Syrie : la Ligue arabe se penche sur sa mission d'observation controversée
La Ligue arabe examine l'avenir de sa mission d'observation en Syrie, qui pourrait être prolongée d'un mois malgré les critiques grandissantes sur son incapacité à faire cesser les violences, marquées par la brève prise d'une ville proche de Damas par des déserteurs.
Un rapport remis par le chef des observateurs, le général soudanais Mohammed Ahmed Moustapha Al-Dabi, est discuté dimanche au Caire par les pays membres de la commission chargée de la Syrie à huis clos, avant une réunion ministérielle plénière. Sur le terrain, des soldats déserteurs ont brièvement pris samedi soir la ville de Douma, à seulement 20 km au nord-est de la capitale syrienne, a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
Tard samedi, des groupes de déserteurs ont "pris le contrôle de tous les quartiers de la ville" après "de violents combats avec les forces de sécurité", avait annoncé à l'AFP le président de l'OSDH, Rami Abdelrahmane, citant des militants sur place.
"Des groupes de soldats déserteurs se sont retirés de Douma et sont rentrés à leur base", a ensuite indiqué dans un communiqué l'organisation installée en Grande-Bretagne. Aucune information de source indépendante n'était disponible sur ces combats, la presse étrangère ayant interdiction de se rendre sur ces lieux.
Selon l'OSDH, les affrontements ont éclaté après que des membres des forces de sécurité ont tué quatre civils en tirant sur une foule participant à des funérailles samedi après-midi. Dimanche matin, un civil de 30 ans a été tué à Douma par des balles tirées depuis un barrage à l'entrée de la ville, alors qu'un autre civil a été tué par les forces de sécurité à Talfita, toujours dans la province de Damas.
Les forces de sécurité ont tiré aveuglément dans ce village où "des affrontements ont eu lieu ce matin entre l'armée régulière et des groupes de déserteurs", selon l'OSDH. Ces combats déroulent alors que les observateurs sont sur le terrain depuis le 26 décembre. L'impuissance de la mission arabe à faire cesser les violences lui valent de vives critiques de la part de l'opposition au régime de Bachar al-Assad, qui réclame le transfert du dossier à l'ONU.
Le chef adjoint de la cellule de la Ligue arabe chargée de la mission, Ali Jaroush, a toutefois déclaré avant la rencontre au Caire que "tout indique que la mission (...) sera prolongée d'un mois", le premier mois ayant été "en partie consacré aux préparatifs logistiques". Un autre responsable, s'exprimant sous couvert de l'anonymat, a indiqué que le nombre d'observateurs serait porté "à quelque 300", soit quasiment le double du chiffre actuel.
Le général Dabi a, dans un communiqué publié samedi soir, défendu le travail de ses observateurs, qu'il a jugés "professionnels et objectifs". Le rôle de la mission "est de vérifier que le gouvernement syrien met en oeuvre les termes du plan de la Ligue arabe pour résoudre la crise et faire cesser l'effusion de sang", a-t-il ajouté.
Mais le Conseil national syrien (CNS), le plus important groupe de l'opposition, a de son côté de nouveau incité la Ligue arabe à transmettre le dossier syrien au Conseil se sécurité de l'ONU.
Le CNS se prépare à envoyer une mission auprès des Nations Unies pour remettre "une lettre demandant que le dossier syrien soit transféré au Conseil de sécurité afin de protéger les civils", a déclaré un porte-parole du mouvement présent au Caire, Mohamed Sermini.
Le bureau exécutif du CNS s'est réuni dans la capitale égyptienne pour finaliser un "contre-rapport" de plus de cent pages basé sur des témoignages de "quinze observateurs" sur le terrain et de militants, a-t-il ajouté. "Nous redoutons que le document de la Ligue arabe ne soit pas objectif", a-t-il dit.
Après plus de dix mois de révolte et plus de 5.400 morts dans la répression selon l'ONU, plusieurs mouvements d'opposition et ONG arabes ont réclamé une saisine de l'ONU, allant dans le sens des demandes occidentales. Les observateurs ont été déployés après l'accord donné par Damas à un protocole régissant leur mission, qui prévoit un arrêt des violences, le retrait des chars des villes et le déplacement libre des médias étrangers. Mais aucune de ces trois clauses n'a été respectée.
Les Comités locaux de coordination (LCC), qui chapeautent la contestation sur le terrain, ont affirmé dimanche que 976 personnes avaient été tuées depuis l'arrivée des observateurs le 26 décembre. Dimanche, la Syrie a rendu la dépouille d'un adolescent libanais de 14 ans et libéré ses deux oncles, des pêcheurs arrêtés alors qu'ils se trouvaient sur leur bateau à la frontière maritime avec la Syrie, a indiqué un responsable libanais.
Avec AFP
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