Forces en présence et agent central de changement (II)
2. Classes dominées - exploitées - aliénées
Elles se distinguent en deux catégories.
La classe moyenne. Auparavant, on la désignait par le terme petite-bourgeoisie. Elle comprend trois niveaux : supérieur, moyen, inférieur. Ils sont déterminés par la grandeur du gain financier obtenu et l’importance du poste hiérarchique assumé dans la gestion sociale.
Pour avoir une idée concrète, citons de brefs exemples. Font partie du niveau supérieur les "cadres" de la nation, dirigeants des appareils institutionnels administratifs, idéologiques et répressifs. Au niveau moyen, se situent les activités nécessitant une instruction de type universitaire doctoral, tels chirurgiens, experts économiques ou dans d’autres secteurs sociaux, certains écrivains, artistes et journalistes, formant l’"élite" plus ou moins officielle. Au niveau inférieur se trouvent les enseignants d’école primaire et secondaire, les employés administratifs, les techniciens spécialisés, etc.
Vient enfin la classe majoritaire : celles et ceux qui, par manque de "capital" en terme d’instruction, vendent leurs muscles ou/et leur cerveau en échange d’un salaire qui a une particularité, par rapport à celui des autres classes sociales. Il est accordé uniquement pour leur permettre de survivre. Cela est dû à la fameuse "loi" capitaliste : la maximisation du profit de l’employeur (qu’il soit étatique ou privé, mafieux ou classique), donc la minimisation de la rétribution de l’employé.
À présent que nous possédons une vision schématique générale de l’existence des classes sociales, examinons leurs relations.
II. Luttes des classes
1. Antagonisme principal
Suite à ce qui vient d’être exposé, comme l’indique le schéma, il s’ensuit que les deux forces en présence fondamentales sont, d’une part, tout en haut de l’échelle sociale, la caste d’acheteurs, et, tout en bas de la même échelle, la classe de vendeurs de travail manuel et/ou intellectuel.
Auparavant, nous avons dit comment se manifeste l’antagonisme et donc la lutte entre ces deux classes : la dominatrice vise au maximum de profit, soustrait par l’intermédiaire du travail de ses salariés ; la classe constituée par ces derniers se préoccupe de subvenir à ses besoins matériels minimums indispensables, ceux de la survie. Là sont donc les deux forces antagonistes principales. Elles existent, animent, agitent ou apaisent la société algérienne dans son ensemble (comme, par ailleurs, toute société humaine contemporaine, depuis la création du salariat). Dans ce processus, tout, absolument tout a comme enjeu l’argent.
D’une part, les castes dominantes en veulent le plus possible, le plus longtemps possible, le plus rapidement possible, quel que soit le moyen, légal de préférence, autrement mafieux jusqu’au recours à la violence, institutionnelle ou illégale. Ceci pour les couches bourgeoises étatique, privée mafieuse ou compradore. La couche classique écarte l’illégal et la violence. Ce qu’il faut souligner, et ne jamais perdre de vue, réside dans deux faits.
Le premier. La richesse des couches dominantes (à l’exclusion de la bourgeoisie compradore) provient de l’exploitation de la classe laborieuse. Elle seule produit de la richesse, par son travail. Il n’est pas nécessaire d’être un "révolutionnaire" ni un "gauchiste" pour le constater. Déjà, en 1827, un marquis écrivit : "Mes amis, vous êtes des gens voués au travail. Votre destin est de travailler, en moyenne, seize heures par jour. De ces seize heures, la moitié, ou à peu près, est mise de côté pour former le patrimoine de "l’élite" de la société, divisée en propriétaires, capitalistes, prêtres, fonctionnaires publics, rentiers, pensionnaires, rois ou ministres, académiciens." (cité par Jean-Pierre Voyer, Une Enquête sur la nature et les causes de la misère des gens, 1976.)
Deuxième fait. Outre à l’exploitation de la force laborieuse, la caste dominante étatique se procure de la richesse par con contrôle exclusif des ressources naturelles de la nation, au détriment du peuple.
2. Antagonismes secondaires
Nous arrivons à ce qui découle de l’antagonisme principal, à savoir les antagonismes secondaires. Ils seront exposés par ordre d’importante décroissante. Les antagonismes secondaires de première importance se situent d’abord au sein même des castes dominatrices. En voici la chaîne de domination de la couche la plus hégémonique aux autres : Bourgeoisie étatique - bourgeoisie privée mafieuse - bourgeoisie privée compradore - bourgeoisie privé classique.
