Bob Dylan veut-il décliner le prix Nobel ?

Bob Dylan est une légende vivante.
Bob Dylan est une légende vivante.

Près de vingt-quatre heures après avoir attribué le prix Nobel de littérature au chanteur et compositeur américain Bob Dylan, l'Académie suédoise n'avait "toujours pas" parlé vendredi avec la superstar. Entre-temps, l'artiste a pourtant donné un concert.

"L'Académie a parlé avec l'agent de Dylan et aussi le responsable de sa tournée", a expliqué à l'AFP son chancelier Odd Zschiedrich. Mais pas moyen d'avoir une conversation avec le lauréat. Bob Dylan a donné un concert jeudi soir à Las Vegas où, d'après les journalistes qui y ont assisté, il n'a fait que chanter, sans jamais rien dire et donc sans évoquer son prix Nobel.

D'après Le Washington Post, qui a contacté des proches, "Dylan est resté silencieux toute la journée au sujet de sa récompense". Un de ses amis, le chanteur Bob Neuwirth, a déclaré au quotidien américain qu'il "pourrait bien ne jamais même faire de remerciements".

Les lauréats sont invités chaque année le 10 décembre à Stockholm pour recevoir leur prix des mains du roi de Suède et donner un discours lors d'un banquet. L'Académie suédoise ne savait pas, bien évidemment, si Bob Dylan avait l'intention de venir.

En 1964, le philosophe français Jean-Paul Sartre avait refusé le prix Nobel de littérature, annonçant sa décision dès qu'il avait appris qu'on le lui décernait. Il n'avait pas obtenu les 273'000 couronnes attachées à la récompense à l'époque.

Robert Zimmerman, alias Bob Dylan, snobe-t-il le Nobel ? Son silence après l'annonce de sa consacration par l'Académie suédoise jette le trouble. Certains s'effarouchent, d'autres applaudissent. Mais l'artiste a le caractère bien trempé. Il n'écoute que ses voix intérieures. Dylan est connu pour être un boudeur. Il ne cause pas beaucoup. Combien de fois lui a-t-on reproché son silence pendant les concerts. Son dédain de la presse ?

Bob Dylan est un mythe vivant. Une rock star insaisissable. Parti de loin au milieu du siècle dernier, à 75 ans, aujourd'hui il n'a plus rien à attendre. Il a tracé seul son sillon.

L.M.A./AFP

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Commentaires (11) | Réagir ?

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Kichi Duoduma

A Kacem ay-amdakoul, Il ne faut pas croire que je déteste Elvis Presley ou Bob Dylan en tant que personnes. Je ne les connais pas, je ne sais rien de leurs vies personnelles. Je parle d'eux en tant qu'artistes. Ces deux-là, comme tous les autres chanteurs blancs de rock ou de blues, ont arraisonné le blues et son dérivé, le rock n' roll et l'ont asceptisé et « repackagé » pour un auditoire blanc. Ils lui ont enlevé toutes ses entrailles, pour ne laisser qu'un produit commercial complétement débarrassé de toute vitalité. Je vois des blancs dans les années 60, en train d'écouter du blues des derniers survivants du vrai blues, une musique qui normalement devrait te déchiqueter les entrailles et te mettre en transe, et ces blancs accueillent cette musique avec un sourire béat aux lèvres, comme si c'était de la musique très "jolie". Le blues, le vrai, ce n'est pas "joli", c'est un hurlement de colère et de désespoir, mais un désespoir viril, pas pleurnichard, toujours déguisé en dépit amoureux, en thème religieux ou autre, presque jamais adressé directement.

La situation sociale qui a donné lieu au sentiment de blues (cafard, désespoir, pauvreté abjecte, brimades) a quasiment disparu depuis plus de 60 ans, et c'est pour ça que personne ne peut plus la chanter. Un vieux bluesman a dit : « it take a man who have the blues to sing the blues » (et sa grammaire en anglais n'était pas affectée, c'est comme ça qu'ils parlaient). Il faut avoir le blues pour chanter le blues. Aujourd'hui, personne n'a ce genre de blues. Les gens ont des problèmes, mais pas ce genre de problème, et pas à ce point. Un autre vrai bluesman a dit, dans les années 60 : « Ils (les jeunes, blancs ou noirs) m'envient mon talent. Ils m'envient la facilité avec laquelle j'improvise et mon jeu de guitare. Mais moi, j'échangerais volontiers ce talent pour une vie normale et douce. Je leur donnerais volontiers ma voix et la dextérité de mes mains s'ils veulent bien prendre tous les mauvais souvenirs et toutes les cicatrices de mon âme. Croyez-moi, s'ils savaient de quoi il s'agit, ils n'accepteraient jamais le marché. »

Le détournement et le vol de cette musique ne s'arrête d'ailleurs pas à l'imitation pure et simple, elle se traduit en pur vol en violation des règles morales, car Bob Dylan a déposé des droits d'auteur pour des chansons de blues du domaine public, avant que le blues ne soit découvert par les blancs et ne soit devenu un produit vendable.

