Déclaration de Tanger des Amazighs d’Afrique du Nord

Déclaration de Tanger des Amazighs d’Afrique du Nord

Sept personnalités, par ailleurs figures de proue de la lutte pour la reconnaissance de l'identité amazighe, ont signé et rendu public une déclaration d'importance en ce sens qu'elle transfigure les frontières qui séparent actuellement les peuples de l'Afrique du Nord et traduit un nouvel espoir de renouveau pour les peuples amazighs.

Voici la déclaration :

Dans le sillage de «la conférence de Tanger» tenue dans la ville du même nom du 27 au 29 avril 1958 exprimant le souhait des trois grands partis politiques d’alors de mettre sur pied, au lendemain de l’indépendance de l’Algérie encore en guerre pour sa décolonisation, une Union fédérale nord-africaine des peuples, nous avions été indignés alors, par le détournement de l’idéal initial à travers la création en deux étapes (le 10 juin 1988 à Zéralda et le 17 février 1989 à Marrakech), d’une organisation au sigle (UMA) ségrégationniste envers les Amazighs et au contenu si flou qu’il permet tous les vetos bloquant le fonctionnement et la réalisation de l’unité de nos peuples et de nos territoires.

A titre d’illustration, il faut rappeler que depuis février 1994, il y a plus de 16 ans, aucun sommet des chefs d’Etat qui la composent n’a pu avoir lieu. L’opposition algérienne à la récupération par le Maroc du Sahara restitué par l’Espagne, et la fermeture par l’Algérie de sa frontière avec le Maroc, privent encore les peuples de l’Afrique du nord de réaliser leur aspiration fédérale et la mise en commun de leurs potentialités dans un monde qui, pourtant, ne permet qu’aux grands blocs de faire entendre leur voix.

Rassurés par la vivacité de cet idéal qui continue d’animer peuples et citoyens concernés ; encouragés par les récentes évolutions qui ont fait chuter les dictatures en Tunisie et en Egypte, permis un soulèvement sans précédent en Libye contre le régime dictatorial des Kadhafi ; soulagés par le statut de langue amazighe consacré par la nouvelle Constitution marocaine adoptée par référendum le 1er juillet 2011, ouvrant ainsi l’horizon des libertés, de la démocratie et des droits humains.

Nous, personnalités amazighes soussignées, venant des divers territoires de l’Afrique du Nord, réunies les 22 et 23 juillet 2011 à l’initiative de la Fondation Méditerranéenne de la culture amazighe de Tanger, adoptons la présente Déclaration de Tanger.

Nous sommes mobilisés et déterminés à œuvrer sans relâche à la réalisation de l’unité des peuples nord-africains, sans aucune ségrégation à l’encontre d’une identité, d’une langue, d’une culture ou d’une croyance. La reconnaissance officielle de l’amazighité en tant que langue, culture et identité en Afrique du Nord est une condition inéluctable pour la stabilité, le développement socioéconomique durable. L’Union des peuples nord-africains ne pourra se faire que sur une base fédérale équitable.

Cette union fédérale s’inscrira à la fois dans la perspective méditerranéenne et africaine et sera le partenaire des grandes puissances et des grands ensembles continentaux du monde dans le respect de ses intérêts et de ses valeurs fondatrices. Située à la charnière de l’Orient et de l’Occident, du Nord et du Sud, du monde musulman et du monde chrétien, elle aura à jouer un rôle majeur en faveur de la paix, de la prospérité, de la stabilité et de la fraternité entre les peuples du monde entier. La liberté, la démocratie et le respect des droits humains, politiques, identitaires, culturels et socio-économiques en seront les règles de fonctionnement.

Pour impulser un début de mise en œuvre de cette déclaration, nous exigeons dès maintenant des gouvernements nord-africains actuels. La réouverture immédiate des frontières entre l’Algérie et le Maroc. La reconnaissance du Conseil national de transition (CNT) comme seul représentant légitime du peuple libyen. La reconnaissance des droits linguistiques et culturels amazighes en Tunisie et en Égypte. La reconnaissance du Gouvernement Provisoire Kabyle, l’Anavad ;

La fin de la colonisation espagnole aux Canaries et aux enclaves de Ceuta et Melilla. Et nous revendiquons également du Conseil national de transition libyen, l’officialisation de l’identité et de la langue amazighe.

Vive l’Union des peuples nord-africains !

Tudrt i igdudn n afrika n içlmd!

Tanger, le 23 juillet 2011

Signataires :

- Ilyass El-Omari (Fondation méditerranéenne de la culture amazighe de Tanger)

- Ferhat Mehenni (Kabylie)

- Fethi Khelifa (Libye)

- Khadija Bensaidane (Tunisie)

- Amani Al Weshahy (Egypte)

- Thomas Quintana (Islas Canarias)

- Ahmed Arehmouch (Maroc)

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Commentaires (21) | Réagir ?

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MERCI

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Ali Mansouri

Voilà un opinion fort intéressante, dons l'Algérie devrait s'inspirer avant de se lancer dans une aventure "l'UMA" qui pourrait nous être fatale, l'Algérie a tout à perdre d'une hypothétique union d'une UMA de dictateurs et de trafiquants de drogue, une UMA qui serait contrôlée par les puissances étrangères.

L'Union européenne est loin d'être une fusion des peuples, ni même des Etats. C'est une union autour de certains intérêts, notamment économiques. La tendance est plutot vers l'autonomie et les indépendance des peuples : Quebec, Pays basque, Catalogne, Flandre, Sud Soudan, Palestine, Ecosse, Irlande du Nord; et la liste est loin d'être exhaustive. Ceci dit, ces mêmes peuples qui se séparent pour marquer leurs différences et leurs identités n'excluent pas la creation d'ensemble autour de points d'intérêt commun, pas pour se fondre dans des appareils artificiels nécessairement totalitaires. C'est d'ailleurs toute l'histoire de l'Europe moderne et contemporaine. Ils le font d'une façon souveraine après que chaque peuple a marqué son territoire et ses repères. Jamais de la façon dont est bricolée l'Algérie par les Français et maintenue telles quelle par le clan de Oujda.

La même Europe n'aurait jamais connu la paix si elle était unie, de force évidemment, autour des projets napoléoniens, hitlériens, staliniens ou autres, superficiels en d'autres mots.. Alors, trêve d'amalgames pour avancer sur l'essentiel. Cessons de faire echo aux slogans creux de la propagande officielle.

Akli Ath Larat

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