La bourgeoisie étatique et celle privée ont des intérêts. D’une part, ils sont complémentaires. Les deux tirent profit de l’exploitation de la classe des travailleurs. En outre, la bourgeoisie étatique d’un côté, et, de l’autre, deux secteurs de la bourgeoisie privée ont certains intérêts communs. La règle de fonctionnement est le "retour d’ascenseur" : je te donne ceci, et, en échange, tu me donnes cela.
La bourgeoisie mafieuse recourt au capital étatique (notamment prêts bancaires et acquisitions de marchés, dans des conditions défiant toute logique de concurrence normale), pour faire du profit. En retour, par ses trafics, ce capital mafieux permet aux membres de la caste étatique de s’enrichir davantage, selon des procédés difficiles, mais pas impossibles, à déceler.
En outre, la bourgeoise privée mafieuse (il reste à savoir si c’est également le cas pour la bourgeoisie privée classique) trouve son intérêt dans la privatisation du secteur étatique. Or, la bourgeoisie étatique s’y oppose. Sa motivation n’est pas, comme le croient les naïfs et le font croire les propagandistes, pour le bien du "pays", mais parce que sans main-mise sur l’État, permettant le contrôle sur les ressources premières, la bourgeoisie étatique n’existe pas.
Cependant, la privatisation d’entreprises publiques peut être consentie par la caste étatique. Cela se réalise quand des membres de la caste étatique trouvent leur intérêt à devenir des capitalistes privés. Ils s’arrangent, alors, pour vendre les entreprises publiques à un prix dérisoire. Pour y arriver, le moyen consiste à créer, par des "règlements" étatiques, des obstacles dans l’activité productrice de ces entreprises, les rendant provisoirement inaptes à l’exercice de leur fonction, déficientes en matière de productivité. Et si des membres de syndicats autonomes dénoncent cette manipulation, eh bien licenciements ou arrestation, en inventant un motif apparemment plausible. Le plus simple est la « divulgation de données réservées ».
Concernant la convergence d’intérêts entre la bourgeoisie étatique et celle compradore, elle sera exposée ultérieurement. D’autre part, les intérêts de la bourgeoisie étatique et de celle privée sont opposés : chaque caste lutte pour l’hégémonie sur les autres, pour obtenir le plus de profit financier.
La bourgeoisie mafieuse voudrait dominer celle étatique ; à son tour, cette dernière voudrait dominer la première, éventuellement en employant les méthodes de la bourgeoisie mafieuse. Toutes ces deux bourgeoisies, étatique et mafieuse, empêchent la bourgeoisie capitaliste classique (Cevital) de se développer. En effet, le développement de cette dernière suppose l’affaiblissement des deux autres.
Nous arrivons aux antagonismes secondaires de seconde importance. Ils existent entre les castes dominatrices, quelles que soient la caractéristique et la classe moyenne, quel que soit le niveau. D’une part, l’intérêt de ces deux catégories sociales sont complémentaires. Toutes les deux visent à la gestion de la classe inférieure, celle des travailleurs, pour en tirer, chacun pour sa part, un profit. D’autre part, les intérêts des castes dominatrices et de la classe moyenne s’opposent. La première tient à sa position de dominatrice-exploiteuse exclusive, limitant la seconde au seul rôle d’auxiliaire. Au contraire, les membres de la seconde ambitionnent, chacun selon le niveau occupé, de bénéficier le plus possible d’une partie de cette domination-exploitation, ce qui irait au détriment de la classe dominatrice-exploiteuse.
Enfin, voici les antagonismes secondaires de troisième importance. Malheureusement, au sein de la classe laborieuse existent également des antagonismes d’intérêts.
Le premier se manifeste entre travailleurs manuels des villes et ceux des campagnes. Les citadins, à cause de leur bas salaire, veulent acheter le moins cher possible les produits agricoles des paysans. Ces derniers, pour améliorer leur situation économique très précaire, souhaitent, au contraire, vendre le produit de leur travail au prix le plus avantageux.
