Plus d'un millier de détenus palestiniens en grève de la faim
Au moins un tiers des quelque 4.700 détenus palestiniens d'Israël (dont près de 310 en détention administrative) sont actuellement en grève de la faim, dont sept depuis plus d'un mois et demi, selon l'administration pénitentiaire, des sources officielles palestiniennes et des organisations humanitaires.
Les médias arabes et occidentaux ont passé sous silence cette terrible information. Des centaines de Palestiniens dont les droits les plus élémentaires sont bafoués dans les prisons israéliennes sont en grève de la faim. Sans qu'aucune pression internationale ne soit exercé sur l'Etat hébreu. " ...Il y a peu de doute que les télévisions et les radios, si promptes à se mobiliser sur les atteintes aux droits humains dans de lointains pays, ouvriraient leurs bulletins d’information sur cette nouvelle, s’indigneraient de cette violation des droits élémentaires, appelleraient nos autorités à réagir et même à intervenir, à imposer des sanctions à Pékin ou à Moscou. Il y a bien deux mille prisonniers politiques qui font la grève de la faim, mais en Palestine. Et l’information ne semble pas intéresser grand-monde. Mais nous le savons depuis longtemps, les Palestiniens, les Arabes, les musulmans ne sont pas vraiment des êtres humains comme les autres", écrit Alain Gresh du Monde diplomatique.
Timides contacts
Les contacts se multipliaient jeudi entre autorités israéliennes, détenus palestiniens et organisations internationales pour trouver une solution à la grève de la faim d'au moins un tiers des prisonniers palestiniens d'Israël. Le président palestinien Mahmoud Abbas et le coordinateur des Nations unies pour le processus de paix au Proche-Orient Robert Serry sont convenus de l'urgence de résoudre cette question lors d'une rencontre jeudi, selon un communiqué de l'ONU.
Le commissaire général de l'Agence de l'ONU pour l'aide aux réfugiés de Palestine (UNRWA) Filippo Grandi a appelé jeudi le gouvernement israélien à trouver une solution acceptable pour les grévistes de la faim, les qualifiant de prisonniers politiques. Il a relevé que leurs revendications étaient généralement liées aux droits fondamentaux des prisonniers, conformément aux Conventions de Genève, selon un communiqué de l'UNRWA. Déclaration bien timide eu égard à l'insoutenable situation de ces prisonniers.
Une responsable de l'ONG palestinienne de soutien aux prisonniers Addameer a fait état de progrès dans les négociations en cours dans les prisons, affirmant que l'administration pénitentiaire semblait avoir accepté de permettre des visites des familles de Gaza et de rétablir certains droits des détenus.
La porte-parole de l'administration pénitentiaire israélienne Sivan Weizman a confirmé des rencontres permanentes avec les prisonniers, sans en révéler les résultats. S'agissant de l'isolement, il a été décidé de former une commission pour examiner chaque cas individuellement, a-t-elle déclaré à l'AFP. La mesure d'isolement de deux prisonniers de longue durée a été levée mercredi soir à l'issue de tractations, satisfaisant ainsi partiellement une revendication des grévistes, ont rapporté la radio publique israélienne et le quotidien palestinien Al-Quds.
Au moins dix détenus sont en danger de mort en raison de la durée de leur grève de la faim ou de leur refus d'une assistance médicale, a affirmé dans un communiqué l'ONG Médecins pour les droits de l'Homme-Israël (PHR-Israël). Plusieurs dizaines de manifestants palestiniens ont bloqué jeudi l'accès aux bureaux du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Ramallah en Cisjordanie, comme la veille pour ceux de l'ONU, afin de presser les organisations internationales d'intervenir. Des dizaines d'autres ont manifesté devant le siège de l'Union européenne à Jérusalem.
Des affrontements ont opposé quelque 150 jeunes Palestiniens, armés de frondes et pierres, aux forces de sécurité israéliennes près de la prison militaire d'Ofer, non loin de Ramallah (Cisjordanie), a constaté l'AFP. Un manifestant a été hospitalisé à Ramallah après avoir été touché à la tête par une balle caoutchoutée.
Au moins un tiers des quelque 4.700 détenus palestiniens d'Israël (dont près de 310 en détention administrative) sont actuellement en grève de la faim, dont sept depuis plus d'un mois et demi, selon l'administration pénitentiaire, des sources officielles palestiniennes et des organisations humanitaires. Ils réclament notamment l'abolition de l'isolement carcéral et de la détention administrative, qui permet l'incarcération sans inculpation ni jugement pour des périodes de six mois renouvelables indéfiniment. Ils revendiquent également l'autorisation des visites pour les prisonniers originaires de Gaza ainsi qu'une amélioration générale de leurs conditions de détention. "Cette grève, précise encore Alain Gresh dans son blog, pose d’abord la question des détentions administratives (c’est-à-dire sans preuve et sans jugement), une pratique héritée de l’époque du mandat britannique, quand Londres luttait (1944-1948) contre le "terrorisme sioniste". Comme je le rappelle dans De quoi la Palestine est-elle le nom ?, ces lois d’exception avaient été dénoncées par nombre de juristes, dont le docteur Moshe Dunkelblum, qui devait siéger plus tard à la Cour suprême d’Israël. Le 7 février 1946, il déclarait : "Ces ordonnances constituent une menace constante contre les citoyens. Nous, juristes, voyons en elles une violation flagrante des principes fondamentaux de la légalité, de la justice, de la discipline. Elles légalisent le plus parfait arbitraire des autorités militaires et administratives. (...) Elles dépouillent les citoyens de leurs droits et confèrent aux autorités des pouvoirs illimités." Mais, une fois arrivés au pouvoir, les sionistes oublièrent ces critiques et retournèrent ces lois contre les Arabes.
La Cour suprême d’Israël, que certains présentent comme le garant de la démocratie dans ce pays, a rejeté l’appel de deux prisonniers administratifs en grève de la faim depuis deux mois (Court rejects petition by Palestinian hunger strikers against detention, Haaretz, 8 mai 2012) (sur Info-Palestine.net). En toute hypocrisie, elle a noté que cette pratique de la détention administrative était «une aberration dans le domaine juridique» et devait donc être utilisée «aussi peu que possible», mais les prisonniers qui avaient fait appel étaient déboutés. Il fut un temps où Israël autorisait officiellement des «pressions physiques modérées» contre les détenus palestiniens : un peu de torture, pas trop... Une décision que cette Cour suprême «humaniste» a soutenue jusqu’en 1999 (on était, à l’époque, en pleines «négociations de paix» entre Israël et l’OLP !).
Sofiane A/Agences
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