Lettre ouverte à Messieurs Ali Haroun et Ahmed Djebbar
Je vous interpelle aujourd’hui parce que vos noms ont figuré sur l’auguste liste des signataires d’une pétition contre "l’ingérence", à la suite de la présentation du général Khaled Nezzar devant la justice suisse.
Votre attitude est louable mais tout le peuple algérien s’oppose à l’ingérence dans ses affaires intérieures. Cependant, cette pétition a été concoctée non pas tant pour protéger le pays de l’ingérence mais pour soulager celui qu’elle est supposée soutenir ; et cela dénote très bien le malaise dans lequel vit, ces jours-ci, la personne intéressée.
En ce qui me concerne, je vous interpelle parce que vous avez été très proches de Mohamed Boudiaf ; M. Haroun pour avoir été le chercher de son paisible exil, et M. Djebbar, pour avoir été membre de son Cabinet quand il était Président du Haut Comité d’Etat, puis "récupéré" comme ministre pour cautionner la mascarade de "l’acte isolé".
Messieurs Haroun et Djebbar, combien de fois vous ai-je appelés, interpelés, et même cités dans mon récent livre : Boudiaf, l’Algérie avant tout pour vous sensibiliser à entreprendre une démarche, quelle qu’elle soit, pour revendiquer la vérité sur le lâche assassinat de celui qui a été, pour un laps de temps, le chef de l’Etat algérien et qui a marqué, par son honnêteté, plusieurs générations.
Votre participation à la pétition ne me laisse pas de choix. Soit, je me tais pour tromper ma conscience, je me renie pour survivre, je privilégie l’illusion à la vérité, comme vous le faites actuellement, soit je continue mon combat, celui de défendre l’âme de mon père.
Si vous avez inscrit votre démarche dans le noble objectif de prémunir le pays contre "l’ingérence", continuez dans votre logique pour revendiquer la vérité sur l’assassinat du chef de l’Etat, notamment parce que la personne que vous soutenez dans votre pétition était ministre de la Défense et membre du Haut Comité d’Etat, au moment où "l’acte isolé" a été perpétré contre la dignité de tout le peuple algérien. Organisez une pétition demandant la vérité et vous verrez l’engouement que vous initierez auprès de milliers d’Algériens avides de vérité.
Je persiste à vous sensibiliser sur une réalité simple : la vérité, soit vous contribuez à la faire émerger, soit "l’ingérence" vous l’imposera. A vous de choisir. L’O.N.U. s’est bien dessaisie de l’assassinat d’un chef de gouvernement. Pourquoi, ce "deux poids-deux mesures" de l’O.N.U. en ce qui concerne l’assassinat en direct à la télévision du chef de l’Etat algérien ?
Le sang de Boudiaf est trop cher pour être vite oublié. Les idées pour lesquelles on meurt, ne meurent pas. Son vœu de réconcilier le peuple algérien avec sa véritable histoire a été empêché d’être réalisé et la vérité sur son assassinat sera une partie fondamentale de l’Algérie qui se prépare.
M. Haroun, vous qui avez été ministre des Droits de l’Homme, n’êtes-vous pas encore convaincu que la Vérité est un Droit fondamental des Droits de l’homme. M. Djebbar, vous qui êtes professeur "émérite", n’êtes-vous pas encore convaincu que les civilisations ne peuvent jamais être bâties contre la vérité ? A vos consciences d’apprécier.
Je vous rappelle à toutes fins utiles un passage de la lettre que j'ai adressée le 23 août 2001, au haut responsable que vous tentez de défendre par votre pétition :
"….Ce silence ne fait que me conforter dans ma résolution d'aller auprès d'une juridiction internationale… Devant cette juridiction, il faudra répondre à une question simple. Est-ce un acte isolé ou un complot ? L'acte isolé voudrait qu'en plus de l'assassin présumé, des sanctions administratives et politiques touchent la plus haute hiérarchie des services de sécurité qui, en cette grave situation, avaient fait preuve d'une incompétence jamais égalée sauf peut-être par l'impunité. Quant à la thèse du complot, je vous laisse le soin de songer ses à conséquences."
Cette lettre a été reprise comme annexe dans mon livre cité supra. Monsieur Nezzar n'a jamais daigné me répondre.
La vérité éclatera avec vous, sans vous et même avec les "singes de la Chiffa" comme le disait Mohamed Boudiaf.
Nacer Boudiaf
Commentaires (19) | Réagir ?
30 ans après avoir sacrifié les hommes du GPRA, les bourreaux algériens ont sacrifié l'Homme du HCE : fhem yal fahem
Tous les gens qui sont dans le système sont complices de ce meurtre.