Le changement est inéluctable, pourquoi et comment ?

Manifestation de la CNCD.
Manifestation de la CNCD.

A l'instar de vos contributions et prises de positions sur la vie politique et économique de l'Algérie, je viens de lire celle parue dans le journal Liberté du 26/27 août courant. Cette dernière fait un constat, porte des critiques objectives et apporte quelques suggestions comparatives pour un changement démocratique et des généralités sur la sortie de crise.

Toutefois, si je puis me permettre, en dehors de certains (es) initiés (es), personne n'est remonté jusqu'aux racines du mal qui ronge l'Algérie depuis le premier coup d'Etat de 1957 contre Abane Ramdane et le GPRA par la suite. Il est vrai aussi que le passé c'est le passé, le présent nous le vivons et l'avenir nous ne le connaissons pas. Mais devrions-nous en rester là vis-à-vis de l'histoire et de la nation ? J'ai constaté aussi une certaine gêne lorsque la presse évoque l'opposition, et je la comprends. Mais toute la question est là car c'est ce qui fait la force du pouvoir totalitaire et illégitime. Les raisons inavouées de l'opposition démocratique qui n'arrive pas à s'entendre sur les démarches à entreprendre pour forcer l'indu-pouvoir soit à changer le système politique avec toutes les forces démocratiques et républicaines soit à céder la place à ceux qui aspirent pacifiquement à un réel changement et à une démocratie sociale.

L'union désintéressée la plus large

Ce n'est pas le système politique qui est fort, c'est l'impuissance et l'incapacité de l'opposition (partis démocratiques et société civile), à s'unir pour faire converger leurs projets et conjuguer leurs efforts contre cette mafia économico politico populiste qui gère cette malheureuse Algérie. Une fois la victoire acquise, grâce au mouvement populaire et à l'union des forces politiques, tout un chacun pourra reprendre ses activités partisanes ou autres. Hélas, la problématique qui s'impose sournoisement à cette union désintéressée s'appelle leadership. Ce démon qui ronge les acteurs politiques affiliés aux partis ou non, société civile, les mouvements associatifs et syndicales ou autres sont-ils capables, à l'heure actuelle, de le surmonter dans l'intérêt de l'Algérie ?

Le pourront-ils, car il est tellement ancré en eux, qu'il leur sera difficile de le surmonter. Tellement les enjeux des uns et des autres prédominent de façon inavouée, mais perceptible. En plus de ce constat, s'ajoute l'action psycho logique et le travail de sape mené par le pouvoir mafieux pour créer et entretenir un climat de suspicion entre l'opposition (structurée ou non) et la population. Cette dernière qui est de bonne guerre est surmontable dans la mesure de la mise en retrait temporairement, au moins de façon apparente, leurs sensibilités afin de faciliter l'adhésion et la cohésion populaire avec eux pour combattre avec une force émergente qui mènera le combat d'ensemble et pacifique contre ce dialogue jusqu'à la victoire finale. Après la libération du peuple, chaque acteur de l'opposition retournera à ses activités politiques, associatifs ou autres.

Le travail de sape du DRS contre la CNCD

A titre d'information sur la désaffectation et le désintéressement populaire de la chose politique, prenons l'exemple de l'émeute de janvier 2011 qui donna naissance à la CNCD. Au début, il y avait, en plus d'un engouement de militants engagés, une synergie, entre le politique, l'associatif, le syndicat, dit indépendant, la société civile et la population, caractérisée par un déferlement de manifestants pacifiques dans la rue. Cette action fit trembler le pouvoir qui, en plus de la répression sauvage, entreprit un travail psychologique auprès de tout ce monde pour ranimer le climat de suspicion endormit entre diverses fractions de l'opposition et casser la symbiose militante qui commença à prendre forme. Ce travail de coulisses des services occultes dont le DRS, consistait à créer un climat de psychose, de doute et à dresser sournoisement les uns contre les autres afin de faire éclater la CNCD ; et c'est ce qui fut fait dès la 3ème réunion, qui eut lieu à Dar El Baida, si ma mémoire est bonne car j'y été présent en tant qu'indépendant politiquement mais représentant d'une organisation internationale appelée Congrès mondial amazigh.

Cette action menée par les services de renseignements et de la police politique donna naissance à deux groupes; l'un pour le politique avec certaine associations et l'autre les syndicats dit autonome avec d'autres. Ce travail destructeur s'est répercuté sur l'engagement populaire qui commença à se retirer et à s'effilocher; d'où la réapparition du démon de méfiance et de division entre les acteurs de la contestation citoyenne de rue, la classe politique démocratique et les autres sensibilités. Fort de ce premier résultat, les services occultes avec le DRS poursuivirent leur mission de lutte contre l'opposition agissante en direction des deux dynamiques pour une même cause apparente. Pour un groupe, dont certains leurs sont peut-être proches, ils ont réussi à le réduire aux formes de contestations verbales et écrites.

