Les héroïnes de la bataille d’Alger vengent les victimes algériennes
En 1954, les initiateurs de la lutte armée posent le problème de l’Algérie en recourant à la lutte armée. Dès le début, les directives sont claires : "Il faut épargner les civils".
En réponse à cette insurrection, les autorités coloniales répondent par la répression. Peu à peu, les ultras participent à leur tour au conflit. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’ils tuent aveuglément. En effet, une seule bombe posée à la Casbah, le 10 août 1956, fait 70 morts parmi les Algériens. Cependant, bien que le FLN ait son propre réseau de bombes, le choix des cibles a toujours obéi à ce que les civils soient épargnés. "Et en tout cas pas d’explosifs risquant de provoquer un massacre dans la population européenne", écrivent Stora et de Rochebrune, dans La guerre d’Algérie vue par les Algériens. Mais après l’attentat de la rue de Thèbes, du 10 août 1956, la stratégie du FLN va changer radicalement. Désormais, aucun Français d’Algérie ne doit se sentir en sécurité, fixent comme objectif les responsables du front.
Désormais, pour les combattants du FLN, ils ne trouvent aucune raison d’épargner les civils français. Bien que la liquidation des ultras et leurs acolytes algériens soient l’objectif primordial de la direction du FLN, après la vague de violence enclenchée par les amis d’Achiary, les cibles du FLN deviennent de plus en plus indéfinies. Ainsi, plusieurs réactionnaires coloniaux, tels que Gérard Etienne, propriétaire d’un cinéma ou le commerçant Jean Di-Roza, vont passer. Dans cette période cruciale, chaque partie est prête à défendre les siens et à donner des coups à l’adversaire. Dans ces conditions, aucune règle n’est à respecter.
D’une façon générale, les commandos du FLN dans la capitale comptent y recourir à tous les moyens. Et ils ne lésinent pas à employer des coups semblables à ceux des ultras. Pour ce faire, ils disposent d’un moyen de combat redoutable : l’engagement des jeunes filles dans le réseau des commandos. Ces dernières disposent d’un atout essentiel. Elles ont une allure qui ne les différencie guère des Européennes. À travers leurs actions héroïques, elles vont venger les victimes de la Casbah du 10 août 1956. Le jour fatidique, elles passent les barrages, munies de sacs contenant des bombes réglables, sans encombre pour rejoindre les quartiers français. "Jeunes, minces, habillées au gout du jour, les trois jeunes filles [Zohra Drif, Djamila Bouhired et Samia Lakhdari], qui ont pu passer sans difficulté des barrages différents pour rejoindre la ville européenne après de simples contrôles d’identité effectués par des militaires qui ne voient aucune raison de se méfier d’elles, ont suivi le plan prévu", écrivent Stora et de Rochebrune.
Quoi qu’il en soit, en dépit de l’inexpérience de ces militantes, elles tiennent leur courage des horreurs qu’elles ont vues à la Casbah. Avec un pincement au cœur, elles accomplissent leur mission. Pour Zohra Drif, elle a pour mission de déposer une bombe à la terrasse du Milk Bar. À 18 heures, elle s’installe à une place. Elle dépose son sac et puis le glisse sous sa chaise. Après avoir payé sa consommation, elle quitte immédiatement le lieu. Quant à Samia Lakhdari, elle a la consigne de déposer sa bombe à la Cafétéria de la rue Michelet. Comme Zohra Drif, elle paye sa commande et disparait aussitôt. À la minute convenue, les deux bombes explosent. Ces dernières - et c’est le moins que l’on puisse dire - ont fait des victimes. Concernant le troisième objectif, confié, pour rappel, à Djamila Bouhired, la bombe n’a pas explosé. Et pourtant, la militante a accompli sa mission. Sa cible est l’agence d’Air France, située dans le hall de l’immeuble Maurétania. Elle n’a pas explosé, "sans doute en raison d’un problème de détonateur ou de branchement de la minuterie", écrivent les deux historiens.
En somme, la recrudescence des actes de violence crée une psychose chez les habitants. Ainsi, aux actes aveugles des ultras, la réponse du FLN est aussi sanglante. Ce schéma arrange bien entendu le FLN. Désormais, personne n’est en sécurité. Bien que le gouvernement français ait rappelé le contingent, les Français d’Algérie se sentent de plus en plus – comme le sont d’ailleurs les Algériens – vulnérables. Cela dit, les Français d’Algérie n’attendent pas spécialement les autorités coloniales pour qu’elles les vengent. Les ultras s’en chargent parfaitement. Pour Stora et de Rochebrune : "Les contre-terroristes, toujours avec le soutien des policiers et de plus en plus de certains militaires, continuent leurs opérations provocatrices et souvent meurtrières à Alger. Comme celle qui aboutit à la mort par noyade sous la torture de Mustapha Chaouch, un buraliste musulman de la rue d’Isly enlevé par les ultras disposant d’une carte tricolore qui le soupçonnaient – à tort de surcroit ! – d’être un responsable qu’on pourra faire parler." Tout compte fait, cette exécution n’est pas marginale. D’autres vont suivre. Elles seront à un rythme effréné.
Aït Benali Boubekeur
Commentaires (7) | Réagir ?
nice article thanks for your information
merci