Le second antagonisme se trouve entre travailleurs et chômeurs. Les premiers voient dans les seconds une menace de perdre leur emploi ; les seconds considèrent les premiers comme cause de leur impossibilité d’accéder à un travail. S’ajoutent les travailleurs immigrés clandestins. Pour une somme misérable, dans les conditions les plus inhumaines, ils acceptent tout travail offert. Ainsi, ils concurrencent aussi bien les travailleurs que les chômeurs autochtones.
III. Formes de la lutte des classes
Déjà, dans la partie précédente, ont été exposés certains aspects de cette lutte des classes, entre elles et au sein d’elles-mêmes.
Éclaircissons davantage ces manifestations.
Comment la bourgeoisie étatique assure son hégémonie ? Comme le schéma le montre, elle dispose de trois types d’instruments institutionnels : 1) appareil administratif pour la gestion ordinaire ; 2) appareils idéologiques (instruction, religion, mass-medias, « culture » folklorique) pour obtenir le consensus des citoyens ; 3) organismes répressifs (lois, police, service secret, armée) pour juguler toute contestation, y compris légitime et légale. Tous les faits qui surviennent au sein de l’un ou l’autre de ces organismes est indicatif du déroulement de la lutte, soit au sein même des classes dominantes respectives, soit entre elles et les deux classe subalternes, la moyenne ou/et la laborieuse. Prenons le cas survenu avec Abdelmajid Tebboune. Comment les « forces en présence » se sont manifestées ?
Examinons la partie hégémonique.
Pour le moment, la bourgeoisie étatique détient le maximum de pouvoir social. Seulement, elle y parvient en devant recourir à la complicité avec la bourgeoise privée mafieuse et compradore. Cette alliance est au détriment de la bourgeoisie privée classique (Cevital).
Normal : cette dernière n’a pas besoin de complicité avec la bourgeoisie étatique pour concrétiser ses activités. Au contraire, la bourgeoisie mafieuse et celle compradore, elles, ne disposent pas de capital propre ; elles le puisent dans les prêts bancaires accordés par… la bourgeoisie étatique. Laquelle "gagne" les élections grâce au soutien financier de la bourgeoisie mafieuse et compradore. Cela a déjà été signalé : le principe du retour d’ascenseur : je te donne à la condition que tu me donnes.
L’épisode Abdelmajid Tebboune semble une preuve de cette situation. Il déclarait vouloir séparer la "politique" de l’"argent". Et certains y ont cru, l’ont espéré ! Ils ont oublié qu’auparavant, un autre a voulu, celui-là réellement, opérer cette séparation, Mohamed Boudiaf. On connaît l’épilogue.
Encore plus avant, à l’étranger cette fois-ci, il semble (là, aussi, comme en Algérie, impossible de connaître la vérité) que c’est parce qu’ils s’étaient trop intéressés à l’aspect mafieux de l’économie états-unienne qu’un président, puis un ministre de la justice furent, eux aussi, assassinés, mais de manière plus "intelligente", plus "civilisée", plus "démocratique" : l’un et l’autre par un soi-disant individu "isolé" : John Kennedy puis son frère Robert. Pour Mohamed Boudiaf, même scénario. Où donc, dans quel pays, encore plus en ce temps de capitalisme mondial sauvage triomphant, existe cette séparation entre argent et politique ? Notamment depuis la dénonciation par le président Eisenhower, dans son fameux discours d’adieu à la nation, de la menace que faisait peser sur les institutions politiques la présence du "complexe militaro-industriel", l’argent et la politique ont établi un mariage de (dé)raison : capitalistes et politiciens se conditionnent les uns les autres, comme le proxénète et la « fille » qu’il "protège".
Comment serait-il possible de séparer la « politique » de l’ « argent » en Algérie quand les pays prétendument démocratiques avancés (qui le sont certainement plus que l’Algérie) mélangent ces deux domaines d’activités ? La différence avec l’Algérie (et d’autres pays de la « périphérie » de la planète) réside uniquement dans la manière : les premiers emploient des procédures respectant les apparences institutionnelles, tandis qu’en Algérie, elles le sont nettement moins. À cause d’une arriération qui n’est pas seulement économique, mais culturelle, donc politique, par conséquent institutionnelle. Et d’où provient cette arriération sinon d’un stade historique arriéré de la structuration des classes et de la lutte entre elles ?