Une fois j'ai entendu un chanteur blanc (Eric Crap-ton je crois) chanter "your other man done gone... " (ton autre homme est parti...) et ça m'a rendu furieux. Car les mots "other man" (autre homme) ne sont pas que des mots dans le milieu du blues ancien. Ça faisait partie de l'économie domestique de ce milieu: les hommes partaient chercher du travail là où ils pouvaient, et les femmes avaient toujours au moins un "autre homme" pour le remplacer pendant son absence. Les hommes aussi avaient au moins une "autre femme" à plusieurs endroits différents. Ça se savait, tout le monde le faisait, c'était un phénomène tout à fait courant et accépté par tous. Tout ce que l'homme "régulier" attendait de "l'autre homme" était de prendre ses souliers et s'en aller quand il revenait. Le mariage normal existait à peine, juste sur papier en fait. Cette situation était le résultat de l'esclavage très récent à l'époque. De nombreux ex-esclaves étaient encore en vie dans les années 20-30-40. Alors entendre un new-yorkais ou un londonien parler de "ton autre homme" ceci ou cela, c'est vraiment révoltant pour moi.

I know this is a mouthful, probably a little more than you wanted to hear, but I pray you don't take it personally, because I think a bit of heated debate never hurts anyone, does it ?

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Kacem Madani

Tu sais, le plagia a toujours existé, partout sur la planète ! D’ailleurs que faisons nous sinon reproduire à notre façon ce qui a déjà été dit et écrit par tant d’autres! Nous ne sommes pas une génération spontanée et ne pouvons de ce fait pas prétendre avoir inventé l’eau chaude ! –le célébrissime « my sweet lord » de Georges Harrison est un plagia de « it’s so fine » des Chiffons qui ne datait que d’à peine 10 ans avant « my sweet lord ». C’est peut être un plagia mais Georges Harrison a su transformer une pierre en véritable diamant ! Eric Clapton, que tu cite, son fameux «I shot the Sheriff » est de Bob Marley. Et Clapton le lui a tout simplement volé ! Plus proche de Chez nous, le fameux zwits r’wits, Idir s’est tout simplement servi du répertoire de Na-Chérifa ! De nombreux ces grands succès de Raï ont été repris du répertoire de Cheikha Remitti sans que le moindre sou ne lui soit versé! Nous pourrions y passer la nuit à citer les plagiats musicaux ! Ne parlons pas de littérature ou des affaires de Plagia sont régulièrement portés devant la justice! Ainsi va le monde, les hommes ont toujours chassé et pillé d’autres hommes ! Tirer profit des œuvres des autres est un moindre mal par rapport au reste !

So long Buddy !

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Kichi Duoduma

Les influences et les emprunts ont toujours existé, je le sais bien, mais s'agissant de Bob Dylan et de tous les chanteurs blancs de soit-disant blues et rock, ce qui m'enquiquine ce n'est pas tant qu'ils aient copié, c'est qu'ils en aient profité alors qu'ils ne le méritent pas artistiquement parlant. S'ils s'étaient inspirés des noirs originaux mais qu'ils avaient hissé cette musique à des niveaux supérieurs à l'original, alors là oui, je n'aurais rien à redire. Mais en constatant la platitude, la faiblesse de la voix, l'absence d'inspiration et la piètre maîtrise des instruments par rapport aux pauvres paysans noirs, ça me révolte. C'est comme si on organisait un concours du rugissement le plus retentissant et qu'on attribue le premier prix à un chat domestique au détriment d'un lion sauvage et libre. Voilà ce qui m'embête. Et j'ai ajouté toutes les infos dans mes autres posts sur la vie de ces vieux noirs pour dire que plus personne ne peut ni ne pourra jamais plus chanter avec autant d'impact qu'eux, parce que la situation dans laquelle ils vivaient n'existe plus de nos jours.

Pour ça, j'admire Alan Lomax qui a écrit "The Land Where the Blues Began". Il était chanteur lui aussi, et d'abord accompagnant son père, puis tout seul plus tard, il est allé partout au sud dans les années 20-30-40 pour dénicher et enregistrer des talents du blues. Il l'a dit très clairement, il n'oserait jamais essayer de chanter comme le moins doué parmi ces paysans pour ne pas se ridiculiser, car n'ayant pas vécu leur "blues" de l'intérieur, il ne pouvait que l'apprécier du dehors. Il a beaucoup critiqué les blancs lui aussi, par exemple les Rolling Stones qu'il a qualifiés de criminels pour la façon dont ils ont ruiné les dernières années d'un vieux noir, Reverend Wilkins, à qui ils ont emprunté même le nom de leur groupe, de l'une de ses chansons.

Do yourself a favor one of these days, and read Alan Lomax's book, or watch his show on youtube (The Land Where the Blues Began). Naturally, the book contains a lot more info, but the TV show is OK too.

So long, brother!

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Kacem Madani

Mais bien évidemment que l'histoire du blues est à l'image des souffrances et des humiliations endurées par les esclaves noirs ! Mais cela n’empêche qu’Elvis a contribué à sortir justement ces oubliés du show business du silence dans lequel ils étaient cantonnés par la grâce du « blan-bec » comme tu dis. Elvis, à ses débuts, n’avait-il pas été taxé de blanc qui imite le noir ? On ne peut pas refaire le monde, mais je crois que si des barricades entre les hommes ont été démantelées, c’est un peu grâce à des Elvis et des …Bob Dylan !

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