Les deux pieds, Monsieur le Ministre !
Les deux pieds, Monsieur le Ministre !
La réaction indignée d’internautes, après la condamnation en première instance de six citoyens de Biskra à quatre années de prison ferme pour « non-respect du Ramadhan », accompagnée d’une pathétique question : « Comment en est-on arrivés là, quarante-six ans après l’indépendance », est malheureusement encore plus d’actualité après les propos du ministre des Affaires religieuses, rapportés dernièrement par le quotidien Liberté.
Evoquant les dangers du courant salafiste sur la société, Bouabdallah Ghlamallah a supposé que la véritable intention de cet intégrisme islamiste qui a, durant longtemps, inspiré, justifié et légitimé le terrorisme, serait, selon lui, de « mettre un pied dans l’Etat ». On est tenté de répondre de prime abord à ce ministre de la République que cela s’est sans doute déjà fait et que l’aspiration de la « salafia » est d’avoir plutôt les deux pieds dans l'Etat, encouragée par l’attitude timorée, sinon complice du pouvoir, ou de certains représentants de clans qui en font partie. Bien sûr, les propos « réconciliants » d’un chef de l’Etat mettant sur un pied d’égalité les courants laïc et fondamentaliste au sein de la société algérienne et de les renvoyer dos à dos parce que ni l’un ni l’autre ne conviendrait, selon Abdelaziz Bouteflika, aux Algériens. Cette attitude présidentielle d’absoudre un courant qui n’a pas hésité à user de la violence armée pour tenter de « domestiquer » la société, de la « talibaniser ».
Quant au pouvoir, il y a longtemps que les intégristes y ont mis un pied. Déjà sous l’ère de Chadli Bendjedid, un des prédécesseurs de M. Ghlamallah s’était « fendu » d’une chronique publiée la veille d’un mois de Ramadhan dans l’officieux quotidien El Moudjahid dans laquelle il appelait au crime contre les « apostats que sont tous ceux qui ne respectent pas le mois sacré ». Et à notre éclairé ministre de rappeler que l’apostat est puni de mort, pas moins, pas plus. Fort heureusement, les propos pousse-au-crime du ministre du culte n’ont pas été accompagnés d’effet. Quelques années, un autre ministre des Affaires religieuses, un « repêché » de l’ex-FIS dissous, mais non moins intégriste, n’a rien trouvé de mieux qu’à exhorter les terroristes à ne pas prendre les policiers pour cibles de leurs attentats d’autant plus que ce ne sont pas des communistes...
Aucune réaction officielle, tandis que du côté de l’opposition, on fait le dos rond. La suite, on la connaît malheureusement. De surenchère en surenchère, de compromis en compromissions vis-à-vis de l’intégrisme islamiste – salafiste ou autre –, les régimes qui se sont succédé depuis 20 ans ont par leur attitude, leur pratique quotidienne, en quelque sorte laissé libre cours à la talibanisation du pouvoir qui a progressé de manière inexorable, au point de prendre le caractère inquiétant qu’on lui connaît aujourd’hui.
Tout ou presque participe à renforcer ce climat de suspicion, de chasse aux sorcières dignes des âges farouches. On ne recule devant rien, jusqu’à agiter l’épouvantail d’une soi-disant évangélisation massive, fomentée de l’étranger. Un épouvantail qui semble pour l’instant n’effrayer que ceux qui l’agitent, tant les Algériens dans leur majorité n’y croient pas beaucoup, préoccupés davantage par la persistance des attentats, la dégradation des conditions de vie, des fins de mois difficiles, alors qu’il y a « beaucoup d’argent dans les caisses et dans les coffres du Trésor américain » !
Le plus inquiétant c’est sans doute ce manque d’« ijtihad », de suite dans les idées de la part des milieux religieux officiels quant à apporter une réponse à de telles préoccupations, jusqu’à la violence intégriste rejetée du bout des lèvres par un ministre qui estime que le « djihad entre musulmans n’est pas permis ».
Sans plus, une attitude qui tranche nettement avec la véhémence des propos lorsqu’il s’agit de la soi-disant évangélisation à laquelle on lui prête un caractère de complot, d’entreprise de déstabilisation, menée à partir de l’étranger. En cela et en bien d’autres choses, le ministre est resté fidèle à son Président.
Par Reda Bekkat
Commentaires (49) | Réagir ?
L'islamisme a perdu militairement, c'est clair. Cependant, cet islamisme gagne de jour en jour, politiquement, c'est clair aussi. Pourquoi la population est toujours consideree comme infantile?!!!
comme disait Coluche (pour un autre theme), "Ici on mange pour vous!"
Si le paradis est pour ces gens la, laissez nous au moins une petite survie!!!
Hipocrytes! Corompus! La foie est quelque chose de personnel. C'est pour ca que "islamisme" (de ce siecle! je respect pleinement les pionniers arabes du moyen age!!!) et obscurantisme se confondent.
Mais puisque la mediocrite est a l'ordre du jour, on se permet certain actes. Mefiez aussi de ces petits Napoleons de quartier! Ceci est aussi a l'image de ce qui se passait dans ce meme pays il y a quelques decennies.
Mais je salue le courage de ces 6 citoyens qui ont bravé l'interdiction de manger. Sachez que le ramadhan est la cause principale des hipoglycemie et du diabete dans les pays arabe. Pourquoi les statistiques et les medecin n'ont pas le courage de le dire