"Exil nostalgie" : errance et poésie de Kamal Guerroua
L’essayiste et chroniqueur Kamal Guerroua a publié chez les Editions Ressouvenances un recueil de textes puissants et de poèmes sur l’exil, la nostalgie qui ronge tout être déraciné et ce lien invisible qui nous lie avec au pays.
Profond par sa justesse et déchirant par sa sincère sobriété, ce court livre de Kamal Guerroua est illustré par la non moins touchante peintre Anne Munoz-Winther (Puntichia). Dans "Exil Nostalgie", le chroniqueur, qui croque habituellement l’actualité et le monde avec une plume tantôt froide et tantôt ravageuse, pose sa plume sur les territoires d’exil. L’ouvrage s’ouvrage sur un titre interrogateur :"L’exil pour destin". Dans ce court texte, l’auteur écrit que "le premier message d’un enfant recevant la lumière du monde est un cri de détresse car il vient de résilier un contrat avec son osmose originelle et a quitté son univers aquatique : le ventre de sa mère."… Kamal Guerroua situe en liminaire nos premiers déchirements à cet "arrachement" du ventre de la mère. Et conclut "qu’un fort désir de retourner à la mère-patrie habite de chaque exilé". Le décor est planté et l’auteur de dérouler une série de chroniques et de poèmes autour de l’exil et de ce besoin irrépressible de retourner au pays.
"Je ne me souviens que de mes racines/ la chaleur maternelle/Les figuiers/Les cactus/Les oliviers/Les hameaux de Kabylie…"
Il est manifeste que la question habite l’auteur, traverse en profondeur son quotidien et à travers lui de larges pans de ces hommes et femmes qui ont dû quitter le cocon familial et ancestral pour un ailleurs où la vie est censée être meilleure.
Qui dit exil, dit aussi intégration à une nouvelle société parmi laquelle on s’installe, on travaille, on… vit. Devant l’incompréhension, voire le rejet que subit l’exil, l’auteur s’interroge : "est-ce raisonnable en fin de compte de vouloir s’intégrer dans une société d’accueil pour s’y retrouver désintégrer ; absorbé ; oublié ; effacé ? Atroce dilemme suspendu au-dessus de la tête et la conscience de chaque immigré, chaque exilé… chaque réfugié". L'exil ne va inévitablement pas sans nostalgie. Cette blessure refoulée qui vrille les tripes et plonge l'exilé dans un passé magnifié, enjolivé duquel remonte l'enfance et le lait maternel. "La nostalgie ! ça grise ; ça excite les veines engivrées par le froid de l'exil ; ça remonte parfois aussi le moral..."
Ramassé et dense, "Exil nostalgie" explore l’indicible qui travaille tout être qui se retrouve dans cette condition peu enviable de déraciné ou d’exilé. Il y a dans l’écriture de l’auteur une émotivité profonde qui suggère qu’il cultive une proximité presque charnelle avec la thématique traitée.
Hamid Arab
"Exil Nostalgie" de Kamal Guerroua publié par Ressouvenances. Prix : 12 euros.
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merci
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