Le système capitaliste est caractérisé par le vol (argent tiré de l’exploitation des salariés) légalisé (procédé économique rendu institutionnel par la politique, autrement dit par la caste gérant l’État). Voilà le fond, la base, l’essentiel de la réalité. Et, selon le degré de développement (économico-culturel) d’une société, ce couple d’amants infernaux, « argent » et « politique », se présente d’une manière « civile », consensuelle et productive, ou mafieuse, autoritaire et parasitaire.
De là découlent certains comportements. Ils ne devraient pas surprendre si l’on voit clairement l’essentiel sans le confondre avec ses conséquences, par ignorance ou intention manipulatrice.
Qu’en est-il de la bourgeoisie compradore ?
Son activité se caractérise par l’importation. Cela implique un pays incapable de produire lui-même les marchandises importées ; et, si certains ont la velléité de produire, ce qui est le cas de la bourgeoisie privée classique, les éléments compradore s’y opposent, de toutes les manières, « légales » ou mafieuses. Voir les blocages subis par Cevital dans les ports.
Ainsi, plus cette activité d’importation est consistante, moins l’activité économique du pays pourra se développer. Par contre, les pratiquants de l’import s’enrichiront, de même que la bourgeoisie étatique. Parce que c’est cette dernière qui établit les « lois » et « règlements » de l’activité d’importation.
Comme avec la bourgeoisie privée mafieuse, avec la bourgeoisie compradore, aussi, il y a un retour en faveur de membres de la caste étatique : en terme de gain financier et de transfert de devises à l’étranger.
Dans ce secteur social, on devine que cette bourgeoisie compradore et sa complice étatique ont intérêt à établir les liens les plus étroits avec les capitalistes étrangers, producteurs des marchandises à importer.
Quelles sont les victimes ?
Voyons celles de l’activité privée mafieuse.
D’une part, le capital privé classique. Respectant le jeu du marché, il n’a pas besoin de s’acoquiner avec la bourgeoisie étatique. Cela entraîne cette dernière à l’empêcher de se développer, au profit du capital mafieux, où elle trouve un retour financier.
D’autre part, les consommateurs. Le capital mafieux surfacture ou encaisse un argent public (c’est-à-dire de la communauté des citoyens) comme avances pour des travaux non réalisés, tout cela avec la complicité du capital étatique. Et les deux compères y trouvent leur profit. Ainsi s’explique l’enrichissement anormal de certaines familles algériennes.
Et les victimes de l’activité compradore ?
D’une part, le capital privé classique, empêché de produire les marchandises absentes dans le pays, afin de les importer de l’étranger. D’autre part, les consommateurs : un téléphone, une télévision, un frigidaire ou un véhicule, produits dans le pays coûteraient, logiquement moins chers qu’importés.
En passant, notons ce qu’affirment certains : cette couche parasitaire compradore correspondrait généralement à l’idéologie intégriste islamiste. En paroles, elle hait l’étranger et ses « valeurs », mais chérit le commerce avec lui et donc l’argent qui en découle. Nous en sommes toujours à l’adoration du Veau d’Or.
Une autre caractéristique de cette couche compradore est encore plus préoccupante. Son activité commerciale l’oblige à créer, maintenir et développer des liens avec les entreprises étrangères productrices de ces biens. Voilà la fenêtre par laquelle les puissances néo-coloniales et impérialistes entrent dans le pays. Et comment, par l’intermédiaire de la couche compradore, elles tirent leur profit au détriment du développement économique du pays et des consommateurs algériens.
Et voilà pourquoi ces mêmes puissances néo-coloniales et impérialistes prêtent main forte, policière et militaire, afin que ce système socio-économique perdure. Là, aussi, l’idéologie nationaliste (déclarant son amour pour le pays) et celle intégriste islamiste (proclamant sa haine de l’Occident) s’accommodent parfaitement de ces ingérences étrangères occidentales. Elles garantissent l’existence du système où capitalisme étatique et capitalismes privés (mafieux et compradore) trouvent leur profit, au détriment de la nation (empêcher la production) et du peuple (prix élevés des marchandises).
Voilà ce qui rend si malaisée l’activité du capital privé classique en Algérie. Voilà ce qui explique, aussi, que les citoyens honnêtes, notamment dotés de savoir et désirant réellement le développement de la nation (que ce soit au bénéfice du capital privé classique ou de la classe laborieuse) n’ont pas leur place dans ce pays, qu’ils sont écartés ou contraints à l’exil.
