Une zakat de 15 milliards en 2010 : Bouteflika, un milliardaire caché ?
Le président Bouteflika est-il milliardaire caché ? A-t-il fait une fausse déclaration de patrimoine en se portant candidat à la présidentielle d’avril 2009 ? S’est-il enrichi en dehors de toute légalité ? Dispose-t-il d’un autre patrimoine secret autre que celui qu’il avait déclaré ?
Ces questions se posent à la lecture d’un dossier publié, avec appel en Une, par le quotidien arabophone Ennahar dans son édition du mardi 6 décembre. Dans ce dossier consacré aux personnes fortunées qui s’acquittent de la Zakat, l’aumône obligatoire dans le rite musulman, le journal Ennahar, réputé proche de services de sécurité et du clan présidentiel, affirme que le président de la république Abdelaziz Bouteflika a versé l’année dernière 15 milliards de centimes (150 millions de dinars) en guise de contribution personnelle à cet impôt annuel.
L’information du quotidien arabophone n’a pas été commentée, confirmée ou démentie par la présidence de la République ou par un membre du gouvernement au lendemain de sa publication. La somme versée par le chef de l’Etat est aussi surprenante qu’ahurissante. S’agit-il de la totalité de ses revenus en 2010 ou simplement de 2,5 % de l’ensemble de sa fortune ?
Troisième pilier de l’islam, la zakat est une obligation que tout musulman doit verser chaque année aux pauvres et aux nécessiteux. Le salaire du président de la république étant de 700 000 dinars par mois (contre 260 000 dinars cinq années plus tôt), plus 3000 euros d’indemnités mensuelles, la zakat de Bouteflika représente presque deux années de salaire.
A cette rémunération mensuelle en qualité de chef de l’Etat s’ajoutent une retraite d’ex-ministre des Affaires étrangères et une pension d’ancien maquisard. Bien que le président soit totalement pris en charge par l’Etat, bien qu’il bénéficie de multiples privilèges, il est difficile d’imaginer qu’il se soit constitué au cours de l’année écoulée un bat de laine de 15 millions de cts.
D’où vient donc cette petite fortune dont Bouteflika s’est acquittée en 2010 ? Bouteflika serait-il à la tête d’une fortune cachée ? Les interrogations sont légitimes dans la mesure où des soupçons d’enrichissements douteux pèsent sur son entourage, notamment ses propres frères.
Dans un câble secret de l’ambassade américaine révélée par Wikileaks, l’ambassadeur Ford écrivait en janvier 2008 que la corruption en Algérie a pris de telles proportions qu’elle touche jusqu’aux frères de Bouteflika.
En mars 2011, le magazine français Challenges publiait une enquête sur la fortune des dirigeants arabes.
A propos du chef de l'Etat algérien l’hebdomadaire écrivait ceci : "Ainsi de celle, en Algérie, du président Abdelaziz Bouteflika, encore en poste malgré la contestation de la rue. Officiellement, il ne disposerait que de deux appartements à Alger. Mais, selon des opposants algériens, il aurait détourné avec les généraux une trentaine de milliards de dollars, placés du Liechtenstein au Brésil."
Enfin, la question est encore plus pertinente que la déclaration de patrimoine d’Abdelaziz Bouteflika est plutôt claire. Candidat à sa propre succession pour un troisième mandat en 2009, le président avait déclaré être propriétaire :
- Biens immobiliers :
1. Une maison individuelle sise à Sidi Fredj (commune de Staouéli) suivant acte enregistré sous le n° 226 du 11.11.1987.
2. Une maison individuelle sise rue de la Rochelle, Alger, suivant livret foncier n° 70-68/07 du 11/12/2007.
3. Un appartement sis au 135, rue Cheikh El Bachir El Ibrahimi, El Biar, suivant livret foncier n° 29-39/07 du 26/06/2007.
II -Biens mobiliers
- Deux véhicules particuliers.
Abdelaziz Bouteflika "déclare qu’il n’est propriétaire d’aucun autre bien à l’intérieur du pays ou à l’étranger."
Bien qu’aucune preuve n’ait été avancée pour soutenir les allégations, la fortune supposée de Bouteflika fait l’objet de fantasmes populaires depuis le début des années 1980 date à laquelle il avait été épinglé par la Cour des comptes pour "gestion occulte de devises au niveau du ministère des Affaires étrangères" entre 1965 et 1978.
Dans son arrêt définitif en date du 8 août 1983, la Cour livrait ainsi son verdict : "Abdelaziz Bouteflika a pratiqué à des fins frauduleuses une opération non conforme aux dispositions légales et réglementaires, commettant de ce fait des infractions prévues et punies par l’ordonnance n° 66-10 du 21 juin 1966 et les articles 424 et 425 du Code pénal."
A l'époque, sous Chadli Bendjedid, la Cour des comptes avait rendu publics, dans El Moudjahid du 9 août 1983, des détails précis sur la manière avec laquelle ces énormes sommes ont été détournées : "Agissant alors en qualité de ministre des Affaires étrangères, M. Abdelaziz Bouteflika avait successivement ordonné aux chefs de missions diplomatiques et consulaires, par instructions n° 20 du 14 février 1966, n° 33 du 1er décembre 1966, n° 36 du 1er mai 1967, n° 68 du 1er octobre 1969 : en 1966, de conserver au niveau des postes les soldes disponibles qui devront faire l’objet d’instructions ultérieures particulières. En 1967, d’ouvrir des comptes particuliers devant abriter ces disponibilités. En 1969, enfin, de procéder au transfert des reliquats disponibles vers deux comptes bancaires ouverts auprès de la Société des banques suisses, les reliquats des exercices ultérieurs devant désormais avoir la même destination." Plus loin la cour des comptes observait que "le gel de cette importante trésorerie, qui a notamment profité à un établissement bancaire étranger, n’a donc obéi à aucun texte législatif ou réglementaire et sa gestion échappait totalement au contrôle du Trésor".
Alors Abdelaziz Bouteflika serait-il un milliardaire caché ?
Avec Tayeb Belmadi
Commentaires (13) | Réagir ?
Le salaire du président de la république étant de 700 000 dinars par mois (contre 260 000 dinars cinq années plus tôt), plus 3000 euros d’indemnités mensuelles.
3000 Euros?! C'en est deja un salaire interessant pour un handicapé qui se balade sur la cote algeroise en fauteuil roulant!
@djamel rami : Mon avis de théoligien sur le détournement de la zakat;
Ma réponse est : Hallal !
Dahmane