Ministres et institutions hors la loi
Décidément, l’Algérie d’en haut a du mal avec les lois de la République. Le pouvoir fascine, on le sait, mais surtout fait perdre la raison et éloigne des devoirs les plus élémentaires. Autrement dit, le respect dû aux lois qui régissent tout pays normalement constitué.
C’est connu, on ne fait pas du neuf avec du vieux. Chaque jour qui passe nous montre que le discours d’ouverture du président de la République et de ses groupies n’est qu’un écran de fumée. Un jeu machiavélique destiné à recycler un personnel politique largement compromis jusqu’au coup dans la paralysie du régime.
Mokrane Aït Larbi nous avertissait (*) sur le viol des institutions de la République par ceux-là même qui sont censés les respecter et les protéger. Il a soulevé la paralysie qui touche deux institutions : le Conseil constitutionnel et le Conseil supérieur de la magistrature.
Le Président du Conseil constitutionnel est désigné, en vertu de l'article 164 (alinéa 3) par le Président de la République pour un mandat unique de six ans. Boualem Bessaïeh nommé en 1995 a légalement terminé son mandat non renouvelable à la tête du Conseil constitutionnel. Mais il est toujours à la tête de l’institution. Donc hors-la-loi. Même constat au Conseil supérieur de la magistrature.
Pourquoi ne partent-ils pas ? Pourquoi continuent-ils à s’accrocher à leur poste ? Pas étonnant, quand on sait que par exemple Boualem Bessaïeh est un enfant de l’ancien parti unique. Habitué à la proximité du pouvoir, il a oublié que les institutions sont pérennes pas les hommes qui les dirigent. Comme l’écrasante majorité du personnel politique algérien, il ne se voit pas redevenir un simple citoyen. Quitte à fouler au pied les lois de la République.
A dire vrai, ces hommes constituent des relais fidèles au pouvoir ; des supporters indéfectibles prêts à tout et sans état d'âme pour défendre le régime en place. Aussi, instruit de cet état de fait, le président de la République ne semble pas pressé d’apporter les changements. A trois mois des législatives, il temporise comme à son habitude. En réalité, chacune des deux parties trouve son compte. L’horloge de la société est trop en avance sur celle du président.
L’autre expression de mépris des lois de la République nous vient de ministres de la coalition. Candidats à la députation, ils s’accrochent en même temps à leur maroquin ministériel. Pourtant l’article 93 du nouveau projet de loi électorale est clair. Il “exige des membres du gouvernement, envisageant de se porter candidats aux prochaines législatives, de démissionner trois mois avant la date du scrutin”. Qu’importe ! Nos puissants ministres s’en moquent. La loi est faite pour les autres… les simples citoyens, comme vous et moi. Le quotidien Liberté nous apprend qu’ils sont vent debout contre cet article. Ils veulent le supprimer, et donc pouvoir se présenter à la députation tout en gardant les déjà trop gratifiants privilèges ministériels.
Les réformes promises censées être un conte politique est en train de devenir un vaudeville de mauvais goût. Les signaux sont de plus en plus édifiants : le régime ne veut pas organiser la transition. Il préfère le statu quo.
Par leur ombrageux déni de l’alternance, ces ministres au bilan plus que douteux participent, dont la plupart sont là depuis 10 ans, au désespoir de voir un jour prochain le système s’affranchir de ses vieilles ficelles.
Sofiane Ayache
(*) Voir l’article reproduit d’El Khabar
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Les dirigeants algériens pourraient donner des cours en matières de mafia à la grande mafia italienne.