Mais pourquoi ce fatalisme algérien ?
L'une des premières vertus de l'homme cultivé étant sa simplicité. D'autant que ce dernier tente le plus souvent d'être à l'écoute des siens, voire au-delà de leur réalité immédiate, dépasser les normes rigides de leur existence, et être "a conscience agissante de son peuple".
Par Kamal Guerroua
Alberto Savinio, un des amis italiens du poète français Guillaume Apollinaire (1880-1918) rapporte que l'on appelle ce dernier "l'homme-époque". En ce sens qu'il est "un contemporain positif" qui vit en osmose avec deux mondes, celui de son environnement sociétal et un autre des arts et de "la pensée engagée". En outre, il est cet œil aussi vigilant que scrutateur qui témoigne des remous de son époque et de sa société. A cet effet, il ne s'en remet qu'au jugement de sa fibre artistique pour les décrire, les analyser, les disséquer, les passer au crible de la critique, et enfin, les replacer dans le cours et le contexte de l'histoire. Bref, un poète est une sensibilité active et une force morale "auto-instituante" qu'aucune logique partisane, raciale, sexiste, ethnique, politicienne ou autre ne peut contrer. Cette neutralité lui permet d'ailleurs de prendre du recul par rapport à toutes les manipulations et d'être un faisceau de lumières éclairantes "au-dessus de la mêlée" pour emprunter la terminologie hégélienne. Autrement dit, "une entité spirituelle objective" qui se réserve "généreusement" le droit de porter des constats et parfois des jugements sur ce qu'elle voit. C'est cette foi inébranlable dans l'engagement, la justice, l'humanisme transcendantal et la conviction qui fait, au demeurant, que l'homme cultivé ou l'intellectuel soit désigné dans la langue de Molière par le mot "clerc". Une connotation à la fois religieuse, juridique et humaniste ayant son pesant d’authenticité par les temps qui courent où, malheureusement, une certaine intelligentsia fortement médiatisée, souvent malintentionnée et dénuée de tout scrupule s'accapare le parloir public pour servir de paravent aux marchands du capitalisme sauvage et des oligarchies financières.
Du reste, il est toujours possible, comme il se voit ordinairement dans les pays développés, la réappropriation de l'espace public dans un cadre légal et organisé par des élites engagées, des cadres, des étudiants, des citoyens et un large tissu associatif ancré dans les profondeurs de la société. Le rituel quotidien "Nuits Debout" esquissé dernièrement en Hexagone sur fond d'une vague contestataire d'ampleur nationale donne une forte image de ce que la colère populaire peut engendrer de "mobilisation". D'un minuscule "no man's land" de dialogue et de concertation installé au départ dans la capitale française contre une loi gouvernementale controversée, le mouvement s'élargit vite à toutes les couches sociales pour prendre aujourd'hui des proportions importantes. Somme toute, une plate-forme qui embrasse beaucoup de sensibilités, où les subjectivismes noyés dans l'individualisme égoïste donnent libre cours à leurs impressions, émotions, doléances, plaintes et revendications sans aucune hiérarchie de discours ou de valeurs. Ainsi la majorité muette devient-elle une structure parlante canalisée, expressive et active. La surdité ainsi que le mutisme pérennes d'une société longtemps portée sur la consommation massive et assommée par le diktat des médias se transforment soudain en plaidoyers passionnés sur la place publique pour un autre monde allégé du fardeau de la fatalité, plus soucieux des intérêts des classes défavorisées, tourné vers des réflexions neuves, des élites jeunes, sincères et compétentes, le renouvellement générationnel, la relève, etc.
Seule une société moderne et surtout consciente est, à vrai dire, en mesure de poser les questions déroutantes, dérangeantes et subversives qui contrecarrent «l'hypnose régressive des nations» au moment des crises et pousser, tout compte fait, les gouvernements à agir. En revanche, rien de tel en Algérie de nos jours par exemple où l'agonie de la société civile prolonge, comme par un effet de contagion endémique, celle de la nomenclature politique. Les officiels sont démissionnaires, les partis politiques en phase de désintégration inquiétante et l’intelligentsia aussi atomisée qu'atone comme pour préserver une paix précaire achetée à coups de milliards de dollars d'une rente pétrolière éphémère. Or tout le monde sait que l'alibi irréfutable de la stabilité "autoritaire" n'est, en aucune manière, une justification valable du statu quo actuel. La question ne se présente pas seulement, bien entendu, sous la grille classique du départ ou non du président Bouteflika du palais d'Al-Mouradia mais nous met face à notre responsabilité historique en tant qu'Algériens, acteurs de notre destin et faiseurs de notre avenir. Elle souligne sans doute en filigrane cette réticence qui nous est typique à faire un pas en avant, nous engager dans la lutte sociale pacifique pour changer les choses, dépoussiérer les mœurs désuètes de nos politiques et être constructifs!
