Gardes communaux : aurait-on déjà oublié leur rôle dans la lutte antiterroriste ?

Les gardes communaux ont joué un grand rôle dans la lutte antiterroriste.
Les gardes communaux ont joué un grand rôle dans la lutte antiterroriste.

Dans le pays où le "qui tue qui ?" faisait florès pendant la période où les attentats terroristes se comptaient par dizaines en Algérie, on en vient à s’inspirer de notre modèle de lutte contre le terrorisme, la garde communale en l’occurrence.

Une reconnaissance implicite de la souffrance endurée par les algériens, qui en plus, devaient supporter le déni des européens et à leur tête les officiels Français par rapport au phénomène du terrorisme: c’est la guerre civile en Algérie, soutenaient les pays de la rive Nord de la Méditerranée ; le terrorisme n’a pas de frontière, prédisaient les Algériens.

Le temps leur a donné raison, même s’il faut déplorer toutes les victimes de la folie terroriste qui viennent de succomber dans l’hexagone et ailleurs. Depuis le massacre commis à Nice en France, les forces de l’ordre, qu’elles soient policières ou militaires, sont au maximum de leurs possibilités, dans la lutte contre le terrorisme. Dans son dernier discours, le président de la République française a confirmé son intention d’utiliser le vivier des réservistes pour créer «une garde nationale», en plus des 5000 postes supplémentaires de policiers et de gendarmes. Pour François Hollande, les réservistes constituent des éléments qui peuvent, demain, former une garde nationale encadrée et disponible.

Le message des responsables français est clair : nous n’avons pas les moyens de surveiller et de sécuriser l’ensemble du territoire national, des lieux de transports et des lieux publics, et nous avons suggéré au président Hollande, qu’on puisse créer "une garde nationale" qui permette aux citoyens de venir relayer les forces de l’ordre.

S’il faut plus de monde pour protéger le pays affirment à l’unisson tout ce que la France officielle compte de responsables et de personnels politiques, il faudra faire appel à d’autres moyens et au besoin, mettre en place une garde nationale ! Tout comme nous en 1992, pour la garde communale.

Ce n’est pas la première fois que l’idée de la création d’une telle force est avancée. Après les attentats de janvier qui ont frappé Charlie Hebdo, plusieurs personnalités politiques, proposaient déjà, de rétablir la garde nationale «qui serait plus efficace qu’un retour du service national». Le président Français ne s’est pas prononcé sur les détails d’effectifs et les modalités de mise en place de ce corps de sécurité supplémentaire. Il a toutefois dit souhaiter «que l’on tire mieux parti des possibilités des réserves de défense, encore insuffisamment exploitées dans notre pays, alors que nous avons justement ce gisement».

Pour autant, entendre un président de la République française évoquer l’idée d’une garde nationale était encore inimaginable voici quelques années. Mais les attentats de Paris et surtout le massacre survenu le 14 juillet dernier en plein «Promenade des Anglais», ont précipité les choses.

Il est vrai que, pour l’heure, notre pays, qui a tant souffert du terrorisme, s’est engagé dans la voie diplomatique en s’attelant, très opportunément, à l’organisation d’une conférence sur «la lutte contre l’extrémisme violent et la déradicalisation».

L’Algérie, faut-il le rappeler, a mis en œuvre une profonde et multidimensionnelle politique de déradicalisation qui a sensiblement contribué à l’affaiblissement des groupes terroristes, à discréditer leur discours et idéologies extrémistes, à leur rejet par la population et à l’assèchement de leurs sources de recrutement. Selon le ministre des Affaires Maghrébines et de la Ligue arabe, Abdelkader Messahel, «la déradicalisation s’impose comme une entreprise fondamentale qui concerne toutes les dimensions de la vie politique, économique, culturelle et sociale qui interpelle tous les segments de la société, au plan interne et toute la communauté internationale au plan externe».

Pour la communauté internationale l’heure est au renforcement sécuritaire. A la mobilisation de toutes les énergies. C’est l’urgence absolue ! Les forces policières ou militaires sont au maximum de leurs moyens dans la lutte contre le terrorisme tant en France qu’en Europe de manière générale !

En Algérie, on a connu la décennie noire et tous les drames qu’elle a charriés. A l’époque des milliers de patriotes et de paramilitaires sont venus dans l’extrême urgence, au milieu des années 1990, assister l’armée lorsque le pays était à feu et à sang. Ces courageux citoyens dont un grand nombre a été enrôlé dans la garde communale, ont constitué une force d’appui indispensable pour protéger le territoire national jusqu’à ses recoins les plus isolés.

La paix retrouvée, les patriotes s’en sont retournés dans leurs foyers et les gardes communaux ont poursuivis leurs missions jusqu’à la dissolution du corps, décrétée officiellement le 31 octobre 2012. Il est certes vrai que trois options alternatives ont été proposées aux gardes communaux :

1. Départ volontaire à la retraite, option qui a séduit près de 54 000 agents

2. Intégration à l’ANP en tant qu’auxiliaires, avec des vœux exprimés par pas moins de 22 000 agents

3. Le reste des effectifs ayant préféré se reconvertir en agents de sécurité dans les entités économiques ou administratives publiques, sont en attente d’un poste de travail et continuent, semble-t-il, à percevoir leur salaire

De ce qui précède, les questions qu’il faut se poser, au moment même où l’Europe et le monde entier redoublent d’efforts pour renforcer leurs moyens de lutte contre le terrorisme, sont les suivantes :

1. Fallait-il dissoudre la garde communale et partant, faire l’économie de l’expérience acquise par ses agents ?

2. Oui, si l’on venait à prendre en compte le classement établi dans le dernier rapport annuel sur l’Indice Global de Terrorisme pour 2015 publié par le Think-Tank International Institute for Economics and Peace (Institut pour l’économie et la paix) qui classe, par ordre croissant, les pays les plus sujets à la menace terroriste. Avec sa 34e place sur 152 pays, l’Algérie est placée dans la catégorie «orange» et de ce fait, elle est en progression, puisqu’elle était classée dans le rapport de 2014 à la 21e place, ce qui la situait dans la catégorie «rouge».

