Donald Trump, l'Europe et les autres !
"Notre grande règle de conduite envers les nations étrangères est d'étendre nos relations commerciales afin de n'avoir avec elles qu'aussi peu de liens politiques qu'il est possible. Autant que nous avons déjà formé des engagements, remplissons-les avec une parfaite bonne foi. Et tenons-nous-en là", Georges Washington.
Tout compte fait, les mots ne trompent jamais ! Quand bien même on les mutile, on leur fait tordre le cou ou que l'on essaye de leur faire dire le contraire de ce qu'ils veulent dire. Trump a dit son mot. Clair et net. N'en déplaise à une vieille Europe, traditionnellement "terre d'accueil", mais qui est devenue profondément réticente à la présence de l'islam et encore moins au brassage des cultures. Trump dit tout haut ce que l'Europe disait tout bas. Il parle de politique officielle et globale envers des pays qu'il juge potentiellement menaçants pour la sécurité de son pays. Officieusement, l'Europe disait la même chose, mais son mode opératoire est différent ; elle le faisait mais d'une façon morcelée et ciblée pour ne pas entrer en confit direct avec ce monde musulman et choquer les consciences.
La décision de Donald Trump, visant l'interdiction d'accès aux USA aux ressortissants de sept pays musulmans, liste extensible, bien entendu, à d'autres, suscite une grande polémique chez les officiels européens et même à l'ONU.
Cette Europe qui s'est inscrite corps et âme dans toutes les guerres instiguées par l'establishment américain tant critiqué par D. Trump lui-même. Guerres qui ont catapulté la planète tout entière dans une configuration trop dangereuse. Aveugles, implacables, amovibles, contre le soi-disant terrorisme; ces guerres n'épargnaient personne. Elles accentuaient les haines raciales et religieuses entre les êtres humains et surtout, elles ignoraient la souveraineté des Etats. Des guerres à tour de bras dans nos contrées qui ont provoqué des vagues sans précédent de réfugiés que Trump dénonce fermement. Ajouté à cela le problème palestinien pérennisé par des positions européennes ambiguës et toujours à la traîne des Américains et dont le soutien à cette cause juste ne dépassait point le vocifère.
En tout état de cause, G. W Bush, un fervent religieux, un "messianiste" convaincu. Issu lui aussi d'une terre outre-Atlantique qui n'a jamais été celle de la prophétie, il a fini quand même par mettre le monde dans une configuration trop dangereuse et difficile à reconfigurer. Héritier du "Manifest Destiny" (la destinée manifeste), fondement de la politique étrangère américaine, défendue par tous les Américains et qui s'abreuve d'une forte dose de patrimoine religieux depuis 1840 déjà. Les fondateurs des États-Unis ont dès le départ été poussés par le souci de créer un Etat nouveau et de limiter les relations avec les Etats européens, considérés comme "décadents".
En 1796, Georges Washington l'exprima clairement dans son discours d'adieu : c'est la doctrine du non-entanglement (non-engagement), reprise par Jefferson (1801 à 1809) puis par Monroe, qui s'y inspira pour sa fameuse doctrine et qui demeure une référence pour les tenants de l'isolationnisme américain. "Notre grande règle de conduite envers les nations étrangères est d'étendre nos relations commerciales afin de n'avoir avec elles qu'aussi peu de liens politiques qu'il est possible. Autant que nous avons déjà formé des engagements, remplissons-les avec une parfaite bonne foi. Et tenons-nous-en làé, Georges Washington.
Une Europe qui, avant même "l'ère Bush", sentait l'odeur de la scission morale et du repli sans précédent par rapport à ses propres principes fondateurs. Un refus de l'autre qui se dissimulait souvent derrière un prétexte sécuritaire et ne visait finalement que les innocents qui débarquaient chez elle. Refus de visa pour un motif toujours flottant : ressources insuffisantes, garanties de retour non fournies, visa à la tête du client, etc. Refoulement aux points d'accès de leurs pays, aux détenteurs de visas légaux pour motifs de langue, de tenue ou de lieu d'origine. Refus de séjour à ceux qui sont en droit de l'avoir et pour couronner le tout, des persécutions policières illégales. Tout le monde le faisait même l'Amérique d'avant Trump! Si ce n'est pour un motif, ça sera pour un autre.
Le sécuritaire aura comme toujours le dernier mot au-dessus du légal ou même des convenances. Souveraineté oblige ! Le fait d'avoir un teint oriental est susceptible à lui seul de vous faire renvoyer chez vous ou même vous emprisonner. Qu'a-t-il changé alors? Absolument rien ! D. Trump eut au moins le courage et le mérite de le décréter officiellement, en cohérence avec ses propres convictions, c'est tout ! Le faisant, il met l'Occident dans l'embarras face à sa vraie image, à sa vraie vision du monde qu'il essaye de cacher, de redorer sous des appellations qui ne tiennent plus la route. Celles du faux humanisme et des droits jamais respectés. Ce qui semble plus les déranger.
Ce refus de l'autre n'obéissait pas forcément à une loi précise, écrite dans un journal officiel, mais plutôt à des directives qui ciblaient des individus précis et qui agissaient à la tête du client. Un refus global de l'autre ; implicite «par obligation d'éthique», qui ne cible que le musulman, l'Arabe, le Maghrébin et l'Oriental par extension ; cela va de soi ! Ce qui est, au demeurant, encore plus répugnant et écœurant à mon avis que ce que semble susciter chez eux la politique explicite de Donald Trump. L'Europe fait dans la nuance, dans l'hypocrisie et la versatilité morale. Elle finira par faire la même chose, elle aussi, voire pis encore ! Question de temps, c'est tout !
Quelle sera donc la ligne directrice de notre diplomatie internationale, traditionnellement basée sur le satisfecit de l'Oncle SAM qui fourrait son nez partout et qui prêtait son soutien aux mieux-offrants. Une Amérique sous Trump, plus protectionniste et isolationniste que jamais et une Europe qui vire de plus en plus à droite ? Un monde qui a pris goût à recourir à la force plutôt qu'au droit pour régler ses problèmes.
Notre diplomatie qui a su tirer profit de la configuration universalisée par G. W. Bush, celle de "qui n'est pas avec nous, serait contre nous". Guerre mondiale contre le soi-disant terrorisme religieux dans laquelle il a catapulté le monde depuis 2001. Un monde devenu, à vrai dire, encore plus dangereux qu'il ne l'était, le démantèlement de nos Etats-nations sous des intitulés ethniques et religieux, suivi d'un rétrécissement inquiétant des champs des libertés individuelles et collectives au sein même des démocraties occidentales.
Avons-nous donc, nous aussi, besoin d'un Donald Trump ou d'un Poutine algérien, pour redonner l'espoir et la dignité perdue à cette Algérie ? Une Algérie souvent assimilée à une vache laitière qui allaite tout le monde, sauf ses propres enfants. Qui respecte tout le monde, sauf ses enfants et qui observe toutes les lois étrangères, hormis ses propres lois ?
Mourad Chaalal
Commentaires (3) | Réagir ?
merci
merci bien pour le site