Présidentielle en Autriche : le populisme à l'assaut de l'Europe
Les élections autrichiennes nous prouvent encore une fois que le populisme a pris son assurance dans de nombreux pays européens et dans le monde. La défaite du parti d'extrême droite ne doit pas nous faire oublier des scores qui font peur.
L'extrême droite autrichienne vient de perdre les élections avec une différence minime résultant de la comptabilisation des votes à l'étranger. C'est un score qui fait froid au dos et aucune défaite n'apparaît paradoxalement aussi dangereuse que celle des populistes autrichiens. Car d'autres élections suivront et les causes de la flambée populiste sont toujours présentes.
Sans complexe, sans heurts et avec une dextérité insolente, le populisme est donc de retour avec son nouveau visage. Partout dans le monde resurgit le nauséabond discours de la haine, du nationalisme et du repli sur soi. Des responsables de mouvements politiques en appellent au peuple pour qu'il réagisse et mette fin à la dictature de ce qu'ils appellent "l’establishment". Ils profèrent des arguments simplistes, dangereusement comparables à ceux de nombreuses époques dans l'histoire qui ont annoncé malheur et effondrement.
Que se passe-t-il pour qu'un discours pareil puisse accaparer l'attention des foules alors que le niveau d’instruction s'est considérablement élevé à travers la planète, y compris dans les régions les moins favorisées ? Pourquoi des hommes et des femmes, souvent d'une classe moyenne aux aptitudes intellectuelles suffisamment affirmées, tombent dans une des plus anciennes arnaque que l'humain ait inventé pour manipuler les foules à son idée et aux fins de ses intérêts qui, d'ailleurs, peuvent être multiples ?
Un "faux-ami" linguistique
Cela s'entend phonétiquement, le populisme tient sa racine latine de populus, le peuple. Mais l'expression dans l'acception que nous utilisons de nos jours est bien plus proche de nous historiquement. Elle est née au XIXè siècle en Russie avec l'émergence d'un mouvement protestataire qui luttait contre l'oppression tsariste. Dans cette configuration historique, il s'agissait surtout d'une revendication pour les transformations du monde agraire, composé d'une population pauvre et soumise à l'oppression.
Nous connaissons tous, en tout cas ceux qui ont suivi un cours d'anglais, l'expression «faux-ami». Il s'agit d'un mot trompeur par son rapprochement, dans la prononciation ou l'écriture, avec un mot de la langue d'usage de celui qui s'exprime. Le terme de populisme peut donc effectivement être mal interprété et aboutir à des contresens. Il n'est pas un concept au service du peuple, bien au contraire.
Les mouvements populistes ont toujours eu un caractère constant et principal qui les qualifiait ainsi. Le populisme est tout discours qui s'adresse au peuple pour condamner les agissements des élites qui intenteraient aux libertés dans le seul but de protéger et renforcer leurs privilèges. Ils seraient responsables d'une immigration massive car elle sert leurs propres intérêts économiques et politiques.
De ce fait, le populisme détient un levier puissant pour galvaniser et haranguer les foules, pour tout individu qui aurait l'intention et les qualités de le faire. Cependant, il ne faut pas se méprendre, le populisme n'a pas de couleur politique appropriée. Il a prospéré au prix du sang de millions de personnes, aussi bien dans la folie du communisme que dans celle des fascismes de droite.
C'est la raison pour laquelle il faut avoir une compréhension plus large du populisme qui est tout simplement une manipulation par des hommes opportunistes, adaptable à toutes les situations historiques dès lors que certains éléments apparaissent.
La contagion populiste en Europe
C'est probablement la contagion populiste en Europe qui est la plus inquiétante car on aurait cru que le terrible drame historique continental, pas si lointain que cela, aurait refroidi les velléités du discours populiste. Il n'en est rien car, à l'exception de l'Espagne, la plupart des autres pays européens sont touchés par une poussée de fièvre extrémiste. Et si les partis populistes de ces pays sont différents, ils ont tous les mêmes caractéristiques, anti-européens, anti-immigration et anti-islam. Nous avons vu que ce dernier aspect est actuellement le ciment essentiel dans la relation de tous les populismes de droite (pour les deux derniers points, l’extrémisme de gauche se différencie des mouvements nationalistes d'extrême droite).
En France, les derniers sondages placent le Front national en tête devant tous les partis avec plus d'un tiers des intentions de vote. Et si nous nous tournons à gauche, Jean-Luc Mélenchon, bien que très loin derrière est néanmoins une musique populiste aussi affirmée.
En Grande-Bretagne, les souverainistes eurosceptiques de UKIP (UK Independence Party) sont arrivés en tête aux dernières élections européennes. Au Danemark, le mouvement populiste représenté par le Parti populaire danois et le Mouvement contre l'Union européenne menace de très près les partis traditionnels. Il en est de même aux Pays-Bas avec le Parti pour la liberté ainsi qu'en Belgique avec le Vlaams Belang, une formation d'extrême droite virulente.
En Allemagne, un pays qui pourtant devrait se rappeler de la tragédie que fut le populisme nazi, le nouveau parti eurosceptique Alternative für Deutschland a réalisé des scores qui menacent la gauche traditionnelle. En Hongrie, l'extrême droite prospère de jour en jour. Quant à la Grèce, dont nous connaissons les grosses difficultés économiques et celles liées à l'afflux des migrants, le parti néo-nazi Aube dorée, d’obédience résolument nationaliste et raciste, a totalisé un score inespéré de 9 % lors des dernières élections. Et si nous rajoutons la Russie de Poutine ainsi que les autres pays de l'Est européen, la montée des nationalismes montre sa puissante et fulgurante expansion.
