Tension entre militants démocrates et salafistes devant l'Assemblée tunisienne
Des milliers d'islamistes se sont heurtés à des centaines de sympathisants de gauche qui campaient devant l'assemblée, place Bardo, à Tunis.
A la faveur de la victoire d'Ennahda aux législatives, les salafistes tunisiens sont sortis de l'ombre. Ils comptent peser. Les urgences sociale, politique ajoutées à l'impatience aggressive de ces fondamentalistes compliquent davantage l'equation tunisienne.
En effet, une situation sociale explosive, une économie en berne, des extrémistes qui tentent de pousser leurs pions, et toujours pas de gouvernement. Un mois et demi après les élections du 23 octobre, l'atmosphère est quasi délétère en Tunisie. Devenue l'agora de Tunis, la place du Bardo, face au palais qui abrite l'Assemblée constituante, concentre depuis plusieurs jours toutes les colères et revendications du pays. Depuis mercredi, des centaines de "sit-inneurs", enseignants protestant contre des incursions d'extrémistes à l'université, chômeurs de la région minière de Gafsa, femmes inquiètes pour leurs droits, campent devant l'Assemblée.
"Nous sommes ici, parce qu'il y a dans le pays des urgences sociales que l'Assemblée doit voir, et régler", explique Ines Ben Othman, "porte-parole" improvisée des protestataires. Mais samedi, un autre camp s'est installé, des milliers de sympathisants islamistes étant venus à leur tour marquer leur territoire. "C'est nous, la majorité !" proclament-ils, séparés des protestataires par des barrières et des cordons policiers. Des femmes en niqab et des hommes agitant le drapeau noir du parti salafiste Hizb Tahrir, non légal, figurent parmi eux, preuve, selon les "modernistes", de "l'alliance objective" entre le parti islamiste Ennahda et les radicaux religieux.
L'appétit vorace d'Ennahda
La transition s'avère très compliqué, tant les islamistes commencent à montrer les dents. Ainsi, ces incidents surviennent alors qu'Ennahda, premier parti au sein de l'Assemblée, a été accusé, y compris par ses deux partenaires de gauche, le Congrès pour la République (CPR) et Ettakatol, de vouloir s'arroger les pleins pouvoirs dans le futur exécutif. Après une semaine de tractations laborieuses, les députés sont parvenus, vendredi, à un accord en commission sur l'organisation des pouvoirs, qui sera soumis mardi à l'Assemblée réunie en plénière. Cet accord ouvrira la voie à l'élection du président de la République et à la formation d'un gouvernement, alors que l'exécutif sortant de Béji Caïd Essebsi a officiellement démissionné et ne s'occupe plus que de "gérer les affaires courantes".
"C'est urgent, on ne peut plus attendre. Il y a un climat d'attentisme et de flottement, personne ne décide, ça paralyse l'économie", déplore Hichem Elloumi, un représentant de l'organisation patronale tunisienne Utica. Près d'un an après la révolution, la situation économique et sociale continue de se dégrader. Le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), Mustapha Kamel Nabli, a indiqué samedi que la croissance serait nulle à la fin de l'année 2011, prévoyant une hausse du taux de chômage à plus de 18 %. Le secteur touristique qui employait des milliers de Tunisiens peine à retrouver son dynamisme, pour cause d'instabilité politique.
Violence et agression se multiplient
Des pans entiers de la société tunisienne sont touchés au trognon par la paralysie économique. A l'espoir de la Révolution du Jasmin a succédé un désespoir de trouver un travail rapidement. Ou de nourir sa famille. "Les problèmes sociaux sont exacerbés, le moindre différend dans une entreprise dégénère en conflit. Sans compter les interventions extérieures, comme des chômeurs qui viennent paralyser une entreprise pour réclamer du travail", constate Hichem Elloumi. À Tunis, mercredi, deux chômeurs de la région minière de Gafsa (centre) ont tenté de se pendre en public devant le siège de la Compagnie des phosphates (CPG). Deux localités du gouvernorat de Gafsa ont été mises à sac la semaine dernière après la publication des résultats d'un concours de recrutement à la CPG jugés "truqués".
Situation tendue également dans le Sud tunisien, où les deux points de passage avec la Libye sont fermés en raison de la multiplication d'incidents impliquant notamment des Libyens armés. "Plus rien ne passe, sauf les urgences. Or, c'est vital pour la Tunisie, pour les gens qui vont faire du commerce en Libye", raconte Mongi Slim, un humanitaire sur place. "C'est très tendu. Aujourd'hui, deux voitures appartenant à des hommes d'affaires libyens ont été incendiées devant leur hôtel à Médenine (sud)", indique-t-il. Face à la multiplication de ces foyers de tension, les élus de l'Assemblée constituante ont publié, samedi, un communiqué appelant "au respect de la loi" et à "privilégier le dialogue pour résoudre les conflits".
Yacine K./AFP
Commentaires (4) | Réagir ?
Je crois que l'Afrique du nord ne fera pas l'économie salvatrice d'une gestion désastreuse d'une gestion islamiste. Le prix à payer sera considérable mais hélas les peuples de ces pays, maintenus dans l'ignorance de l'endoctrinement panarabiste doivent vivre dans leurs chairs dans leurs vies quotidiennes, dans leurs économies et dans leurs libértés les affres dévastateurs d'une dictature islamothéocratie pour qu'ils se rendent compte de ce que cette doctrine engendre comme déliquescence tout azimut, et comme ruine et désastre économique et humain, car pendant ce temps là, les pays émergents, Chine, Brésil, Inde.... et les pays dits développés se partageront presque toutes les richesses de la planéte....
Un chemin de croix, (ou du croissant) par lequel ils seront obligés de par l'ignorance et l'archaïsme sociétal dans lesquels ils sont plongés, de passer.
Les frères musulmans représentent la bourgoisie arabe, ils vont soumettre les peuples arabes puis les asservir.
Je crois bien que votre raisonnement est plutôt à côté de la plaque l ! Autrement, les islamistes Indonésiens, turcs, chinois ou mêmes berbères, ils représentent qui alors ?