« Bouteflikages », une chronique du Canard enchaîné sur Les geôles d'Alger

L’hebdomadaire satirique a consacré un grand article, cette semaine, au livre de Mohamed Benchicou.

Il y a deux livres entrelacés dans l’ouvrage de Mohamed Benchicou, ex-directeur du défunt Matin d’Alger, condamné à deux ans de cabane – qu’il a purgés de 2004 à 2006 – pour un extravagant motif (la sortie du territoire national de bons d’épargne inutilisables hors de l’Algérie) : la relation de son embastillement dans des conditions qui ont peu à voir avec en effet avec le modèle pénitentiaire scandinave ; le récit de son combat singulier avec sa bête noire, le président Abdelaziz Bouteflika qui, comme on le sait, a de la visite ces jours-ci.
Dans l’attente, bien sûr, de la grande Union régionale que nous concocte notre président à nous et son conseiller spécial Henri Guaino, le métier de journaliste n’expose pas tout à fait aux mêmes risques d’une rive à l’autre de la Méditerranée. Là-bas pleuvent les amendes colossales et, à l’occasion, des condamnations à de la prison ferme pour de simples délits de presse. Il ne suffisait pas que de plusieurs journalistes du Matin aient été assassinés par des islamistes. Le régime de Bouteflika a aussi mené au quotidien, « le premier quotidien d’opposition » une guerre sans merci. Jusqu’à l’incarcération fallacieuse donc de son directeur. Jusqu’au dépôt de bilan du journal là encore pour le plus insignifiant des griefs : une petite facture de retard à l’imprimerie nationale (à peine 1% du total des dettes exigibles par cet établissement). Après tout, relève ironiquement Benchicou, en 1955 le pouvoir colonial ne procéda pas de manière très différente pour suspendre le courageux Alger républicain, où, en son temps, alors simple et intrépide reporter, Albert Camus fit ses premières armes.
Boute flika se vengeait : du pamplet (imprimé en loucedé en Algérie) que lui avait consacré Benchicou (« Une imposture algérienne »), des prises de position de celui-ci, supporter à la dernière élection, présidentielle du candidat du FLN, parti qui eut aussi, il est vrai, son grave déficit démocratique ; des révélations incessantes du matin enfin. A commencer, pour faire dans le cocasse, par cette histoire assez révélatrice d’un régime dynamique ; en 2003 , en quête d’un prête-nom pour diriger Sonatrach, le complexe prétrolier d’Etat toujours prodigue en enveloppes variées, le pouvoir désigna à sa tête un cancéreux quasiment en phase terminale. Celui-ci disparu au bout de trois mois, il fut bien temps alors de nommer un séide avoué.
On n’en oublie pas pour autant les prisons. Au-delà de quelques minutieux et sensibles portraits d’incarcérés, Benchicou, qui connaît le sujet, y va là encore de plusieurs fortes révélations : « Sur les 126 pénitenciers d’Algérie, 96 datent de l’époque coloniale dont 59 du XIXè siècle. » Alors que les prisons du pays sont faites pour accueillir 26.000 hommes , ils ont aujoursd’hui 60 000 à s’y entasser (…). En 2005, l’espace réservé à un détenu dans une prison algérienne, était de 1,82 m2 contre 12,2 m2 pour la moyenne en Europe ». Pas sûr que, eu égard à nos prouesses carcérales tricolores, Sarko soit le plus à même de conseiller Bouteflika sur une réforme pénitentiaire que ce dernier a tout de même fini par engager. Sans qu’il faille voir pour autant le signe d’une grande rupture : début novembre « Les geôles d’Alger » ont été interdites du Salon international du livre d’Alger. Bref quand Benchicou n’est pas retenu, il est exclu.

P.L.

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Commentaires (4) | Réagir ?

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Khelaf hellal

En faisant l'autopsie de l'imposture Algérienne, on aboutit effectivement à tous ces Bouteflikages que vous avez mis en exergue. On se demande si, quelque part ces dérapages de vieillesse ne sont pas venus se rajouter aux erreurs de jeunesse. Un Président présenté comme "le moins mauvais des candidats" et qui succombe aux solutions de facilités en faisant la part belle à l'islamisme et qui étouffe toute vélléité d'aspiration aux libertés démocratiques, à la modernité et au progrés dans notre pays. Il déclare solennellement que la légitimité révolutionnaire est finie mais il s'accroche toujours à ce parti-Etat : le FLN post-indépendance dont personne n'en voulait depuis le 5 Octobre 1988, ni Boudiaf, ni Zeroual pour ressuciter un système politique exécrable et dépassé.

L'autopsie de l'imposture n'aura pas fini de nous surprendre, on peut relever encore beaucoup d'autres abérrations et de faux-fuyants notamment en ce qui concerne la corruption et la bureaucratie qui gangrènent le pays, la stagnation économique et sociale, le pouvoir occulte et contraignant de la religion etc...

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Mouhdhouyarvi

Ouretsrouyara, matebkich ya hanouna !!

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