MDS : "Le changement doit consacrer la victoire sur le terrorisme intégriste"
Notre pays passe par un moment particulier et crucial. Après une longue période marquée par des accumulations lentes, des crises brutales telles que les événements d'octobre 88, et, hélas, aussi plus d'une décennie d'affrontement sanglant imposé par le terrorisme intégriste, aujourd'hui nous nous trouvons à la croisée des chemins. La contestation populaire qui n'épargne aucune sphère d'activité ni aucune couche sociale qui se développe et prend de l'ampleur, exprime avec force l'exigence d'un changement démocratique moderne.
Le monde arabe, espace géographique, culturel et civilisationel auquel nous appartenons, connait lui aussi des moments décisifs caractérisés par un soulèvement populaire généralisée d'essence démocratique, contre les pratiques autoritaires et le despotisme des pouvoirs en place.
Si le changement qualitatif de la nature des Etats et leur mise adéquation avec les exigences du temps est un impératif historique objectif, les voies et moyens, violents ou pacifiques, dépendent, forcement, des acteurs politiques et sociaux actifs sur la scène. Aussi le sens de responsabilité, l'intelligence, le courage et la fermeté dans le respect des valeurs républicaines deviennent des qualités déterminantes.
C'est dans ce contexte particulier que les institutions de l'Etat, présidence, assemblée nationale et ministère de l'intérieur, organisent des échanges autour de réformes comme points d'appui pour le changement. La focalisation du débat autour de la question du suffrage montre à quel point ce volet des réformes constitue une préoccupation majeure du pouvoir. Cet intérêt constitue en même temps un aveu d'échec du processus électoral engagé depuis l'avènement du pluralisme et même depuis l’indépendance. Les élections n'ont jamais été démocratiques et transparentes. Y compris en 1991, lorsque le FIS, partis d'essence antidémocratique et anticonstitutionnel, agrée par le pouvoir et imposé à la société, avait emporté les législatives par les pressions et menaces, après avoir mis la main sur les communes qu'il a mis totalement à son service au mépris totale des lois de la république et du service public.
Le suffrage est une catégorie de la modernité, il est indissociable des autres valeurs universels de progrès, de justice et d’égalité arrachées de haute lutte par les citoyens. Dans ce sens, il doit exprimer la volonté et la souveraineté populaire et être un espace de consécration de la citoyenneté. Lorsque les élections sont manipulées pour consacrer l’hégémonie d’un groupe, ou d’une idéologie totalitaire antidémocratique, et aboutissent à la négation de la citoyenneté et à la régression généralisée, elles perdent leur essence moderne et leur légitimité. En ce sens, le suffrage ne peut pas être dissocié de l’avenir démocratique de l'Algérie.
Aujourd’hui, notre pays traverse une étape de transition historique de passage vers l’Etat républicain démocratique moderne. Ce changement est devenu inéluctable. Il doit consacrer la victoire de notre peuple sur le terrorisme intégriste et prémunir notre pays contre le spectre de la régression totalitaire et théocratique mais aussi pour une insertion plus juste dans le processus de mondialisation. Notre peuple, vacciné par l’expérience douloureuse qu’il a vécu, n’accepte pas que le pays soit de nouveau soumis à d’autres épreuves tragiques, il refuse de façon catégorique la déliquescence et la régression des institutions de l'Etat en raison du despotisme et de l'aveuglement du pouvoir.
Au-delà de la révision du code électoral, la question qui interpelle les institutions de l’Etat est de la volonté réelle de réhabiliter le suffrage universel. Le vote a été tellement galvaudé que les citoyens sont convaincus de son inutilité. Ils votent sous la pression administrative ou s’abstiennent.
La révision de ce code doit correspondre à cette volonté pour être à la hauteur des exigences du changement démocratique, historique et impératif, elle doit répondre à des conditions incontournables pour être un levier permettant de rétablir la confiance perdue entre les citoyens et l’Etat et contribuer à consacrer la citoyenneté; cette révision ne doit en aucun cas être l’objet de tractations ou le résultat d’un rapport de force interne au système visant, comme dit l'adage populaire, "ni à faire pleurer la chèvre, ni a affamer le loup". Elle doit être le fruit du plus large consensus autour de l’approfondissement de la démocratie, et permettre aux citoyens de sentir qu’ils pèsent réellement dans les choix décisifs pour leur avenir et celui du pays.
La déliquescence des institutions de l’Etat, et l’implication de hauts responsables dans les scandales de corruption sont révélateurs de l’opacité totale qui caractérise la gestion des affaires publiques. Une gestion qui exclue les représentants des citoyens, en porte à faux avec les professions de foi des autorités sur l’organisation, le déroulement et les résultats des consultations électorales. Une gestion masquée politiquement par des partis/Etat coupés de la société, et qui bénéficient de privilèges et moyens colossaux, des deniers puisés dans le trésor public, et des médias lourds qui sont à leur service à longueur d’année.