Venons à la classe moyenne. Sa fonction est ambiguë.
Soit la caste dominante lui concède des avantages suffisants, alors la classe moyenne manifeste son consensus, et fonctionne comme courroie de transmission des décisions de la caste dominatrice, pour gérer la classe au-dessous, la laborieuse. Peu importe la forme du régime : dictature militaire ou démocratie plus ou moins limitée. En l’occurrence, dans l’ « usine » qu’est le pays, la classe moyenne (chaque niveau ayant un rôle spécifique) a le rôle de contremaître, de garde-chiourme de la caste patronale pour gérer la classe laborieuse.
Soit, en cas d’intérêt lésé par la classe dominatrice, la classe moyenne devient un agent contestataire. Cela l’amène à manipuler la même classe inférieure, la laborieuse, mais cette fois-ci pour soutenir les intérêts de la classe moyenne, présentés comme ceux de la "nation", du "peuple" entier.
C’est ainsi que fonctionne le fameux"soutien critique". Si tu me concèdes assez, je ne te critique pas ou peu ; si tu me donnes comme-ci comme-ça, je t’accorde mon "soutien critique" ; si tu me refuses le minimum nécessaire, alors je te retire le "soutien" pour recourir uniquement à la "critique". En Algérie, dans le passé, un parti politique s’est illustré dans ce comportement.
Preuve manifeste de cette attitude : l’"élite" intellectuelle. Tant qu’elle dispose de privilèges satisfaisants, accordés par la caste dominante, toute l’« intelligence » de cette « élite » justifie, légitime le système actuel. Ses « critiques » consistent essentiellement à indiquer des améliorations de détail, afin de consolider l’essentiel du système existant. Cette opération a la particularité de se doter d’un masque qui se veut honorable : la "démocratie" (pour les gens de l’"élite"), le "progrès" économique (permettant à cette "élite" de conserver ses privilèges), la "culture" (celle qui lui fournit argent et gloire médiatique).
Nous arrivons à la classe laborieuse et aux chômeurs (travailleurs provisoirement exclus de l’activité productrice).
Pour la majorité des journalistes et essayistes (classe moyenne de niveau moyen), ce n’est que du "gâchi", une foule, une masse apathique, un troupeau de moutons, sans aucun poids significatif comme force sociale. Pourtant, la caste dominante craint cette classe laborieuse, puisqu’elle se soucie de la ménager. Dans ce but, elle utilise trois « amortisseurs » sociaux pour conjurer sa révolte.
1. L’idéologie : elle présente la religion, en particulier, et certaines "valeurs", en général, comme soumission non seulement à Dieu, mais également à ceux auxquels il a donné le pouvoir de commander la société. Mais, comme le peuple, quoiqu’en dise, ne peut pas se nourrir, soigner et loger de préceptes religieux ni de « valeurs », interviennent :
2. Les subventions financières : prix supportable de certains aliments de base, tels pain et lait, ainsi que logements, etc.
3. Enfin, sachant que les deux premiers "amortisseurs" ne suffisent pas, intervient le contrôle policier et, éventuellement, la répression.
N’est-ce pas la preuve que ce peuple du « bas » de l’échelle sociale n’est pas si apathique qu’on le dit ? Certains diront : d’accord, mais ce peuple est tenu par la carotte, l’opium et le bâton. Donc il demeure apathique.
Objection ! La preuve que ces éléments de gestion sociale de la classe laborieuse ne suffisent pas, c’est l’opposition de la caste dominante à l’existence de syndicats autonomes de travailleurs, ainsi que d’associations de chômeurs. Ces revendications prouvent que travailleurs et chômeurs ne se laissent pas bercer par les miettes qui leur sont concédées.
De là, devient clair l’opportunisme, pour ne pas dire l’inconséquence ou l’hypocrisie, de certains intellectuels. D’une part, ils dénoncent le peuple comme un ramassis de « gâchi » (foule, masse) apathique ; mais, d’autre part, ils ne font rien pour soutenir, de manière conséquente, les efforts des travailleurs et chômeurs pour disposer d’organismes propres à leur affirmation comme sujets sociaux agissants. (A suivre)
Kadour Naimi
Courriel : [email protected]
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merci pour les information