Algérie : "Le développement national contrarié"
Le titre du livre "Le développement national contrarié" écrit par Abdeltif Rebah, nous rappelle ce qui se disait au lendemain de la désignation en 1978 de l’officier le plus âgé de l’armée au commande du pays. En ce sens que le programme à Chadli était dans la destruction de ce qui a été fait au temps de Boumediene.
L’auteur fait un bilan de l’économie de l’Algérie ou l’épure du développement entamé au lendemain de l’indépendance apparaît malgré toutes les réformes-restructurations-privatisations et toute l’opacité entretenue sur le projet du développement de l’économie nationale. Aujourd’hui, nous pouvons dire, grâce aussi à cette publication, que nous avons deux expériences et qu’en connaissance de cause nous pouvons en juger. C’est à mon avis très brièvement, la richesse du livre.
Un de ces vides du livre, d'Abdeltif Rebah pose problème. Les tâches d’édification nationale caractérisent un des bilans positifs de la période du président Boumediene et l’engineering national devait en être le marqueur. Pour minimiser ces T.E.N, certains vont jusqu’à gommer les luttes de cette période quand d’autres assimilent la construction de toute une industrie à une route ou autoroute, et du coup l’assimilent à la période actuelle.
Quand je parle de Boumediene j’ai toujours l’impression qu’il a été tué, ce qui me permet d’affirmer encore aujourd’hui que ceux qui l’ont assassiné ne peuvent être que les ennemies de l’indépendance économique de l’Algérie. L’indépendance économique était portée par les Novembristes comme une condition sine qua non à la consolidation de la liberté du pays.
Le préalable à cette condition est dans l’industrialisation qui, elle, est à son tour est conditionnée disent les économistes par l’accumulation.
Il y a encore aujourd’hui jusqu’à des universitaires qui affirment qu’au lendemain de l’indépendance, l’Algérie non seulement était dans un néant industriel, mais aussi le vide dans tous les domaines, et laissent croire que ce sont là les facteurs de l’échec. Ils attribuent l’echec de l’industrie au manque d’accumulation. Oui, l’industrialisation a été un échec mais elle n’était pas une utopie, comme il est entendu.
Monsieur Rebah rapporte dans son livre que "le statut de Sonatrach promulgué par décret du 31 décembre 1963 est la copie quasi in extenso de la loi de 1868…" de la législation française. Cela peut vouloir dire qu’il y a un vide juridique, certainement, mais pas seulement, car la vérité de la Palice a cette constante de cacher la vérité vraie qui dans ce cas est, qu’au lendemain de l’indépendance, nous osions disposer du savoir universel et particulièrement celui qui fait partie de notre "butin de guerre".
Nous avions la rente pétrolière
Je rappelle que nous avions aussi en 1962 plus de six usines de charpente et de chaudronnerie à travers le territoire national, à Alger, Oran et Annaba. La charpente faite à Alger a servi à la construction de plusieurs édifices dont la Grande Poste d’Alger qui, elle, remonte aux environs de l’année 1920, cet exemple pour dire que l’Algérien a vu faire et de manœuvre il a été ouvrier pendant longtemps et parfois jusqu’à chef d’équipe, à la veille de l’indépendance. Nous avions donc des ouvriers d’expérience dans le secteur, sans oublier que des Algériens d’origine étrangère, étaient encore à leur poste le plus souvent de maîtrise et de cadre bien après l’indépendance.
Le regroupement de ces usines à d’autres de même activité ont donné la Société nationale de métallurgie. Quelques années plus tard, il lui a été créé une unité d’architecture industrielle appelée plus commodément l’Engineering, pour faire de cette entreprise un ensemblier. Il faut rappeler que l’Engineering avait atteint en 1977 un effectif de plus de 400 travailleurs dont l’écrasante majorité était des architectes, ingénieurs, projeteurs, dessinateurs…
Au moment où le ministère de Belaïd Abdeslam confie la construction des usines aux multinationales, clés en main, produits en mains et tutti quanti, les 5000 travailleurs de la S.N.Métal et tout l’équipement, un matériel lourd, restent en sous-charge.