Pour que ce consensus puisse se réaliser, il doit être précédé par des mesures réelles visant à démocratiser l'accès aux moyens d'expression et de rencontres citoyennes, de stopper les arrestations arbitraires des militants qui distribuent les déclarations de leur partis, pourtant agréés, et les atteintes répétées aux droits et libertés. Ce consensus se créera et se maintiendra au fur et à mesure que la classe politique sera en phase avec la conscience des citoyens de leurs intérêts à moyen et long terme. En d’autres termes, les différentes catégories sociales doivent pouvoir se reconnaitre dans une représentation politique et symbolique à la hauteur de leurs attentes et aspirations. Le sous développement politique de la société n'est pas souhaitable pour le pays.
Il est de la première importance de réhabiliter la société civile en l’émancipant et en la libérant de la tutelle, et du lien qui l’attache aux relais du pouvoir. Les pratiques malsaines basées sur l’allégeance plutôt que sur l’adhésion à un programme politique ont vidé le concept de société civile de son contenu véritable, celui d’un contrepouvoir permanent, pour être remplacé par des organisations dociles au service de l’exécutif.
Par ailleurs, aucun code électoral n'aura de légitimité ni de portée historique si dans ses objectifs sont inscrits le maintient au pouvoir de lourds appareils dont le rôle est de reproduire le statut quo et d'entretenir le clientélisme d'un coté et de l'autre d'empêcher la représentation et l'émergence de forces politiques nouvelles, saines et de progrès sous couvert d'éviter l'éparpillement de la représentativité et la complexité de la gestion des institutions.
Battis sur un socle républicain des valeurs universelles des droits de l'Homme et d'une définition plus juste de l'algérianité ce consensus de société peut constituer la principale garantie pour éviter au pays de nouvelles dérives, et assurer la pérennité de l'Etat. Il faudrait aussi redéfinir les prérogatives et le rôle de l’ANP comme affirmation de sa fidélité aux valeurs révolutionnaires de Novembre; au-delà de sa mission de défense de l’intégrité territoriale et de la souveraineté nationale, elle est appelée à se transformer dans le même mouvement que l'Etat et ses institutions, à affirmer son caractère transpartisan pour être en phase avec les mutations en cours et redéfinir son rôle dans la préservation du caractère républicain, démocratique moderne de l’Etat.
En conclusion, même si l’étude fine du code électoral a son importance, il est impératif de situer les enjeux stratégiques et les objectifs qui sont poursuivis à travers les transformations à apporter à ce texte. Il est tout aussi important que des institutions indépendantes puissent veiller à la sincérité et à la transparence des scrutins et que l'administration algérienne ne soit plus soumise aux pouvoirs politiques mais uniquement à la loi en veillant à sa neutralité, que les moyens de recours soit aussi pris en charge par une justice indépendante et compétente sans laquelle tout processus électoral ne serrait que mascarade.
Commentaires (3) | Réagir ?
Désolé mais je trouve l'intervention des parties politiques en déphasage par rapport aux réalités du pays. On dirait qu'ils parlent sans rien dire. Moi je propose ça:
http://dz20. unblog. fr/2011/06/02/problematique-algerie-kabylie-lalternative-de-la-deuxieme-republique/
Pour combattre la maladie il faut désigner le vrai coupable (source de maladie ou l'agent pathogène)
Entièrement d'accord avec vous, M. Belkacemi. Voilà un texte totalement vide de sens et déconnecté de la réalité. Le MDS, nouvelle version oublie de parler des maux qui minent notre pays pour ne s'arrêter que sur le code électoral. Etrange pour un parti qui a toujours prôné de nobles idéaux telles que la séparation du politique et du religieux, la lutte contre la maffia politico-financière, l'abrogation du code de la famille et j'en passe. Dans ce long communiqué, pas un mot sur le projet de société, juste un discours creux et sans consistance. On est bien loin des analyses et des propositions de l'ancien MDS dont la pertinence et l'avant-gardisme se vérifient toujours. Avez-vous remarqué que la plupart des analyses produites par feu Hachemi Chérif ' (jugées à l'époque extrémistes par toute le personnel politique) sont reprises, la bouche en coeur, par ceux-là même qui ont étouffé dans l'oeuf toute avancée démocratique quand ils étaient au pouvoir (Nezzar, Sifi; Ghozali, etc). Et voilà que maintenant un ersatz de Mds se met de la partie pour accéder à la rente. Pauvre pays. Amicalement