"Nous sommes démunis face à la force de la hogra", crie une universitaire de Staouéli

Qu'attend la justice pour rétablir ce couple dans ses droits ?
Qu'attend la justice pour rétablir ce couple dans ses droits ?

C'est l'histoire d'une hogra ordinaire que nous raconte ce courrier plein de colère, de dépit envoyé par une universitaire habitant Staouéli. Ce cri de coeur nous renseigne sur le mépris dans lequel sont tenus les honnêtes cadres algériens. La justice y est interpellée.

"Nous habitons Staouéli. Durant l’été 2016, ma voisine me harcèle à propos d’eau qui coule dans toute sa maison, que sa maison est dans un état de délabrement avancé et que le maçon a décelé les fuites au niveau du mur commun avec ma propriété. Elle me demande l’autorisation de faire des trous au niveau de ce mur. Mon mari refuse, je le harcèle en lui répétant que cela aurait pu nous arriver à nous et que nous l’aurions sollicité pour réparer notre maison. Nous repartons à Bejaia. Il faut que je vous dise aussi que j’ai enseigné pendant quatre années jusqu’à fin octobre 2016, à l’Université de Bejaia où j’ai ouvert un Laboratoire de recherche et une Ecole doctorale. Je reviens à Alger2, mon université d’origine, fin octobre et nous constatons que la dite voisine a construit au niveau du mur commun des gros piliers sur lesquels elle a élevé trois étages avec quatre fenêtres donnant presque dans mon salon. Donc, elle rentre chez moi en mon absence, le maçon travaille chez moi, en mon absence.

Devant ce constat, je l’appelle pour lui dire de commencer par fermer la fenêtre qui donne directement sur mon jardin, presque dans mon salon, qui est depuis condamné. Elle refuse. Mon mari décide de construire un muret pour nous protéger. Elle détruit le mur, insulte mon mari et son fils le menace. On va voir la police. Mais nous n’avons pas de témoins : l’affaire est close. Mon mari fait toutes les démarches administratives. Plainte au niveau de l’APC, de la police de l’urbanisme (01-12-2016) et une commission de la circonscription administrative de Zeralda passe pour constater les effractions de ma voisine le 06-12-2016. Le 31 janvier 2017 au matin, on sonne à la porte, mon mari ouvre la porte et voilà toutes les autorités locales qui font effraction dans la maison : le président d’APC, le commissaire de la sûreté urbaine, les pompiers…je ne comprends pas, mon mari non plus. Cela s’appelle, en termes psychologiques, une dissociation qui advient lors d’un traumatisme : une partie de nous était-là, présente et assistait à cette invasion et une autre absente. J’entends vaguement c’est ‘’sous ordre du wali’’, je pense : « le Wali Zoukh s’occuperait de la destruction d’un mur à l’intérieur d’une maison !», mes pensées ne vont pas plus loin, incapable de penser, là aussi symptôme spécifique du traumatisme. Donc, le maire fait venir deux ouvriers, ils cassent le mur. C’est vrai, pas entièrement, seulement deux rangées.

Le lendemain, nous reprenons un peu nos esprits et j’appelle une copine avocate pour lui raconter. Elle commence par me rappeler la procédure en vigueur dans le cas de construction illicite (j’ai construit un mur à l’intérieur de ma maison): le président d’APC aurait dû , d’abord nous saisir et nous avions le droit de faire un recours. Si le recours n’aboutit pas nous serions alors tenus d’obtempérer, faute de quoi la force publique intervient. Nous n’avons jamais été saisis. Pire encore, le jour de l’effraction, nous n’avons reçu aucune notification : le maire s’est adressé verbalement à mon mari. Mon mari quant à lui, reprenant ses esprits, s’adresse à l’APC, pour demander la notification : on le fait courir. Il n’obtient rien. Il finit, parce que quelqu’un a dû compatir à son sort, par l’avoir. Je lis: article 1, vous êtes tenu de détruire ce qui a été construit sans autorisation et de rendre le lieu tel qu’il était auparavant.
Article 2 : en cas de non obtempération, sous 08 jours, seront prises contre vous les décisions avec la prise en charge des charges induites par la construction illégales et vous serez responsable civilement devant la juridiction concernée.
Article 3 : cette décision sera exécutée à partir de la date de l’information du contrevenant. Or, la procédure n’a pas été respectée : nous n’avons jamais été saisis, nous n’avons jamais reçu de notification. Mon mari n’a jamais été destinataire d’un courrier émanant de l’APC. Je revois mon amie avocate qui me pousse à déposer plainte contre le président d’APC pour violation de procédure et à demander à la justice la fermeture des fenêtres qui donnent sur ma maison.

Je constate également que la plainte déposée par mon mari contre la voisine auprès des services concernés n’aboutit pas : ses fenêtres sont toujours ouvertes et elle poursuit ses extensions sans être inquiétée.

Mais l’histoire ne s’arrête pas là. En date du 23-02-2017, mon mari reçoit une convocation de la part du tribunal de Chéraga. Il doit comparaître devant le tribunal Correctionnel, pour "construction illicite". Rappelle qu’il s’agit d’un mur pour nous protéger et ouvrir enfin la porte de notre salon. Mon mari s’adresse de nouveau au président de l’APC, pour lui demander une attestation à remettre au juge stipulant que le mur a bien été détruit par ses soins. On promet de la lui remettre. Il retourne pour la récupérer. On lui rétorque finalement que personne, ni le président d’APC, ni le secrétaire général, ne signeront un tel document.

Evidemment je raconte mon histoire autour de moi. Et toutes les personnes me parlent de "piston" et m’incitent à trouver moi aussi un piston. Mais je n’ai pas de piston. Mon mari et moi avons passé notre vie à travailler honnêtement, à gagner notre vie dignement et nous n’avons jamais pensé qu’il nous fallait des ‘’protecteurs’’ dans notre pays pour être respectés.

Moi je dis, nous sommes victimes de hogra caractérisée et nous sommes démunis face à la force de la hogra.

Pourquoi, j’écris cette lettre ? Pour ne pas étouffer. La parole libère. Et peut-être qu’elle sera lue par un responsable qui daignera nous rendre notre dignité et énoncer la Loi."

Cherifa Bouatta

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Commentaires (8) | Réagir ?

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baker_st mazouz

thank you

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walid crsic

C'est l'histoire d'une hogra ordinaire que nous raconte ce courrier plein de colère, de dépit envoyé par une universitaire habitant Staouéli. Ce cri de coeur nous renseigne sur le mépris dans lequel sont tenus les honnêtes cadres algériens. La justice y est interpellée.

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