Dahou Ould Kablia interdit l'espace public aux associations
Le ministre de l’intérieur Dahou Ould Kablia a venté les mérites de son projet de loi sur les associations à un conseil de la nation déjà tout-ouïe et prêt à signer tout ce qu’on lui propose.
Ainsi au Sénat, le ministre de l’intérieur nous a encore édifiés sur ses véritables intentions. Désormais, on sait que l’objectif d’Ould Kablia est de verrouiller plus qu’il ne l’est l’espace public. La démocratie versus Ould Kablia est avance d’un bon pas avec la bonne grâce et la complicité des députés et sénateurs.
Avec la nouvelle loi sur les associations, les "réformes" du président prennent leur véritable forme répressive. On savait le peu d’intérêt accordé aux propositions des représentants de la presse quand il s’est agit de rédiger le projet de loi sur l’information, on savait aussi le dédain et le mépris souverain du ministre de l’intérieur concernant les observations portées sur la nouvelle loi sur les partis politiques, et on connait désormais le fond de la pensée et les objectifs de ce ministre à travers son projet de loi sur les associations.
L’ordre nouveau est en marche. Aucun segment de la société civile ne devait échapper aux tenants du pouvoir. Chaque loi qui passe devant le parlement croupion c’est un nouveau cran qui se referme sur la société. Nul besoin désormais de l’état d’urgence, le ministre de l’intérieur a trouvé la parade pour empêcher les manifestations publiques, les rassemblements.
D’abord pour les partis réduits à demander des autorisations pour se réunir dans des salles de cinéma. Maintenant les associations n’ont plus le droit d’appeler à un meeting, ou à un mouvement de protestation. C’est interdit. Décision du ministre de l’intérieur, voix officiel du président.
Quand Dahou Ould Kablia (DOK) argue que le texte de loi sur les associations constitue "la structure où se cristallisent idées, théories, propositions et initiatives qui permettent de dynamiser la vie associative et promouvoir le civisme". Il pense le contraire. M. Ould Kablia pense noir et déclare blanc, pour paraphraser le dramaturge et ancien président Vaclav Havel.
Le scénario de Bouteflika s’écrit avec la plume d’Ould Kablia. Les "réformes" sont en fait un faux nez d’un projet plus global, diabolique, visant à verrouiller l’Algérie à toute expression libre.
Comme le parapluie sécuritaire n’est plus efficient on déploie un nouvel arsenal juridique. D’actualité. Ainsi les associations n’ont plus le droit d’appeler à des grèves, car, selon le ministre de l’intérieur, cela relève de "l’ingérence dans les affaires internes du pays". Comprenne qui voudra. Comme si les associations n’étaient pas de droit algérien. Car selon Ould Kablia, une association algérienne n’a pas le droit d’intervenir dans le débat public. Il l’a confirmé devant les sénateurs. Mais alors, à quoi serviraient par exemple les associations qui défendent par exemple les droits des femmes, les associations de consommateurs, des droits de l’homme si elles ne peuvent pas élever la voix, protester et mettre le holà à certains dépassements ? Mais Ould Kablia, en digne successeur de Yazid Zerhouni, est sentencieux. Six fois walis, donc habitué au sécuritaire, DOK ne badine pas avec la liberté dans les espaces publics. Pour lui : "Les associations qui lancent des appels à des grèves visent la perturbation de l’ordre public. Elles s’ingèrent dans la politique du pays et de ce fait, elles risquent de disparaître".
Ould Kablia a une autre conception des associations. Celle qui fait penser aux organisations de masse chères à l’ancien parti unique. Pour le ministre une association est là pour apporter son soutien au président, applaudir quand on le lui demande, voire à dénoncer par exemple un lointain conflit.
Par la main d'une génération révolue, l’Algérie est fourvoyée chaque jour de son long chemin et difficile vers la démocratie. Mais on ne confie pas les clés d’un magasin de porcelaine à un éléphant. Sinon comment – diable ! - des hommes qui ont applaudi et défendu mordicus et servi avec zèle un régime de parti unique pendant 40 ans peuvent-ils se transformer à l'automne de leur vie en démocrates ?
Sofiane Ayache
Commentaires (9) | Réagir ?
Un Marocain qui veut interdire aux Algériens de s’ingérer dans la gestion de leur pays! On aura tout vu et entendu dans la RADP!
Bientôt il va nous interdire de respirer le jour, on aura seulement (s'il le souhaite) le droit de respirer la nuit et les jours de fête. C'est le réflexe d'un système qui a peur...