Messali, Emilie Busquant, est la vraie mère génitrice de l’indépendance algérienne"

Propos recueillis par Hadjer Guenanfa

Mohamed Benchicou, ancien directeur du Matin et écrivain, vient de publier son nouvel ouvrage : La parfumeuse, la vie occultée de madame Messali El Hadj, qui devrait sortir avant le 5 juillet en Algérie. Dans cet entretien, l’auteur revient sur le personnage d’Émilie Busquant, épouse de Messali El Hadj, qu’il décrit comme l’une des principales figures du mouvement national au début du vingtième siècle….

Comment avez-vous découvert ce personnage que personne ne semble connaître en Algérie ?

C’est un personnage qui ne se découvre que par hasard. C’est comme une pièce de cuisine qu’on perd et qu’on retrouve à l’occasion d’un déménagement. C’est grâce au personnage central du Mensonge de Dieu [le dernier roman de Benchicou, NDLR], incarcéré à la prison d’El Harrach avec Messali El Hadj et toute la direction du PPA (Parti populaire algérien) que je me suis intéressé à Émilie Busquant. Une femme qui était réellement enfouie sous les décombres de l’oubli.

C’est sidérant ! Il n’y a aucun personnage aussi central dans l’Histoire algérienne ayant été, à ce point, ignoré. Personne ne connaît cette femme qui créa le drapeau algérien ; qui rédigea le premier texte fondateur de la nationalité algérienne en 1927 ; qui a "construit", au sens charpentier du terme, qui a éduqué et formé Messali El Hadj et qui dirigea le PPA durant une courte période quand la direction était en prison.

Le programme de l’Étoile nord?africaine reposait sur un point fondamental : l’Assemblée constituante. Un point calqué de la révolution française de 1789. Les colons français ont fait pression sur Messali pour qu’il abandonne. Et à chaque fois, sa femme refusait. Les détenus de Lambèse l’ont même surnommée "la mère du peuple algérien".

Comment avez-vous pu obtenir de la documentation pour écrire ce livre ?

Il n’y a que deux femmes universitaires qui se sont intéressées à ce personnage. J’ai aussi interrogé sa fille, Jennina, son gendre et son petit?fils, Chakib Belkalafat. Au début, je n’arrivais pas à arracher beaucoup de choses à sa fille. J’ai compris qu’on ne peut pas réhabiliter sa mère sans nuire à son père. Réhabiliter Émilie c’est diminuer automatiquement de Messali. Mais elle a eu le courage de parler, d’expliquer et d’aller jusqu’au bout.

Comment expliquez-vous cet ostracisme ?

Cet ostracisme renseigne sur le nombre de contrevérités qu’il y a dans l’histoire (algérienne). Sa version actuelle ne pouvait citer Émilie Busquant pour plusieurs raisons.

La première est simple. Faire oublier ce personnage, c’est faire oublier tout un pan de l’Histoire de notre pays. Le réhabiliter, c’est mettre la lumière sur cette période qui n’est pas enseignée et au cours de laquelle tout s’est joué. C’est que la femme de Messali El Hadj a toujours lutté pour maintenir le mot d’ordre de l’indépendance dans le programme du mouvement national. Un mot d’ordre qui n’était pas porté par l’élite algérienne. Les communistes, Ferhat Abbès et les oulémas étaient alors du côté de la France. L’élite algérienne, dont on se prévaut aujourd’hui, était une élite collaboratrice à l’époque. La notion d’indépendance n’existait pas. Je pense qu’il y a une stratégie de la falsification de l’Histoire. Son effacement coïncide exactement avec le virage islamisant pris par le mouvement national dès les années quarante.

La deuxième est qu’Émilie est une femme. Toutes les femmes, qui ont peu ou prou fait quelque chose, de la Kahina jusqu’à Djamila Boupacha, ont été effacées pour une raison qui me semble très simple. Réhabiliter leur combat, c’est offrir aux femmes une légitimité historique.

TSA

03/07/12 - "La femme de Messali, Emilie Busquant, est la vraie mère génitrice de l’indépendance algérienne"

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Commentaires (1) | Réagir ?

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Guel Dring

C'est une marque de reconnaissance qui doit être officialisée du moment que des témoignages sont disponibles et le personnage sera honoré à titre posthume. Quand on pense aux faux moudjahidine et aux avantages matériels qu'ils ont amoncelés, on ne peut rester que complexe devant l'"ironie" du sort.