Respecter à la lettre le cahier de charges de la citoyenneté est une obligation de premier ordre pour quiconque désirant changer. Et puis, la colonne vertébrale de tous "les récits de la fondation nationale" ne se retrouverait-elle pas amochée, voire détruite si l'on ne faisait pas de la lutte constante contre les dysfonctionnements étatiques un défi? Décidément, la santé de la nation est dans la mobilisation, la résistance et l'engagement. Du coup, tous ceux qui ont cru ou croient encore qu'on pouvait changer les choses, tout en étant les bras croisés en seraient pour leurs frais. Une société qui commence à sentir la rance et la moisissure en son noyau dirigeant a de quoi s'inquiéter. Conscience froissée ; émotion désespérée ; mobilité réduite dans son être et au sommet de sa pyramide ; horizon bouché tout près d'un précipice social en ébullition..., etc. Quel apocalyptique décor pour l'Algérie! "L'eau de l'étang dit à l'eau de la rivière : D'où vient-il que tu sois si pure et si limpide? L'eau de la rivière répondit : c'est parce que je m'écoule". Ce dicton n'est pas fantaisiste. Il illustre ce vers quoi on doit se diriger nous les Algériens : le mouvement. Car la culture du mouvement permet à l’imaginaire collectif d'être vierge de tout joug, se faufiler entre toutes les cultures et les identités, fussent-elles réductrices ou stigmatisantes, se dresser en obstacle contre l'autoritarisme, la hogra et la dictature. Certes, le lien corrélatif entre l'époque et l'intellectuel que j'avais développé en haut y trouvera sa parfaite explication. Il se consolidera aussi dans la dimension intemporelle de ce «dépositaire de l'autorité hégémonique de la culture» qu'est l'intellectuel. Encore serait-il judicieux de rappeler en ce papier que l'hégémonie est cette capacité d’embrasser la totalité des préoccupations de son époque, son peuple, son milieu, sa société... etc. Bien entendu, il y faudrait quelques conditions. Mais, en somme, moins qu'on ne croit si l'on en juge par le capital d'expérience dont est censé disposer celui qui connaît bien les tripes de sa société. Autrement dit, tous les fruits amers des temps des déceptions, des désillusions, la prison pour certains, la retraite, l'exil, la solitude et le recul méditatif de l’intelligentsia doivent être remobilisés pour un nouvel élan sociétal. En ce sens que les archaïsmes du système, les rancœurs délétères de ceux ayant subi la répression, la marginalisation, la vision condescendante, voire patriarcale de nos autocrates (en particulier les femmes) vont devoir être passées au peigne fin de la critique. Ce coup de balai à l'encontre de tout ce qui nous fait mal est nécessaire pour évacuer les haines. C'est une forme de catharsis collective qui nous sauvera du suicide social.
Il ne s'agit nullement ici de revenir sur ce qui aurait été auparavant dit mais juste rappeler l'obligation, à l'heure actuelle, du consensus ou du compromis politique en Algérie afin d'éviter des mauvaises surprises et "des scénarios à la Ceausescu". Un nouveau départ à même d'enclencher une dynamique de révolution pacifique et de rénovation institutionnelle, mentale, morale, éducative, culturelle, etc. Pourquoi ai-je maintenant insisté sur ces concepts de "l'homme-époque", compromis, consensus, etc ? Avant d'aller dans mon argumentation, je rappelle cette phrase du capitaine Burkinabé Thomas Sankara (1949-1987), restée au demeurant vivante dans les annales de l'histoire africaine, lequel dirait en parlant de son pays qu'il est "la synthèse dramatique des malheurs des peuples". Si l'on transpose cet aphorisme dans notre contexte algérien, ce sera inévitablement ainsi "la synthèse dramatique des absurdes des nations" vu notre chute pitoyable dans l'abîme des contradictions et de la bêtise (Khalifa, Khelil, corruption, bureaucratie contre les investissement étrangers, etc.). C'est pourquoi, il nous revient de répondre clairement à cette question du changement qui nous torture depuis longtemps les méninges et qui nous est posée par le temps, l'histoire, le destin, les circonstances et la géopolitique régionale en chamboulement.
