Hommage de Tahar Boudjelli à Chérif Kheddam

Cherif Kheddam
Cherif Kheddam

Auteur, compositeur, interprète et chef d’orchestre ; celui qu’on ne cessera pas de surnommer le maestro de la chanson algérienne est décédé le 23 janvier 2012 à l’âge de 85 ans à Paris (*).

Aujourd’hui, rendre un ultime hommage à Dda Chrif est avant tout un devoir de reconnaissance et un acte éminemment culturel. Pour nous tous qui sommes ici présents, c’est avec une grande douleur que nous ressentons sa disparition. Et en ce qui me concerne, j’éprouve beaucoup d’émotion en tant qu’ami et compagnon, pour prononcer ces quelques mots de témoignage que je viens de préparer hâtivement.

Cet enfant prodige du Djurdjura, d’une grande humilité, n’avait de cesse, et comme seule ambition, la quête de la perfection de son art. Toute sa vie, à force de persévérance, de rigueur et de sacrifices, malgré son état de santé précaire durant ces dernières années, ne sera qu’une lutte au service de la culture pour constituer un maillon entre les époques et les hommes. Dda Chrif s’est attaché, dès ses débuts dans la chanson, à se démarquer du carcan de la folklorisation figée, tout en étant fier de son passé. Il se tourne résolument vers l’avenir en s’incarnant dans un style de grande musique, par un travail savant de recherche et d’orchestration, dont il a appris les bases en France en s’initiant, à l’âge de 29 ans, pendant des années auprès d’imminents professeurs au luth, au piano, au chant, au solfège et à l’harmonie, ceci, parallèlement à son travail de dur labeur dans une usine de fonderie dans les Hauts-de-Seine, en région parisienne.

Sans renoncer aux vertus de l’authenticité, il s’est investi dans la musique moderne en introduisant l’apport d’instruments, avec des règles fondamentales universelles, pour créer une œuvre originale sans en falsifier le contenu. Il a ainsi posé les fondements d’un style musical nouveau, en symbiose, où l’on trouve un mélange subtil de l’ancien, du moderne et du classique pour donner au texte sa parfaite tonalité. Il militera toujours en faveur de l’ouverture, avec des thèmes variés. Sa poésie profonde illustre la saveur des mots pour exprimer avec lyrisme les sensations du cœur ; l’amour avec ses bonheurs et ses tourments, la nostalgie, les rêves, le temps passé, l’exil, l’espoir, la patrie, la liberté, la société et le pays avec un nationalisme exemplaire.

Il a aussi chanté fièrement "Tamurt", sa terre natale, la douceur de sa vie, ses montagnes inviolables, son sol ingrat mais verdoyant, en évoquant l’histoire lointaine de ses ancêtres, la mère et toutes les valeurs qui le rattachent aux racines et traditions préservées au cours des siècles par d’âpres combats; enfin, cette terre qui l’a vu naître et qui l’accueille aujourd’hui en elle à la fin de sa vie, pour y élire sa dernière demeure.

Il aura été le ténor de plusieurs générations et représenté une idole et un élément de l’inconscient collectif. Un vrai mythe. Dans un livre qui lui a été consacré par Tassadit Yacine, intitulé : Chérif Kheddam ou l’amour de l’art, il a été démontré que Dda Chrif compte indéniablement parmi les plus grands chanteurs de l’émigration, porteur du devoir de la mémoire, ayant contribué depuis l’exil à transformer leur société pour son épanouissement, dans la pluralité des expressions, sans entraver la liberté des hommes, en défendant le principe de l’identité.

Le récit de Chérif Kheddam, l’une des dernières légendes vivantes et doyen du grand art, s’est poursuivi inlassablement jusqu’à la fin de ses jours, liant ainsi l’histoire d’un homme à celle de la chanson ; la plus belle façon de préserver l’héritage en le modernisant. Aujourd’hui, sa lumière étincelante s’est éteinte, mais l’œuvre grandiose et magistrale, qu’il nous a léguée, brillera toujours et fera partie intégrante désormais de notre patrimoine qui retentira à travers les siècles, donc éternelle !

Jusqu’au bout de son souffle, en père spirituel, fédérateur, il a continué avec conviction de nous réunir à l’unisson, de nous apprendre à nous aimer et à nous faire toujours rêver.

Durant toute sa vie, il est resté égal à lui-même, digne et fier; loin des projecteurs et des feux de la rampe. D’une modestie exemplaire, il ne compte que des amis parmi l’ensemble des artistes et musiciens, toutes générations confondues. Avec un courage surhumain, il a surpassé le handicap de sa maladie, sans jamais se plaindre ni de sa souffrance, ni de son sort. Il emporte avec lui tout un passé riche en événements, fait de joies et de peines, d’espoirs et de désillusions.

Dda Chrif nous a quittés. Maintenant qu’il a rendu l’âme, il s’est débarrassé du lourd fardeau qu’il portait sur ses épaules depuis fort longtemps ; celui de la culture et de l’identité qu’il a défendues durant toute son existence, sans jamais se départir de la voie qu’il avait tracée.

Il vient donc de passer le flambeau... Il avait toujours, comme souci majeur, d’encourager et d’encadrer les nouvelles générations, pour assurer la relève. Avec ta disparition Dda Chrif, c’est un grand monument qui s’en va, mais tu resteras immortel, à jamais gravé dans nos mémoires.

Repose en paix Dda Chrif Ta mission, tu l’as accomplie! Ta symphonie, tu l’as achevée, et nous t’en sommes reconnaissants. Aujourd’hui, nous te disons adieu l’Artiste, le Maestro… Avec notre amour et notre gratitude. Mes vives condoléances à toute la famille, aux proches et à tous les admirateurs anonymes qui t’aiment tant ! Un grand merci à vous tous, pour votre soutien. Akyerham Rebbi A Dda Chrif

(*) Hommage de Tahar Boudjelli, ami, producteur et manager de Chérif Kheddam, lors de l’enterrement de l’artiste.

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Commentaires (1) | Réagir ?

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ranaferhanine bezafbezaf

Athirhim rebbi. Je tenais bcp a vous remercier monsieur Tahar Boudjelli pour votre engagement auprès d'un grand musicien et chanteur comme Cherif Kheddam c'est grâce a vous qu on a aujourd'hui des vidéos de sa grande musique et de ses chants si c'était l'ENTV raciste il y a très longtemps qu'il lui aurait tire une balle dans sa tempe. Visioner bien le comentaire de l'Entv et la video qu'ils ont repiquée sur YouTube pour la diffuser avec son orchestre à Paris et la commentatrice avait insinue qu'il -Cherif Kheddam- avait formé des jeunes... c'est vrai dans l'orchestre il y avait bcp de jeunes mais ils - les gens de l'entv- avait délibérèment omis de dire que la vidéo a été piquée sur YouTube et que la scène se déroulait a Paris -en France- et non à Alger ou Tizi... et que les jeunes qu'il formait sont tous des Francais... messieurs de l entv tout le monde sait que vous êtes de grand raciste par tout comportement envers tout ce qui est berbère... à l'entv on vous dira jamais : cette chanson est tire du style chaoui mais on vous inventera une autre dénomination du genre :style steifi comme s il y avait une frontiere entre la ville de Setif et le chaoui ou la Kabylie de Setif qui use enormement du même style et de la même danse. Mais que voulez vous faire quand on a des ignorants aux commandes du pays, le bateau ne pourra que somber.

PS: est ce que vous pouvez Mr Rabat boudjelli me communiquer le nom du chanteur turc qui avait repris les musiques de cherif kheddam.