Egypte : La confrérie des Frères courtise les jeunes révolutionnaires
Les Frères musulmans, d'un côté, et Ahmed Chafik, de l'autre, ont entrepris samedi de courtiser les électeurs des candidats éliminés au premier tour de l'élection présidentielle en Egypteen se présentant comme les garants des acquis de la révolution de janvier-février 2011.
Cette tâche risque d'être ardue aussi bien pour Mohamed Morsi, candidat d'une confrérie islamiste lente à se joindre au soulèvement contre Hosni Moubarak, que pour Ahmed Chafik, ancien chef de l'armée de l'air et dernier Premier ministre de l'ancien "raïs".
Ces deux hommes sont arrivés en tête d'un premier tour serré mercredi et jeudi, selon les médias publics, dont les estimations correspondent à celles des Frères musulmans. Ils devraient s'affronter au second tour les 16 et 17 juin.
Déjà vainqueurs des élections législatives organisées cet hiver, les Frères musulmans ont convié des candidats éliminés au premier tour à des discussions samedi pour créer une union sacrée contre "le bloc des 'felouls'", le terme péjoratif donné par les révolutionnaires aux vestiges de l'ancien régime dont Ahmed Chafik est le porte-flambeau.
Parmi les personnalités conviées à ces pourparlers portant sur la désignation du ou des vice-président(s) et la composition d'un futur gouvernement de coalition figurent Abdel Moneim Aboul Fotouh, autre candidat islamiste précédemment exclu de la confrérie, et Hamdine Sabahi, représentant de la gauche nassérienne, arrivés aux troisième et quatrième places juste derrière les deux qualifiés.
Ce dernier a fait savoir qu'il déposerait dimanche une demande de suspension du scrutin présidentiel en invoquant des irrégularités de vote. "Nous ferons appel au nom du candidat Hamdine Sabahi (...) auprès de la commission électorale en invoquant toute une série d'irrégularités (...) ayant affecté le résultat du premier tour", a confié à Reuters son avocat. S'il n'a pas appelé explicitement à voter en faveur de Mohamed Morsi, Abdel Moneim Aboul Fotouh a exprimé dès vendredi l'intention de participer "au front uni contre les symboles de la corruption et de l'oppression".
Mettant en garde contre "les efforts résolus visant à ressusciter l'ancien régime", les Frères musulmans prônent la création d'un tel front "afin que l'on ne nous vole pas notre révolution". Ahmed Chafik a usé d'un langage étonnamment similaire samedi en s'adressant à la jeunesse descendue dans la rue pour obtenir la chute d'Hosni Moubarak le 11 février 2011.
"On vous a volé votre révolution", a déclaré le dernier Premier ministre d'Hosni Moubarak lors d'une conférence de presse. "Je m'engage à déposer entre vos mains les fruits (de la révolution)". Selon cet ancien général, "on ne peut pas revenir en arrière", ce qui ne veut pas dire qu'il faut laisser le pays "être aspiré par le chaos".
Il s'en est pris indirectement aux Frères musulmans, jouant sur la peur de la minorité copte et des libéraux laïques en cas de victoire du candidat islamiste à la présidentielle. "Personne ne doit être exclu ou marginalisé", a-t-il dit. "Chacun a le droit de faire partie de la nation égyptienne".
Vendredi, Ahmed Chafik a assuré qu'une cohabitation avec un gouvernement dominé par les islamistes ne lui poserait aucun problème.
Les résultats officiels de ce scrutin historique, la première élection présidentielle libre dans l'histoire du pays, ne devraient pas être connus avant mardi. Ce scrutin s'est déroulé alors que l'Egypte ne s'est toujours pas dotée d'une nouvelle Constitution. On ignore donc quel sera l'équilibre des pouvoirs entre le chef de l'Etat, le gouvernement, le Parlement et l'armée, qui a fourni tous ses présidents à l'Egypte depuis le renversement de la monarchie en 1952.
Le Conseil suprême des forces armées (CSFA), qui pilote le processus de transition depuis la chute de Moubarak, s'est engagé à remettre le pouvoir au nouveau président élu au plus tard le 1er juillet.
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