L’autre exemple est que la Sonatrach avait par ses propres moyens construit l’oléoduc Haoud El Hamra-Arzew "100% algérien" inauguré en 1966 par Boumédiene comme indiqué dans le livre ; des années après, elle confiait la construction de ses pipes aux multinationales à l’instar du gazoduc signé avec Bechtel le lendemain de l’assassinat du président Boudiaf, au moment même où ses propres capacités chômaient.
Certes la rentabilité financière n’était pas leur souci, par contre la gestion du temps était leur talon d’Achille et le grand capital le savait.
Le ver était dans le fruit, et il ne pouvait en être autrement, c’est ce qui facilite l’acte de seriner l’idée que les pouvoirs qui se sont succédé depuis 1962 sont identiques, jusqu’à confondre le ver et le fruit, et qui a pour conséquence cet amalgame entre le nationalisme porté par l’élan du Mouvement de libération nationale et un nationalisme déclinant jusqu’à la pratique de l’islamisme.
Kouidri Saâdeddine
Commentaires (5) | Réagir ?
Plutot écrire "Le verset était dans le fruit" pour juste compléter votre article, Le ver était dans le fruit n'est pas une mauvaise chose puisqu'il permet de faire du compost, qui est utile pour l'agriculture biologique. Personnellement, victime de la premiére vague d'arabisation, il était plutot sage de garder le statut de la langue française comme langue utile au développement technique et un support d'anglais pour completer la faiblesse du français et ajouter les deux langues nationales tamazight et l'arabe comme langues ancestrales et nationales sans faire dans l'officiel juste pour compléter l'articel de Meziane Ourad.
Ceci etant, il n ya aucun pays au monde qui détient le parfait clé en main dans l'industrie. Toutes les ingenieries du monde travaillent en collaboration, plutot dire une question de méthodes. Disons la France à elle seule ne pourra jamais contruire un epr (European Pressurized Reactor) de troisiéme génération.
Pour cela l'Algerie de 2012 ne manque pas d'argent mais manque de réalisme et de voir les choses en face jusq'au jour de la réssurection (la fin du pétrole).
Un ministre qui veut produire des Renault Bellara sans savoir fabriquer une vis. On doit passer à un autre mode de gouvernance, on est dans l'obligation de s'en séparer de la Sonatrach, demain ou aprés demain autant le faire tout de suite.
Je suis agréablement surpris en lisant l'article de M. Kouidri Saadedine, il y a enfin un livre qui est susceptible d'éclairer l'opinion publique en général et les universitaires en particulier intéressés par la période de construction industrielle entre autres, post-indépendance. Il y a eu à partir des années 80 une véritable machination contre l'élan industriel propulsé à partir de 1966 à 1978. Les nationalisations n'avaient qu'un seul but disposer des moyens nationaux afin de hisser l'Algérien au niveau des standards internationaux dans tous les secteurs. Nous avions des richesses naturelles immenses qu'il fallait gérer avec intelligence et rationalité. Les plans de développements étaient connus les objectifs tracés. Les faiblesses ou erreurs devaient être corrigées.
Notre industrie n'avait pas la prétention d'atteindre le marché européen ou américain rapidement, mais plutôt celui de l'Afrique notamment les anciennes colonies qui accusaient un énorme retard de développement. Aujourd'hui nous dépendons à 98 % du pétrole. Plus grave les pouvoirs publics ne se sentent pas obligés de présenter un bilan de leur gestion. Nous consommons ce que nous ne produisons pas. Nous importons pratiquement tout. Il est inadmissible pour un pays réputé comme ayant été le grenier de l'Europe, se trouve aujourd'hui dans l'obligation d'importer, de l'ail, des fruits etc (oranges, pommes poires oignons, médicaments etc). Où sont passées nos vergers, nos terres ? Le béton est en train d'avaler de grandes parties de notre terre nourricière. Où allons nous ? Y a t-il des hommes lucides capables d'arrêter ces crimes qui auront de graves conséquences sur l'avenir du pays et de ses générations, une fois la rente pétrolière épuisée.