Un populisme froid et lisse
Le populisme a plusieurs visages. Celui qui sévit en Europe s'est transformé en une nature beaucoup plus «lisse» que les formes anciennes dont nous étions habitués. Leurs dirigeants, tout au moins, sont le produit d'une éducation et d'une posture qui n'a rien à avoir avec celle des extrémistes de l'ancienne génération.
Ils se présentent comme des hommes respectables, souvent d'un bon niveau de culture et se gardent bien des grossièretés et de la violence verbale que nous percevons encore auprès de certains militants de base. C'est en réalité une approche beaucoup plus dangereuse car elle est sournoise et présente le visage de la respectabilité pour avancer masquée. Les populistes ne veulent plus renverser les institutions par la violence de la rue mais par les élections. Comme Hitler l'avait fait, ils veulent le cachet du pouvoir légal pour ne pas effrayer les masses moyennes de la population ni certaines élites qui les rejoignent parfois.
Ils n'ont plus rien en commun avec l'exemple de Maduro, président vénézuélien actuel qui insulte, vocifère et porte une casquette ridicule que le plus osé des hommes politiques n'oserait porter. Lorsqu'on regarde Maduro à la télévision, on a l'impression d'une bataille de vulgaires charretiers du XIXè siècle. Les nationalistes européens ont compris que des figures extravagantes comme Le Pen ne pouvaient les faire accéder au pouvoir. Il ont compris ce que sa propre fille a compris et qu'elle essaie de mettre en œuvre, soit la respectabilité électorale.
L'exception qui confirme la règle est cette de Donald Trump. Il est à lui seul une résurgence des clowns dangereux, comme le fut Mussolini en son temps. Mais d'une manière générale, en Europe comme dans la plupart des pays développés, les populismes essaient d'offrir un autre visage, plus présentable et non plus celui de l'ancien baroudeur, parachutiste et grossier.
Les lendemains douloureux
Là où le populisme a sévi, les lendemains ont été cruels pour les peuples qui ont adhéré à cette idéologie macabre. Les guerres, le sang répandu, la famine et les drames humanitaires ont toujours été le résultat des populismes et l'être humain retombe à chaque fois dans ce piège infernal.
Le populisme flatte les esprits, rassure et console. Il donne une impression de force collective qui soulèverait les montagnes. Il laisse espérer la réalisation de toutes les espérances et lorsqu'une d'entre elles se réalise, elle fait oublier que toutes les autres, pourtant fondamentales, sont loin d'avoir été satisfaites et même ont été annihilées. C'est le cas de toutes les libertés essentielles. Et lorsqu'il se réveille, il aura tout perdu, ses rêves et son honneur.
Toutes ces manipulations des masses sont aussi anciennes que l'être humain. Les algériens les ont connues et les connaissent encore. Elles font toujours recette au détriment de ceux qui se laissent berner par les raccourcis faciles et les idéologies absurdes. Au final, on s'aperçoit toujours que le manipulateur a agit pour ses propres intérêts ou ses basses pulsions, parfois maladivement hystériques.
Le scénario est toujours le même. Un jour, certains suivent aveuglément un homme moustachu, sec et sévère, au discours populiste qui vous parle de révolution, de socialisme, de la nation patriote et de je ne sais trop quoi. A ce moment de l'hypnose collective, ils ne ressentent même pas la douleur d'une privation de libertés. Le suivant des hypnotiseurs les a maintenus dans le sommeil, par injection pétrolière. Et voilà qu'ils se réveillent réellement, quarante années après, avec leurs propres biens pillés et expatriés offshore par les amis et descendants politiques du grand gourou qui avait endormi les foules.
Le nationaliste proclame la nation mais jongle avec la corruption internationale. La religion détournée nous impose sa morale mystique mais ses adeptes déviants se gardent bien de la respecter. Tout cela est une très vielle arnaque, la plus ancienne du monde.
Mais l'homme s'y laisse à chaque fois prendre. Pendant des décennies, notre génération avait pensé qu'il ne s'agissait que d'un attrape nigaud pour gens illettrés. On avait oublié que les frustrations transcendaient les classes sociales et que l'instruction n'était qu'un rempart provisoire et bien fragile. Surtout lorsque l'intérêt financier s'y mêle.
Sid Lakhdar Boumédiene
Enseignant
Commentaires (3) | Réagir ?
Est-ce que chez nous, ce n'est pas le populisme qui prévaut ? Ce n'est pas lui qui propulse jusqu'au sommet du pouvoir ? Du populisme crasse qui ratisse jusque dans les bas-fonds, jusque dans extrémisme islamiste en lui adressant son love-bombing de ralliement, en le gratifiant de Môssieur Hattab ou encore en s'y accoquinant par des déclarations scandaleuses comme : "Si j'avais leur âge, j'aurais fait pareil" un populisme rase-mottes qui s'en va ramasser dans tout ce qui a de pire dans la lie et les travers de notre société, l’intégrisme islamiste et ses fanatiques , les intolérances et la xénophobie vis-à-vis d'autrui, les auteurs de violence et d'atrocités contre leur peuple. Un populisme racoleur qui déroule le tapis aux terroristes notoires et chefs des GIA qui ont mis le pays à feu et à sang pendant la décennie 1990. Un populisme ségrégatif et Aryenniste emprunté aux partis fascistes qui lui doivent leur ascension et leur accaparement du pouvoir.
Mais parlons d'abord du populisme arabo-islamiste qui a squatte l'Algerie depuis 62. Ses effets sont devastateurs et ont mene le pays vers la faillite. Les discours de Boumedienne etaient d'un populisme aberrant, base sur la superiorite Arabe dans un pays Amazigh, ceux qui l'ont suivis ont fait autant que lui. Les chameaux ne voient jamais leur bosses (proverbe pourtant arabe)