Or à l'unisson ou presque, les forces du progrès manquent justement de ces "hommes-époques" et sont prises au piège du combat dispersé sans qu'elles se mettent à la croyance d'une "alternative consensuelle possible". Aucune voix démocratique n'a émergé pour fédérer, rassembler, unir, mobiliser... Toutefois, en face, une constellation hétéroclite de clans et d’intérêts qu'on appelle régime conserve pour elle le bénéfice exclusif du doute et d'incertitude. Le comble, c'est que ni les uns ni les autres n'étant au diapason du cri de détresse de la société ou à l'écoute de ces jeunes paumés, désocialisés, désolidarisés, dépolitisés, sans réelles perspectives, etc. La dictature a rendu, de plus en plus, perméable la frontière entre le légal et l'illicite. Elle a détruit les repères de notre jeunesse, fait du lieu de culte un espace de pratique politique et de la politique une zone morte régie par les mœurs religieuses. Elle a orchestré, qui plus est, des déformations au niveau de la sémantique en usage chez nous : "probité", "intégrité", "citoyenneté", "amour du pays"... signifient désormais pots-de-vin, affaires douteuses, malversation, grand banditisme contre son Etat, rente viagère du pétrole aidant. Ce qui est gravissime et dangereux à plus titre.
Mais pourquoi on en est arrivé là ? Et puis, pourquoi la rumeur et l'intox se sont-elles construit des ailes dans notre ciel alors que nos ministres sont muets, non-communicatifs...., absents ? Enfin, pourquoi grimpent-elles en intensité jusqu'à l'irréparable (je songe ici à la dernière visite de Manuel Valls et son fameux tweet) ? Un engrenage infernal enclenché à dessein au point que plus personne ne peut le bloquer.
K. G.
Commentaires (19) | Réagir ?
Le journal nous aide beaucoup
Les sujets sont précieux et distinctifs
Cheurfa, le village des saints marabouts
A l'entrée, nous apercevons l'imposante zaouia et la mosquée de Sidi Boubekeur, dressée tel un mirador. Le village est entouré de plusieurs cimetières et mausolées, qui chacun d'eux témoigne d'une génération, d'une histoire de ces hommes et femmes qui ont consacré leur existence au dévouement et à la semence de la culture de l'Islam, à travers les quatre coins de la région et même au-delà. C’était au 11e siècle environ, que le premier homme qui s'appelait Djenoun ou Sidi Djenoun, venu de Sakiet El Hamra, s'est installé sur cette terre, et ce en compagnie de ses enfants et de ses petits-enfants. Il habitait, nous dit-on au lieudit actuellement Sidi Saïd, qui se situe dans l'actuelle haute ville de Tigzirt. L'actuelle Cheurfa était habitée à l'époque par la famille Ihadaden, avant de déménager vers Iflissen, à une vingtaine de kilomètres plus loin. Certains attribuent le nom donné à Ouaguenoun, région qui s'étend de l'oued Sebaou jusqu'à Tigzirt au nom de Djenoun, le premier marabout qui s'est installé dans la région. L'installation de ce saint, sur cette terre est motivée par le souci de propager la religion de l'Islam et assister les autochtones dans l'application des dogmes de cette nouvelle religion. Sidi Djenoun a donné naissance à Sidi Amar qui hérite de la mission de son père après que ce dernier mourut. Sidi Amar, lui aussi a été succédé par son fils Sidi Saïd. Sidi Djenoun et Sidi Amar, nous dit-on reposent dans l'enceinte de l'actuelle Zaouia de ce village. Quand à Sidi Saïd, il est probablement enterré dans l'actuelle cimetière qui porte son nom et qui se situe sur les hauteurs de la ville de Tigzirt. Sidi Saïd a donné la vie à Sidi Boubekeur. Ce dernier est le personnage le plus mythique de cette famille de prosélytes et ce dans la mémoire collective des populations de la région;Sidi Boubekeur est succédé par son fils Sidi M'hend Sadi. Ce nom, à ne pas confondre avec celui d'un autre saint qui a fondé une zaouia et qui porte son nom, se situant au cœur de la forêt de Mizrana, à près d'une quinzaine de kilomètres plus loin. Sidi M'hend Sadi de Cheurfa, nous dit-on, repose lui aussi dans l'enceinte de la zaouia. Sidi Boubekeur, bien que cette zaouia porte son nom, ne repose pas dans cette enceinte, mais à plusieurs dizaines de kilomètres de là, exactement à Lemghira dans la localité de Mekla. Là-bas en plus de sa tombe, un mausolée et une mosquée ont été édifiés à la mémoire de ce saint dont le mythe est encore vivace dans les pensées des populations de la région.
