Il faut moins de honte pour le Maghreb M. Medelci !
Dans quelle situation dans le monde du sérieux peut-on considérer l’Algérie de Mourad Medelci, aujourd’hui, chef de la diplomatie nationale, quand on n’oublie pas qu’il était il y a un quart de siècle, dans ce même pays, ministre du Commerce, puis responsable du Budget.
Il était chargé du business local et international durant la période la plus pitoyable dans l’existence domestique citoyenne, qui a contraint les populations à sortir dans la rue hurler et saccager, laissant en chemin des centaines de morts, de corps torturés et des esprits plein de haine. C’était aussi la période où devait naître l’Union du Maghreb, au sommet de Zeralda, puis à celui de Marrakech.
J’étais à Fès pour une couverture au profit d’Algérie Actualité à côté de mon ami Hacène Ouandjli d’El Moudjahid et de journalistes étrangers venus pour le largage d’une croisière gigantesque à partir de Tanger regroupant des délégations de hauts cadres et personnalités de chaque nation de l’union.
L’Algérie comptait presque deux centaines de participants. Les organisateurs marocains avaient prévu le trajet depuis l’océan mais à la dernière minute les prévisions indiquèrent le départ sur le grand port méditerranéen avec des escales cérémoniales à Oran – ce n’était pas prévu au début mais les responsables algériens insistèrent dans le but inavoué d’exhiber à nos voisins frontaliers les installations d’Arzew et de Béthioua – Alger, Tunis et Tripoli.
A l’intérieur de l’immense paquebot, "le Marrakech", propriété de la famille royale, devait se tenir des conférences et des journées d’études autour des possibles prometteurs. Mais revenant à Fès avant le train spécial pour la ville d’Ibn Batouta. Les délégations se font dirigées sur le Qsar El Djamaï, impeccable dans ses géométries mauresques et avec ses merveilleux jardins botaniques. L’ambiance était propice pour les meilleures approches dans la détente et le libre cours à la spontanéité des rencontres nouvelles ; seulement les membres de notre délégation étaient fauchés comme les blés. Contrairement au reste des invités de la future croisière où ça s’offrait des sus et des étrennes, où ça se préparait à sortir, le soir, en discothèque dans le palais. Evidemment il se trouvait parmi le lot des cades "débrouillards" toujours irrigués qui se tiraient d’affaires s’offrant même le luxe de la générosité en prenant sous leur coupe des compatriotes sans le sou.
Mais aussitôt le zénith, avant le déjeuner, une cellule se met en place pour prendre à partie le chef de la délégation. Et c’était le ministre des Finances en personne, en l’occurrence M. Abdelaziz Khelaf dont je témoigne ici qu’il n’était pas au courant de la méprise, de l’argent de poche à verser à tous les membres du groupe invité. Les préliminaires étaient du ressort du ministre des Affaires étrangères, M. Boualem Bessaïah, qui reçoit l’ensemble de la délégation la veille du départ pour Fès, à El Mouradia. Et Abdelaziz Khelaf estimait alors l’affaire pécuniaire résolue. Soit.
Confus et carrément désemparé, le chef de la délégation appelle Alger, son cabinet, la Présidence, le Trésor, les AE, et je n’en sais plus qui encore. Un délégué est immédiatement dépêché par avion jusqu’à Tlemcen d’où il rentre par route, seulement arrivé exténué il se devait de retourner sur Alger parce que le document officiel en sa possession censé délibérer n’était pas conforme sur le plan des écritures !
Je ne vous raconte pas le psychique du faux espoir chez nos pauvres cadres de la nation et le début de la scie à métaux autour des autres délégations qui se permettaient des tournées et des visites d’emplettes dans la ville.
Vers le crépuscule, l’envoyé spécial repointe mais cette fois pour de bon avec la mallette. Et c’est à partir de là, ya el khaoua que j’ai commencé à vraiment comprendre, Hacène Ouandjli certainement aussi, jusqu’à quel point la gouvernance en Algérie ne ménage aucun effort pour rabaisser la dignité de ses élites.
Le porteur de la valise arrive comme le sauveur de l’humanité ; un responsable lui emboîtant le pas convoque la délégation comme un adolescent qui rameute ses camarades avant un match de foot sans se soucier des oreilles et des yeux des autres Maghrébins qui observent en se pavanant dans les jardins.
Une file, deux par deux, est vite improvisée à l’abord d’une petite table nue rapidement dressée, sur laquelle on pose une liste portant le nom des bénéficiaires, deux mille francs français pour chacun. Mustapha Kateb passa un regard sur celui de Hacène puis sur le mien avant de montrer nos concitoyens alignés sous les bananiers illuminés en clair-obscur par les lampions extérieurs et dit de son calme olympien : "Vous convenez avec moi que nous ne sommes pas en enfer !"
Aujourd’hui, je me sens heureux de ne lui avoir pas dit à âmi Mustapha que j’avait surpris Paul Balta, l’intervieweur de Boumediene, dire à un hôte marocain assis à côte de lui au-dessus de la délégation algérienne récupérant les billets en coupures de deux cents franc : "Je comprends plus clairement maintenant pourquoi ils sont sortis dans la rue en octobre !"
Je raconte cette anecdote parce que je viens d’entendre Mourad Medelci à la chaîne III qui parle encore Maghreb arabe. Heureusement que ce n’était que la radio car, désormais, ça semble ne plus vouloir détenir des couleurs jouables dans le visage.
Nadir Bacha
Commentaires (3) | Réagir ?
Altérer cette importante annonce par un "come back" domestique relève du fantastique !
Que pèse une affaire d'intendance face aux souffrances de milliers de familles séparées depuis des années ?
.... Et un peu plus de procureurs helvètes tout en respectant le principe de non-ingérence sur la justice suisse.