Double attentat d'Alger : Frustrations et d'exclusions sociales terreau d'Al Qaïda

Double attentat d'Alger : Frustrations et d'exclusions sociales terreau d'Al Qaïda

Tout à sa stratégie de réconciliation nationale adoptée par référendum en 2006, promettant l’amnistie à tout islamiste armé qui déposerait les armes, le pouvoir du président Bouteflika a pratiqué une politique de l’autruche vis-à-vis de l’islamisme radical. Volontairement ou non, persuadé que les islamistes finiraient par rentrer dans le rang, le discours officiel minimisait la menace islamiste. Ainsi quand le 11 septembre 2006, cinquième anniversaire des attentats du World Trade Center, l’ex-GSPC a annoncé son ralliement à la Qaïda, promettant la poursuite «°du djihad en Algérie°», le pouvoir algérien a choisi de faire la sourde oreille. Il a fait de même quand le 21 septembre, Ayman Zawihiri, le bras droit de Ben Laden, a ordonné à ses affidés du GSPC de débarrasser «°le Maghreb islamique des fils de la France et de l’Espagne qui sont revenu dans la région°».
Quelques jours après cette annonce a lieu le premier attentat suicide contre un convoi de ressortissants français travaillant en Algérie dans la région montagneuse de Lakhdaria. Qui plus est, le pouvoir algérien n’a pas réagi quand le GSPC a annoncé en janvier 2007 sa transformation en Qaïda des pays du Maghreb islamique promettant d’étendre le djihad à l’échelle du Maghreb et au Sahel. Un mois plus tard, la nouvelle organisation revendiquait les sept attentats simultanés ( huit morts) dans l’Algérois et en Kabylie ciblant des commissariats de police et des postes de gendarmerie. Le rythme des attaques contre des convois militaires couplé aux attentats suicides dont celle qui a ciblé le président Bouteflika en personne, est allé alors crescendo faisant entre le 1 er janvier et la fin octobre 2007 plus de 400 morts.
La nouveauté par rapport à l’ex-GIA (Groupe islamique armé) qui avait ensanglanté l’Algérie durant les années 90, c’est le recours aux attentats suicides. Ce changement de stratégie s’explique par l’échec de la guérilla classique°: les maquis islamistes ont été laminés par l’armée algérienne à la fin des années 90. Un changement de stratégie animé par des acteurs radicaux devenait nécessaire pour à la fois relancer le djihad et contrôler l’expression de l’Islam dans l’espace public. Une stratégie qui, d’une part, s’appuie sur l’Internet, moyen par lequel l’ex-GSPC diffuse son idéologie, ses informations en temps réel et des vidéos sur ses actes guerriers et, partant qui lui a permis de recruter des jeunes°; et qui s’appuie d’autre part, sur les chaînes d’infos satellitaires, notamment celle des Emirats du Golfe, comme al-Jazira, qui lui permettent de donner une résonance internationale à ses actes.
Ce terrorisme «°virtuel°», permettant à des jeunes de télécharger des vidéos de la Qaïda dans les cybercafés d’Alger et de Casablanca, qu’ils se passent et qui permet aux islamistes radicaux de recruter est un fait nouveau au Maghreb. Il tend de plus en plus à supplanter les mosquées dans leur fonction de vecteur de diffusion de l’idéologie islamiste radicale. Ainsi s’explique la permanence d’un recrutement constant de nouveaux adhérents.
Une idéologie qui n’a pas de mal à prendre pour cette partie désespérée de la jeunesse algérienne sans perspectives d’emploi car l’horizon est bouché alors que le pays n’a jamais été aussi riche en se constituant un matelas de réserves de change de plus de 100 milliards de dollars. En effet, avec ces nouveaux riches au luxe insultant alors que la paupérisation touche un tiers de la population, l’islamisme radical a encore de beaux jours devant lui.
Il prospère dans un terrain où s’enracinent les frustrations et les exclusions sociales ainsi que les ressentiments de toutes sortes. Quant une partie de ces jeunes s’embarquent au péril de leur vie dans des embarcations précaires pour rejoindre l’Eldorado européen - plus de 1.200 «°harragas°» ont été interceptés par la marine nationale depuis le début de l’année -, d’autres, sans pour autant adhérer aux idéaux de l’islamisme radical, cèdent aux sirènes islamistes et, partant, à la tentation des attentats suicides par désespoir de cause.

H.Z

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Commentaires (6) | Réagir ?

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Khelaf hellal

De mon point de vue, je pense qu'il ne faut pas avoir peur de dire que nous sommes confrontés à une nouvelle forme de fascisme idéologique international qui ne frappe pas aveuglément comme on est tenté de le croire. Il s'attaque généralement à tous les pays qui n'obéissent pas ou ne reconnaissent pas ses dogmes religieux et ses revendications idéologiques et communautaires. Et d'ailleurs meme s'ils le reconnaissent et le respectent comme tel, il ne rate aucune occasion pour rebondir et frapper fort et n'importe ou. C'est un fléau mondial qui veut mettre toute la planéte sous sa botte tout comme le nazisme qui ne tolérait aucune proéminence, aucune différence ni aucune liberté. C'est un intégrisme fondamentaliste qui aurait été plus envahisseur et plus dévastateur s'il avait les forces et la puissance de feu d'Hitler et de Mussolini. A mon avis, sa cause profonde réside, il est vrai, dans l'exclusion, la malvie et les frustrations de toutes sortes générées par les systémes politiques anachroniques, figés et décadents comme le nôtre, mais aussi elle provient essentiellement de l'endoctrinement intensif et du bourrage de crânes par des gourous planqués, irrésponsables et assassins. Ses effets sont apparemment trés calculés et ne cachent pas du tout ses arriéres-pensées comme le fait de s'attaquer ces jours-ci aux bâtiments et aux personnels de l'ONU à Hydra et à ceux du Conseil Constitutionnl de Ben Aknoun à Alger.

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Hammouche Zouggari

Cela dure depuis plus de 15 ans. Et on n'en voit pas la fin. J'ai écrit plusieurs poèmes sur la tragédie de la période noire et je crois qu'ils sont toujours d'actualité.

L?HORREUR AU QUOTIDIEN

Dans le sang, sont noyés nos espoirs,

Dissous nos projets d?avenir,

Engloutis, nos rêves de chaque soir,

Etouffés nos joies et nos rires.

Loin de se tarir, il est renouvelé sans cesse car,

Chaque jour, on ouvre des vannes humaines

Par des procédés aussi horribles que barbares,

Telles ces fréquentes décapitations à la chaîne.

Ou, telles ces explosions qui morcèlent les corps,

Libérant les membres, les têtes et les boyaux,

Les envoyant au ciel, avant que l'âme n?en sort

Puis, s?écrasent sur le sol en mille lambeaux.

Partagé entre l'horreur et la misère quotidiennes,

Le peuple n?en finit pas d?enterrer ses morts.

Les massacres se succèdent, les larmes reviennent

Dans des yeux qui sont humides encore.

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