Vladimir Poutine serait prêt à lâcher Bachar Al Assad
Changement de position ? Moscou a fait savoir qu'il ne considérait pas le maintien au pouvoir du président syrien comme une condition préalable au règlement du conflit.
La Russie, allié indéfectible de Damas depuis le début de la révolte, s'est montrée mardi et pour la première fois ouverte à un départ du pouvoir du président Bachar Al-Assad, réclamé par l'opposition. Sur le terrain, la Syrie a autorisé mardi l'ONU et des ONG à apporter de l'aide humanitaire dans le pays, où les violences ont fait 47 morts, dont 24 membres des forces gouvernementales tués dans des combats contre des déserteurs, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). "Nous n'avons jamais dit ou posé comme condition qu'Assad devait nécessairement rester au pouvoir à la fin du processus politique", a déclaré le vice-ministre russe des Affaires étrangères Guennadi Gatilov à l'agence Itar-Tass.
Le Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l'opposition, avait jugé fin mai que le départ du président Assad était "le seul moyen de sauver le plan" de l'émissaire de la Ligue arabe et de l'ONU Kofi Annan, "faute de quoi la situation risque d'exploser et menacera toute la région". Alors que la communauté internationale, divisée, cherche toujours des moyens de faire pression sur le régime Al Assad, le président russe Vladimir Poutine a entamé une visite de trois jours en Chine, consacrée en partie à la crise en Syrie.
La Russie et la Chine, alliées de Damas, sont opposées à toute intervention armée, ainsi qu'au renversement par la force du président Al Assad. Elles ont opposé leur veto à deux résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU condamnant le régime syrien pour la répression de la révolte lancée en mars 2011.
La secrétaire d'État américaine, Hillary Clinton, a appelé Moscou et Pékin à "contribuer à une solution" au règlement du conflit. "Je pense qu'il est assez clair que nous devons tous intensifier nos efforts pour accélérer la transition politique, et cela doit être la principale préoccupation de notre diplomatie", a-t-elle insisté.
Intérêts russes dans le monde arabe en jeu
Le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Saoud Al-Fayçal, a lui aussi appelé la Russie à "passer du soutien au régime syrien à une action en faveur de l'arrêt des combats et d'une transition politique pacifique" en Syrie, assurant que ce changement de position lui permettrait "de sauvegarder ses intérêts en Syrie et dans le monde arabe". Le prince Saoud a aussi appelé les monarchies du Golfe à se mobiliser pour aider les Syriens à se défendre "face à la machine de mort" du gouvernement de Damas.
Selon diplomates et experts, Kofi Annan, qui doit s'adresser jeudi au Conseil de sécurité et à l'Assemblée générale de l'ONU, commence à entrevoir l'échec de son plan et souhaite que la communauté internationale pèse de tout son poids pour faire respecter ce plan ou qu'elle trouve un "plan B".
Pressée de toutes parts, la Syrie a autorisé l'ONU et des ONG à apporter de l'aide humanitaire, comme stipulé par le plan Annan, dans quatre provinces. Après des missions de reconnaissance dimanche, des organisations humanitaires pourront s'installer à Homs (centre), Idleb (nord-ouest), Deraa (sud) et Deir Ezzor (est), pour distribuer une aide alimentaire et médicale.
Le vice-ministre syrien des Affaires étrangères Fayçal Meqdad a réaffirmé la volonté de Damas de faire réussir le plan Annan et de "protéger la mission des observateurs" déployés pour faire appliquer un cessez-le-feu largement ignoré depuis près de deux mois. Mais Damas a déclaré dans le même temps "persona non grata" les ambassadeurs de plusieurs pays occidentaux, dont les États-Unis et la France, pour riposter au renvoi des ambassadeurs syriens.
Les combats continuent
À travers le pays, les opérations de répression mais surtout les combats entre armée et rebelles se sont poursuivis, faisant au total 47 morts, dont deux fillettes, selon un décompte de l'OSDH. Dans la région côtière de Lattaquié (nord-ouest), 22 soldats et 9 combattants de l'opposition ont péri dans des combats dans la zone d'al-Hiffa, selon l'OSDH, qui a aussi évoqué des "dizaines" de militaires blessés.
Dans la région d'Idleb (nord-ouest), quatre civils ont été tués avant l'aube lors d'une "vaste opération militaire" à Kafroueid. Les forces du régime ont en outre bombardé la ville rebelle de Homs (centre) et pris d'assaut plusieurs localités. L'OSDH a aussi évoqué les assassinats de deux officiers à Deir Ezzor (est) et à Damas.
Conséquence des violences qui se poursuivent, plus de 2 000 Syriens se sont réfugiés ces trois derniers jours en Turquie, a annoncé le centre turc de gestion des situations de crise (Afad), qui dénombre 26 747 réfugiés syriens dans les camps du sud du pays. Au total, les violences qui ont fait au moins 13 400 morts depuis près de 15 mois selon l'OSDH.
Avec AFP
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