Rébellion touareg : les combats continuent, les réfugiés affluent
Les appels à un cessez-le-feu entre les rebelles touareg et l'armée du Mali qui se battent depuis mi-janvier dans le nord du pays, provoquant l'exode de milliers de personnes en territoire malien et dans les pays voisins, sont pour l'instant restés lettre morte.
Jeudi, des hélicoptères de l'armée malienne effectuaient des frappes dans le nord-est du pays, entre Kidal et Abéibara, avec pour objectif d'empêcher les rebelles d'évoluer vers Kidal, plus grosse ville de cette région, selon des sources militaires et des témoins.
Le Mouvement national pour la libération de l'Azawad (MNLA) et d'autres rebelles, dont des hommes lourdement armés rentrés de Libye où ils avaient combattu pour défendre l'ancien régime de Mouammar Kadhafi, ont lancé le 17 janvier une vaste offensive qui n'a pas cessé depuis. Ils ont attaqué au moins cinq villes dans le Nord-Est, près des frontières algérienne et nigérienne (Ménaka, Tessalit, Aguelhoc, Andéramboukane et Tinzawaten), deux dans le Nord-Ouest, près de la frontière mauritanienne (Léré et Niafunké).
Ces combats ont fait de nombreuses victimes des deux côtés, sans qu'il soit possible d'établir de sources indépendantes un bilan précis des pertes dans chaque camp, chacun affirmant prendre le dessus. Des responsables militaires maliens ont affirmé que "par stratégie", l'armée laissait les rebelles prendre des camps militaires de petites localités pour se concentrer sur la défense des grandes villes du Nord dont Tombouctou, Gao, Kidal.
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a annoncé avoir rendu visite la semaine dernière à 13 militaires maliens otages de rebelles. L'exode massif de populations (au moins 50.000 personnes) qui trouvent refuge dans les pays voisins et dans des campements de fortune en territoire malien, est un signe de l'âpreté des affrontements. "Au moins 30.000 personnes sont déplacées au Mali et vivent dans des conditions extrêmement précaires", a indiqué le CICR.
Selon le Haut commissariat de l'ONU au réfugiés (HCR), le Niger a accueilli quelque 10.000 réfugiés, la Mauritanie 9.000, le Burkina Faso 3.000 (8.000 selon le gouvernement burkinabè). L'Algérie est prête à faire face à un éventuel afflux "massif" de réfugiés touareg, selon le Croissant rouge algérien (CRA).
La gestion de la crise par ATT contestée
La fin de règne du président malien est chaotique. Les appels au cessez-le-feu se multiplient à l'étranger et au Mali, où des manifestations parfois violentes de femmes de soldats et autres Maliens contre la gestion de la crise par le pouvoir du président Amadou Toumani Touré, ont eu lieu la semaine dernière dans plusieurs villes, dont la capitale Bamako.
En dépit d'un appel au calme et à la tolérance du président Touré, elles ont donné lieu à des actes de xénophobie à l'encontre de biens appartenant à des Touareg et autres personnes à la peau claire vivant au Mali. Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon s'est dit "très préoccupé" par les conséquences humanitaires des combats et a appelé "les groupes rebelles à cesser immédiatement leurs attaques et à entamer un dialogue avec le gouvernement du Mali pour résoudre leurs griefs".
Autodétermination de l'Azawad
La France, dont le ministre de la Coopération Henri de Raincourt est arrivé jeudi à Bamako, a également appelé à "un cessez-le-feu immédiat", jugeant que le recours à la force par la rébellion n'était "pas acceptable". Dans une déclaration le Président du bureau politique Mahmoud Ag Aghaly a affirmé mercredi que "le Mouvement national pour la Libération de l'Azawad (MNLA) se déclare ouvert à un dialogue sincère sur le principe du respect et de la reconnaissance du droit à l'autodétermination au peuple de l’Azawad".
A Bamako, une trentaine de partis politiques de la mouvance présidentielle ont également réclamé un cessez-le-feu et un dialogue. Le ministre malien des Affaires étrangères, Soumeylou Boubèye Maïga, a eu, début février à Alger, des discussions avec des délégués de l'Alliance du 23 mai, dont des membres combattent aux côtés du MNLA. Les deux parties ont lancé un appel "pressant" à l'arrêt des hostilités. Seulement l'Alliance n'a rien à voir avec les revendications du MNLA. Son invitation à la table du dialogue était semble-t-il une manoeuvre maladroite pour saborder le Mouvement touareg. D'ailleurs, la direction du MNLA a affirmé ne se sentir "en rien" engagée par ces discussions. Ce Mouvement dénonce les autorités maliennes qui utilisent des avions pilotés par des mercenaires.
L'impasse actuelle inquiète d'autant plus que le nord du Mali est aussi le théâtre d'opérations d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) qui y détient treize otages occidentaux, dont six Français. Elle menace en outre la tenue de la présidentielle malienne prévue le 29 avril.
Le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, a estimé que c'est "une région laissée libre pour le terrorisme".
Avec AFP
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