Libye : l'Otan assure ne pas avoir visé Kadhafi
Les combats continuent à l'est et à l'ouest, plongeant le pays dans une situation humanitaire inquiétante.
L'Otan a assuré mardi ne pas viser le dirigeant contesté Muammar Kadhafi au lendemain de frappes particulièrement violentes sur Tripoli, tandis que les rebelles ont subi des pertes sur le front Est, près de trois mois après le début du conflit en Libye. Alors qu'aucune issue ne semble se profiler pour cette guerre qui a fait des milliers de morts selon le procureur de la Cour pénale internationale, l'ONU a lancé un cri d'alarme sur la situation humanitaire avec l'"effondrement des infrastructures" et les pénuries "généralisées" de toutes sortes en Libye.
"L'Otan ne vise pas des individus", a affirmé le général italien Claudio Gabellini, sans pour autant pouvoir dire si M. Kadhafi était encore vivant après les frappes intenses nocturnes - huit en trois heures - contre la capitale libyenne. "Toutes les cibles de l'Otan sont des cibles militaires, ce qui veut dire que les cibles que nous avons touchées, comme la nuit dernière à Tripoli, sont des bunkers de commandement et de contrôle", a-t-il ajouté au QG de l'Otan à Naples (Italie). Selon lui, les opérations internationales dont l'Otan a pris le commandement fin mars ont uniquement pour but de démanteler l'appareil militaire utilisé contre les civils par le régime de Muammar Kadhafi, qui refuse de quitter le pouvoir qu'il accapare depuis plus de 40 ans.
Une lutte sur plusieurs fronts
Dans l'Est, le front avance et recule depuis plusieurs semaines entre le carrefour routier d'Ajdabiya, aux mains des rebelles, à 160 km au sud de leur "capitale" Benghazi, et le site pétrolier de Brega, tenu par les pro-Kadhafi, 80 km plus à l'ouest. Depuis deux semaines, les combats se sont atténués dans cette zone régulièrement survolée par les avions de l'Otan, qui annonce souvent dans ses bilans quotidiens avoir touché des cibles près de Brega. Lundi, de violents échanges de tirs ont fait six morts et dix blessés parmi les rebelles à mi-chemin entre Ajdabiya et Brega, selon le Dr Ahmed Al-Ignachi, directeur du service des ambulances sur la ligne de front, qui a aussi évoqué la possibilité "de lourdes pertes du côté pro-Kadhafi". La veille, un petit groupe pro-Kadhafi avait fait une incursion jusqu'à 6 km d'Ajdabiya et réussi à tirer des roquettes, faisant un mort et deux blessés rebelles, selon lui.
Dans l'Ouest, les rebelles ont en revanche réussi à desserrer l'étau sur Misrata, ville située à 200 km à l'est de Tripoli et assiégée par les forces pro-Kadhafi depuis plus de deux mois, en avançant ces derniers jours d'une quinzaine de kilomètres à l'ouest, selon un correspondant de l'Agence France-Presse. Ils ont érigé des barricades et se sont rapprochés de Zliten, une ville de 200 000 habitants à quelque 150 km de Tripoli. Un ancien colonel de l'armée, Haj Mohammad, chargé des opérations rebelles sur le front, avait assuré que cette avancée pouvait se poursuivre, à condition que les bombardements de l'Otan soient efficaces.
Une situation humanitaire préoccupante
Mais entre-temps, la situation humanitaire se dégrade dans le pays, où la révolte contre le régime Kadhafi lancée le 15 février s'est transformée en guerre civile. "Le conflit, l'effondrement des infrastructures du pays et la pénurie d'argent et d'essence causent de sérieux problèmes à la population", a expliqué Valerie Amos, secrétaire générale adjointe de l'ONU chargée des Affaires humanitaires, évoquant des "pénuries généralisées".
Selon elle, près de 750 000 personnes, essentiellement des travailleurs étrangers, ont fui les violences depuis février. En outre, 5 000 personnes sont bloquées aux frontières avec l'Égypte, la Tunisie et le Niger, et 58 000 autres survivent dans des camps de fortune dans l'Est libyen. L'Égypte a levé l'obligation de visa imposée il y a deux jours aux Libyens, une mesure qui avait semé la panique parmi les ressortissants cherchant à fuir leur pays.
Le Haut Commissariat de l'ONU pour les réfugiés a de son côté demandé à tous les navires croisant en Méditerranée de considérer tous les bateaux quittant la Libye pour l'Europe comme "susceptibles d'avoir besoin d'aide", après plusieurs naufrages de bateaux de réfugiés fuyant ce pays. Une porte-parole du HCR, Melissa Fleming, a ainsi confirmé qu'un bateau transportant 600 personnes, pour la plupart originaires d'Afrique subsaharienne, avait sombré vendredi au large de Tripoli. Selon le HCR, 12 360 personnes fuyant la Libye sont arrivées par mer ces derniers mois en Italie et à Malte. L'Italie a dit s'attendre à un nouvel afflux de 50 000 réfugiés de Libye, et demandé à ce qu'ils soient pris en charge par l'Union européenne. "L'Europe a pour l'instant accueilli moins de 2 % de ceux fuyant la Libye", a relevé Mme Flemming.
AFP
Commentaires (0) | Réagir ?