Quant à l'autre groupe dont la dimension politique et populaire est plus conséquente et qui se réunit au centre d'Alger tout en faisant des démonstrations de forces pacifiques dans la rue d'Alger, un travail de musellement méthodique, de manipulation interne et externe des uns et des autres qui ne dit pas son nom fut entreprit; à cela s'ajoute l'animosité et l'incompréhension entre personnes qui n'ont rien à voir avec les sensibilités politiques. Les résultats souhaités par le système politique ne tardèrent pas à donner leurs fruits. C'est-à-dire, disloquer et faire taire la CNCD sans coup férir et faire dire à la population que les organisateurs de cette coordination sont incapables, qu'ils n'y a que leurs intérêts propres qui les intéressent et qu'ils sont là parce que le pouvoir les a actionnés. A la suite de ses scissions découlant du travail de sape des services occultes et apparents ainsi que des diverses; la lueur pour un changement démocratique initié par quelques sensibilités politiques commença à s'éteindre ; le désespoir regagna le peuple et ainsi, les rassemblements se rétrécissaient de semaine en semaine avant de disparaître de la scène. La perte de confiance en la classe politique démocratique du fait du musellement, de la manipulation médiatique, de la désinformation à l'endroit de certains partis politique menée par le pouvoir réel et apparent, la manne pétrolière utilisée à des fins de pouvoir personnel et à l'achat de la paix sociale ainsi que de l'éternelle division, de la difficile union, de l'incompréhension et des erreurs de jugement de la classe politique opposante ont fait dire au peuple qu'il y a une certaine connivence entre cette dernière avec le pouvoir qui l'actionne au gré de la conjoncture politique et de ses intérêts pour détourner l'attention de la population de ses moult problèmes. Dans les quelques conditions décrites ci-dessus et de l'euphorie de la prétendue ouverture démocratique amorcée le 05 octobre 1988 découlant d'un soulèvement populaire lâchement et sauvagement réprimé, que faire ?

- Pour la renaissance de l'esprit militant d'antan.

- Pour la cohésion du peuple plongé dans l'indifférence totale et dans l'individualisme du fait de ses gouvernants

- Pour faire renaître la confiance entre la population et l'opposition politique démocratique

- Pour faire perdre à la population l'appât du gain facile et immédiat

- Pour faire estomper l'esprit d'assistanat incrusté dans la conscience des Algériens depuis des décennies par les pouvoirs illégitimes qui se sont succédé au lendemain de l'indépendance territoriale

- Pour remplacer la perte de confiance et le repli sur soi par le vivre ensemble dans la différence et la pluralité.

- Pour réapprendre à l'Algérien le sourire......

La liste est longue pour redonner à l'algérien (ne) l'espoir d'une Algérie et d'une vie meilleures.

Pourtant, ce ne sont pas les bonnes volontés qui manquent pour actionner un mouvement d'ensemble afin de changer la donne pacifiquement, mais c'est le déclic des mentalités politiques et sociologiques des uns et des autres qui fait défaut, ainsi que les déperditions militantes, citoyennes et la perte de l'assurance en soi et de l'espoir pour aboutir à un résultat positif tant espéré sur le plan politique, social, économique et culturel.

S'accepter avec nos différences pour batir une opposition crédible

Pour cela, il suffit que les acteurs politiques (affiliés aux partis ou non) démocratiques et républicaine, la classe intellectuelle, les tenants d'une certaine forme religieuse et ceux d'hier qui n'arrivent ou ne veulent pas arriver à admettre que le monde change, se remettent en cause et se rectifient pour mener à bon bord le bateau de l'Algérie nouvelle. La manière de pensée et d'action pour amorcer un nouveau départ dénué de tout calcul sournois doit être revue et corrigée pour en faire bloc avec le peuple et non le voir et/ou le considérer autrement. Bannir le paternalisme, le populisme récurrent, le clanisme, le clientélisme et l'esprit manipulateur qui prédominent même chez certains acteurs politiques nés dans les années 1940/50 par contamination de la pensée unique de la période post-indépendance animée par ceux qui pensent être détenteurs de la vérité et les meilleurs idéologiquement. Être rassembleur et non diviseur sournoisement ou se focaliser sur la question de leadership qui est perceptible par le peuple; gagner la confiance entre acteurs politiques, entre citoyens (nes) et acteurs politiques; ne pas prétendre détenir la meilleure démarche, s'accepter mutuellement dans la différence, ne pas reproduire les mêmes causes qui ont abouti à la suspicion, croire en la force du peuple qui a donné ses preuves ailleurs (Tunisie, l'Égypte, Libye) en dehors de la classe politique qui a fini par rejoindre les contestataires. Sans parler des années de plomb et de lutte clandestine où il y avait accompagnement politique dans l'action, il ne me semble pas avoir vu d'accompagnateurs ou d'un accompagnement désintéressé lors des différents soulèvements populaires qui ont eu lieu entre 1988 à nos jours. S'est-on posé la question ou a-t-on tiré des conclusions et des leçons sur le non aboutissement des soulèvements populaires qui ont eu lieu depuis 1988 à nos jours ? Permettez-moi d'en douter.

Pour faire une révolution, il faut qu'il y ait une symbiose entre tous les acteurs (citoyens (nes) classe politique, intellectuelles, syndicats et organisations de masses éprises de démocratie réelle et républicaine); sans cela il est impossible d'aboutir au changement tant souhaité. Les partis politique armés de l'unité d'action, pratiquant la critique et l'autocritique; un front uni composé de toutes les fractions démocratiques opposantes au régime autoritaire et tribale ainsi que de toutes les forces démocratiques vives de la nation liés à la population; voilà les armes principales avec lesquelles l'illégalité étatique et ses attenants seront vaincus

Il faut avoir confiance dans le peuple, dans les partis démocratiques et dans la classe intellectuelle, tous unis pour en faire un seul et même corps: ce sont là des principes fondamentaux. S'il y a un moindre doute à cet égard, nous serons incapables d'accomplir quoi que ce soit.

Bien sûr, la tâche est ardue mais pas impossible si chacun y met du sien car l'engagement militant c'est comme un moteur, et s'il lui manque une vis, il y a panne.

Madjid A. M.

Militant d'un Comité de citoyen et d'une ONG internationale

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Commentaires (10) | Réagir ?

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arine arma

merci pour le partage

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