Nos jeunes sont-ils vraiment fainéants ?
Pourquoi accuse-t-on nos jeunes d'être fainéants ? Pourquoi brise-t-on dès la première phrase prononcée sur les tribunes politiques ou les plateaux-télé leur image, leur génie, leur dynamisme et leur volonté ? Pourquoi nous ne les écoutons pas avant d'en donner des constats négatifs ou les condamner au silence ? Pourquoi ne pouvons-nous pas trouver par nous-mêmes un peu de lucidité afin de valoriser leur rôle dans la construction du pays ? Pourquoi et... pourquoi ?
Et puis, notre société est-elle à ce point si vieillie "mentalement", si retardataire et si conservatrice pour ignorer ce que pourrait lui donner sa frange juvénile en contrepartie de sa considération et de sa reconnaissance ? Il est pour le moins que l'on puisse dire inconcevable de colporter des clichés aussi péjoratifs que nauséabonds sur notre jeunesse, enivrés que nous sommes par une rhétorique démagogique vaseuse, teintée d'une hogra (mépris) à peine dissimulée au seul service du fatalisme et du désespoir. Or, soyons francs, dans la vraie vie, cela ne nous profite à rien. Une moins-value pour notre décollage économique, un frein à la transition démocratique et surtout une lâcheté aux formes tristement caricaturales qu'il s'agisse de la question de la passation du pouvoir à la jeunesse ou simplement de la relève intergénérationnelle ! Il est lamentable de constater aujourd'hui que le jeune Algérien est ramené contre son gré à la fragile position du bouc émissaire sur le dos duquel on casse souvent du sucre.
Or, si l'on regarde bien les choses, tout est d'abord question d'environnement, de conditionnement et d'éducation. Comment ? La réussite fulgurante et l'ostentation éhontée des faux riches issus pour la plupart de cette corruption généralisée n'ont-elles pas par exemple légalisé "un penchant social national" à la paresse et à l'assistanat ? Aucune estime pour l'effort, le savoir ou le sacrifice ! Des qualités qui ne sauvent plus dans notre société actuelle. Si le jeune hésite ou refuse de travailler, c'est parce que la rente et le spectacle de l'argent facile l'en ont découragé. Et s'il veut vraiment s'y mettre, les longs bras de la bureaucratie lui barrent la route. En quelque sorte, ce jeune est prisonnier du jeu malsain de la société, de l'administration et des pouvoirs publics si indifférents à son sort. Lesquels l'obligent en plus à se maintenir pour longtemps dans cette situation si peu avantageuse de «précaire durable». Le point noir qui gâche son autonomie, sa liberté, son indépendance, son épanouissement, etc.
Qu'il soit étudiant, salarié ou chômeur, le jeune souffre du manque d'égards à sa personne en tant qu'acteur de son histoire, son destin et celui de la Nation. Sinon, il n'y a rien qui puisse justifier qu'un Chinois, un Français, un Canadien, un Allemand ou un Américain soient plus actifs, plus entreprenants ou plus engagés que lui. La problématique se pose donc au niveau de la conception que se font nos élites de la jeunesse, de la rente, le travail, le progrès, etc. Une jeunesse certes mécontente et solitaire mais solidaire de sa société. Et à qui il nous suffit de tendre la main pour l'amener à reprendre confiance en elle-même et en son pays.
Kamal Guerroua
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merci pour le partage
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