Un Algérien n'a pas été renvoyé dans son pays pour risque de maltraitances

Cour européenne des droits de l'homme.
Cour européenne des droits de l'homme.

Un Algérien en situation irrégulière en France n'a pas été expulsé car il risque un traitement inhumain ou dégradant, estime la Commission européenne des droits de l’homme (CEDH). Cette prise de position est une première, car elle concerne un homme reconnu coupable de terrorisme.

H.R., le requérant, a en effet été condamné par une cour d'assise en Algérie à la réclusion à perpétuité, il y a douze ans. Il avait hébergé en 1998 un groupe de terroristes pendant une semaine. Il l'avait fait sous la menace, et avait été immédiatement prévenir les autorités dès le départ des hommes, selon son témoignage. Mais pour la justice algérienne, il s'était rendu coupable par son comportement de «création et fondation d’un groupe terroriste et tentative de meurtre sur les hommes de la sûreté nationale».

Contrefaçon de monnaie

Fuyant aussi bien la justice de son pays que les terroristes qui pouvaient vouloir lui régler son compte, H.R. s'était réfugié en France en 2000. Il avait fait plusieurs demandes de régularisation, toutes rejetées. Mais l’homme n’est pas pour autant blanc comme neige. Il avait fait de la prison, pour contrefaçon de monnaie, détention frauduleuse et usage de faux documents administratifs. Après avoir purgé sa peine, il avait fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière.

«Fallait-il vraiment le renvoyer en Algérie sachant qu'en matière de terrorisme, l'Algérie est connue pour ses méthodes parfois critiquables, pour user d'un euphémisme ? » s’était interrogée la CEDH.

La situation du requérant

Dans son arrêt rendu aujourd'hui , 22 sept. 2011, n° 64780/09., la Cour s'est posé la question suivante: y a-t-il un vrai danger de traitement inhumain ou dégradant ?

Oui, répond-elle. Tout d'abord, de précédentes affaires ont déjà mis en lumière l'existence d'un risque de traitement contraire à l'article 3 de la Convention pour des personnes impliquées dans des faits de terrorisme, notamment l'arrêt"Daoudi"(2). Depuis, un rapport de Human Rights Watch relatif à l'Algérie de janvier 2010 a notamment précisé qu'il y avait encore des violations de droit humains, notamment des "sévices infligés par la police aux personnes soupçonnées de terrorisme pendant les interrogatoires".

Ensuite, le cas d'espèce est particulièrement délicat, puisque le requérant a écopé en 1999 d'une peine très lourde, de réclusion à perpétuité. Ce seul fait risque d'attirer "l’attention des autorités algériennes à son arrivée à l’aéroport".

Enfin, H.R. ne dispose plus d'aucun droit de recours dans son pays. La peine est devenue définitive. Il existe pourtant en Algérie une loi sur la concorde civile, qui prévoit l’extinction de l’action publique envers les personnes condamnées pour ce type d'actes, qui se présentent volontairement aux autorités compétentes, cessent de

commettre des faits liés au terrorisme et remettent les armes en leur possession. Mais il existe un délai maximum pour cela, qui est de six mois à compter de la publication de la loi. Délai largement expiré.

Le droit algérien en 2011

La Cour a également eu à s'interroger sur un autre sujet : celui de savoir si la levée de l’état d’urgence en Algérie, le 23 février 2011, avait ou non modifié la donne. Y a-t-il moins de risque pour le requérant suite à cet évènement ? Est-il d'avantage protégé ?Non, a estimé la Cour. En guise d’argument Un communiqué de presse du Conseil des ministres selon lequel les nouvelles dispositions applicables «n’instaureront aucune situation nouvelle mais permettront, par contre, la poursuite de la participation de l’armée nationale populaire à la lutte contre le terrorisme jusqu’à son terme».

Ce qui a trait à la lutte contre le terrorisme ne semble donc pas évoluer, puisque l'armée continue de s'en occuper (seule désormais, alors qu'elle partageait auparavant cette charge avec les autorités civiles), qu'il y a selon la juridiction strasbourgeoise une "volonté clairement énoncée de poursuivre les pratiques antérieures", et qu'"il est fort probable" que se poursuivent donc les"méthodes dénoncées par les rapports internationaux".

De tout cela, la Cour conclut qu'il existe pour le requérant "un risque réel qu’il soit soumis à des traitements contraires à l’article 3 de la Convention de la part des autorités algériennes en cas de mise à exécution de la mesure de renvoi. Par conséquent, la décision de renvoyer le requérant vers l’Algérie emporterait violation de cette disposition si elle était mise à exécution".

Lextimes.fr

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Commentaires (1) | Réagir ?

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laid baiid

Il y 'a des jaloux???Un g