Voilà l’architecture immuable de la Kabylie et des kabyles dans leur fonctionnement social ; on aperçoit aisément que ce mode est de type tribal par excellence et de carburant archaïque pour sa pérennité …
__ sidi beloua zaouia Rahmaniya
— Azeffoun : Tifrit n At Lhadj ; Iferhounène ; Sidi Moussa ; Sidi Ali Taghalat.
__ Bouzeguène : Sidi Amer Ouelhadj ; Sidi Ahmed Ben Idriss ; Tifrit Sidi Ahmed Oumalek.
— Boghni : Sidi Ali Ouyahia ; Mohamed Ben Abderrahmane.
— Béni Douala : Akal Aberkane.
— Tizi Ouzou : Sidi Balloua.
— Tigzirt : Sidi Boubekeur
— Azazga : Cheurfa Sidi Bahloul.
— Aïn El Hammam : Sidi Ali Outaleb.
— Maâtka : Sidi Ali Oumoussa.
— Mekla : Sidi Sahnoun ; Tala Mokrane ; Cheikh Amokrane At Zellal.
— Ouaguenoun : Sidi Mansour.
PS :
IL N Y'A PAS DE MODERNITÉ MAIS QUE DE PREUVE DE MODERNITÉ
IL N Y'A PAS DE DÉMOCRATES MAIS QUE DES PREUVES DE DÉMOCRATES
IL N Y’A PAS DE LAÏCITÉ MAIS QUE DE PREUVE DE LAÏCITÉ
IL N Y’A PAS ÉGALITÉ ENTRE LES 2 SEXES MAIS QUE DES PREUVES D’ÉGALITÉS
IL N Y’A PAS DE CITOYENNETÉ PAIS QUE DES PREUVES DE CITOYENNETÉ
IL N Y’A PAS DE CIVILISÉ MAIS QUE DE PREUVES DE CIVILISÉS
LES KABYLES NOUS FOURNISSENT LES PEUVENT DU CONTRAIRE DES AFFIRMATIONS CI DESSUS...
Les soit disant saints que tu evoques n'étaient pas du tout des kabyles ils étaient des arabes qui ont debarqué chez nous pour tenter de nous endormir par l'islam et nous faire oublier qu'ils étaient des colons envahisseurs. Pour finir ils n' ont jamais resussit à nous arabiser ils se sont au contraire kabylisés.
Vous ne tarderez pas à retourner d 'où vous êtes venus à dos de chameau biensure pusisque vous n'arrivez pas à produire même des bicyclettes.
Je te tiens a l'oeil. Touche pas ma culture ma dignité!!
Un fils de bakhta n 'a pas de place sur le sol de Jugurtha
Même si tu nous sort des mots savants, tes commentaires sont vides de sens de consistance et de connaissance.
makan walou fik enta faregh, tu es vide tu exibes ta grammaire française c'est tout.
Il n’y pas d’islamisme, il y a des preuves d’islamisme !
Si ça ce n’est pas des preuves d’islamité, je me rase le maillot !
Justement ! C’est grâce a ses sellah el wakline, que nous fonderont bientôt un émirat kabyle inchallah indépendant de ces koufar d’arabophones qui ne connaissent rien au vrai islam !
C’est d’ailleurs pour ça que notre plus grand penseur et homme politique kabyle a dit : je ne permets à personne de dire qu’il est plus musulman que moi. Les vrais musulmans en Algérie c’est nous les kabyles. Et c’est d’ailleurs pour ça qu’ils ont mis un marabout totalement arabophone et islamophile au RCD pour nous réhabilité l’islam de nos parent.
Dès que Ferhat nous aura tiré les marrons du feu, on sévira !
la Kabylie indépendante totalitaire et musulmane !
Comment va-t-on de ton côté de l’Atlantique ? J’ai bien apprécié tes réponses sur lematin. dz, mais ce matin j’ai essayé de te répondre et je me suis rendu compte qu’ils m’ont banni ! Je ne savais pas que lematin bannissait les gens. En cliquant sur “soumettre” j’ai eu la réponse suivante : « Vous n'avez pas les privileges de poster des commentaires. » Ça me décoit un peu, je dois dire. Ils n’ont pas dû aimer mes observations sur Khellil où je dis qu’il faut être honnête, etc... Enfin, qu’ils aillent au diable. Je voulais juste t’expliquer pourquoi tu ne vois pas de réponse de ma part sur ce journal. Je pourrais évidemment simplement écrire sous un autre pseudo, mais je suis trop dégoûté en ce moment, et en plus j’ai les petits-enfants ce weekend.
J’espère que toi tu vas bien de ton côté.