Ecoutons Boudj, une des dernières mémoires d'Alger...

Boudjemaâ Karèche, ancien directeur de la Cinémathèque d'Alger.
Boudjemaâ Karèche, ancien directeur de la Cinémathèque d'Alger.

Alger a plusieurs vies. En 2010, la Cinémathèque ré-ouvre mais elle ré-ouvre sans Boudj. On nous parle de Boudj, "allez voir Boudj, c’est la mémoire d’ici". Boudj, c’est Boudjema Kareche, un fils d’Alger qui dans les années 70, va plus à la Cinémathèque qu’à la fac. Spectateur en 75 - grande année du cinéma algérien avec la palme d’or à Lahdar Amina pour Chroniques des années de braise. Boudj, on lui donne les clés de la cinémathèque en 78 et c’est le début de près de 30 ans de lutte pour la beauté, le cinéma, malgré les années noires et les menaces. Aujourd’hui le cinéma est blessé mais revit doucement avec la jeune génération, pour qui Boudjema a compté.

Ca fait 8 ans que Boudj ne va plus à Alger. Forcé de quitter la cinémathèque. 8 ans qu’il ne parle plus, pas d’interviews : Boudj est exilé, retiré à la Madrague, à quelques kilomètres d’Alger, près de l’eau. Mais rien de nostalgique, c’est aussi une façon de dire : place aux jeunes maintenant, place à ses deux fils qui ont grandi à ici à la Madrague. La famille a été protégée par les « p'tits gars » du quartier, qui pendant la décennie noire répondaient aux curieux ou aux plus dangereux : "non, non, Kareche ? on ne connaît pas, n’habite pas là".

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Alger, nouvelle génération : Les années cinémathèque

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Commentaires (3) | Réagir ?

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Boumediene Missoum

M. Boudjema Karèche symbolise le cinéma algérien. Du temps où j'étais responsable de la salle de répertoire de Tiaret, j'ai eu alors le privilège et l'honneur de côtoyer cet homme. Bien qu'il était le gestionnaire de la Cinémathéque, il n'était en aucun cas le bureaucrate administratif car il avait véritablement une âme d'artiste! Il aimait toujours la présence de comédiens, de cinéastes et de musiciens. Lors de ses visites à Tiaret accompagné par des réalisateurs ou acteurs dans des festivals ou rencontres cinématographiques il était apprécié aussi bien par les cinéphiles de la région, mais aussi les artistes et les intelectuels de la ville de Ali Maachi. Par sa modestie et sa curiosité, il aimait aussi rencontrer ce citoyen de cet "Algérie profonde" pour échanger avec lui leurs expériences et connaitre ses opinions sur l'actualité et les problèmes socio-culturels. Hélas Tiaret connue par son enthousiame et sa vie culturelle ne cesse de régresser, comme d'ailleurs toutes les villes du pays qui se trouvent actuellement confinées et rattrapées par l'indifférence, le laisser-aller, l'intolérance, l'intégrisme et l'immobilisme intolérable des autorités et surtout aussi par la complicité des "ouled el bled". Au lieu de bénéficier de l'expérience d'une telle personnalité et de cette mémoire intarissable, on met Boudj au placard et on se contente alors de larbins, d'incompétents et d'opportunistes qui aiment applaudir et se vautrer devant leurs maitres. En racontant les événements de notre manif devant la cinémathèque de Bordj Bou Arréridj, je ne pouvais que conforter mon appréciation de cet homme résistant et courageux. En lisant son livre "Juste un mot", j'avais les larmes aux yeux en parcourant les bons souvenirs vécus dans cette famille qu'était la Cinémathèque. De mon lointain exil, je salue cet homme exilé aussi dans son pays et lui assure de toute mon amitié ! Boudjemaâ Kareche était à lui seul une Institution !!!

De Berlin, la ville de Brecht et de Rosa Luxembourg, je lui souhaite une longue vie pour nous rappeler toujours que seuls l'intelligence, la beauté, l'amour, la tolérance et la vérité auront toujours le dessus sur l'hypocrisie, la médiocrité et l'obscurantisme.

Boumediene Missoum, Berlin (Allemagne)

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Aziz FARES

Respect et hommage Mon ami Kareche qui a su faire vivre le cinéma

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Boudjemaâ c'est lui la bibliothèque de la cinémathèque, pas les 2000 films de celle-ci malheureusement la médiocrité a eu raison de lui.