3. Oui aussi, dès lors que notre pays a retrouvé sa stabilité non sans avoir payé un lourd tribut.

4. Non par contre, car d’anciens militaires le disent aujourd’hui, sans ambages : la garde communale fait défaut dans le dispositif de lutte anti-terroriste ! Cela a été relevé, d’ailleurs, par de nombreux analystes de la question sécuritaire qui soutiennent que les troupes opérationnelles de l’ANP, qui ont fort à faire au niveau des nombreuses frontières du pays et de l’agitation qui les secouent, ont été dépouillées d’auxiliaires dont la préciosité dans certaines compétences, a été maintes fois vérifiée lors d’innombrables opérations combinées de lutte contre le GIA, le GSPC et leur héritier AQMI.

5. Non également, car la nébuleuse terroriste, en l’occurrence Daesh, veut renforcer ses réseaux djihadistes en Algérie, à en croire le radar du quotidien «Liberté» du mardi 24 novembre 2015 qui s’appuyant sur l’information publiée par le New York Times «qui se serait procuré une infographie complète des endroits où Daesh envisagerait de mener des opérations militaires avant de s’installer au Maroc et en Europe, pour au final, provoquer une guerre apocalyptique mondiale».

6. Non enfin, au regard de la proximité des frontières du pays avec la Lybie en proie au diktat de l’organisation criminelle «Daesh» qui s’est, semble-t-il, installée dans certaines villes de ce pays, amenant les forces américaines à effectuer des bombardements, ajoutant ainsi à l’inquiétude générale !

Actuellement, on dénombre près de 10 000 Tunisiens et Marocains dans les rangs de l’organisation terroriste ; il y aurait aussi quelque 1500 Algériens, selon une estimation du ministère de l’intérieur (El Watan du 24/11/2015).

Face à ces périls, l’Algérie s’apprête à renforcer ses lois anti-terroristes avec le durcissement des peines pour lutter contre le phénomène du retour des «combattants» et du «recrutement par les TIC».

En l’état, bien sûr personne ne pourra dire qu’avec la présence des gardes communaux et l’expérience qu’ils ont cumulée en matière de renseignement et de maitrise du terrain, les attaques des groupes de terroristes auraient continué ou pas. En revanche, nul ne pourra contester à la garde communale son expertise en matière de détection, le plus en amont possible, des dérives terroristes chez certains de nos compatriotes «égarés» qu’elle étouffait dans l’œuf !

Personne non plus ne pourra nier aux gardes communaux leur courage et leur sacrifice pour la patrie. Près de 5000 d’entre eux sont tombés en martyrs, sans compter les blessés qui traînent jusqu’aujourd’hui, des handicaps physiques ou souffrent de profonds traumatismes psychiques.

Démobilisés, beaucoup d’entre eux estiment encore aujourd’hui, qu’ils n’ont pas bénéficié de tous leurs droits ; selon leurs représentants un flou entoure la décision du gouvernement concernant, par exemple la question de la suppression de la retraite proportionnelle, la prime de rendement de 30% la revalorisation de la prime de risque et d’astreinte à 90% pour l’ensemble des grades à compter du 1er janvier 2012 et une indemnité forfaitaire de service accomplie correspondant à 1 mois de rémunération pour chaque année de service accomplie dans les rangs de la garde communale, à la date du 31 décembre 2011.

Toutes ces décisions devaient entrer en application en juin 2014. Certes, le ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales Noureddine Bedoui a invité la Coordination Nationale des Gardes Communaux pour, encore une fois, discuter des différents points exposés par les protestataires, quelques jours seulement après que ces derniers aient tenté de marcher vers la capitale.

Bien évidemment, ils ont en été empêchés, plus que ça, la société algérienne amnésique à l’évidence, leur a tourné le dos à voir le peu de mobilisation populaire qu’a suscité leur mouvement.

Au-delà du déni de justice qui frappe les gardes communaux-signe d’une absence manifeste de volonté politique pour assainir ce dossier qui n’a que trop duré-, vient de le relever à juste titre et non sans émotion, un éditorialiste d’un quotidien francophone, c’est là, à l’évidence, un mauvais signal par le pouvoir aux algériens pour entretenir la flamme du patriotisme dans le pays et les valeurs du sacrifice. C’est aussi une question de mémoire, a-t-il ajouté, celle d’un peuple et de sa fierté d’appartenir à une nation, à une civilisation ; sa puissance se cultive et se nourrit de son histoire passée et contemporaine. L’ignorer, c’est se condamner et hypothéquer son avenir.

Cherif Ali

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thameur chelali

Merci

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