"Le mariage de plaisir" de Tahar Ben Jelloun
Depuis le temps, Tahar Ben Jelloun sait nous tresser de belles (parfois tragiques) histoires. Comme" Le Mariage de plaisir", paru chez Gallimard qu’il nous livre de sa plus belle plume.
Ses mots sont si révélateurs des maux qui rongent notre vie quotidienne. Il y a à chaque fois chez Tahar Ben Jelloun une mécanique d’écriture qui détonne, ne s’épuise pas. Bien au contraire se renouvelle au gré des sujets. Dans son roman, il y a de splendides paragraphes. Dans ce dernier roman, il est question des relations des hommes avec les femmes, du racisme entre Africains (basanés et noirs), les rivalités entre femmes, la jalousie, la violence. L’auteur s’interroge comment "la couleur d’une peau détermine à ce point le destin des hommes, pourquoi elle sauve certains, tandis qu’elle envoie d’autre directement en enfer".
Tout commence par le récit d’un conteur. Il est vrai que chez Ben Jelloun, la notion de conteur prend toute sa mesure, il y a toujours de la magie et du mystère dans la voix de ces hommes à la mémoire profonde. Ce conteur donc est un sage qui raconte l’histoire d’Amir, un enfant issu d’une famille de commerçants qui, dit-on, descend du prophète (encore une ?). Bel homme, commerçant de son état à Fès, Amir s’est marié très tôt à Lalla Fatma avec qui il a eu quatre enfants (trois garçons et une fille). Le bonheur, suggèreront certains. Le dernier, Karim, n’était toutefois pas comme les autres enfants. Il était particulièrement vif, néanmoins il avait un peu de retard. Cœur pur comme il n’y en a que rarement, il faisait cependant le bonheur des siens. Karim ne lâchait jamais son père qui l’emmenait partout. Un jour il l’emmène au Sénégal où Amir se rendait plusieurs fois par an pour ses affaires commerciales. Sous le soleil de ce pays, Amir avait rencontré Nabou, une ravissante Peule d’un mètre 80 avec qui il avait contracté un mariage de plaisir. L’islam lui permet ce mariage à durée déterminée puisqu’il est en voyage. Et à chacun de ses voyages donc, il l’a retrouvait.
Cette belle peule à la peau noir d’ébène faisait vibrer Amir. Il en était fou. Un jour Amir a décidé de la ramener avec lui au Maroc auprès de sa première épouse et ses enfants. C’est là que tout se gâte. Que l’histoire s’ébranle. Pour la jeune Peule c’est la descente aux enfers. Personne ne voulait de cette Sénégalaise. Lalla Fadma et ses enfants lui rendaient la vie impossible. La vie de seconde épouse vire au cauchemar. Seul Karim au grand cœur se refusait de lui faire le moindre mal. L’ambiance dans la famille était devenue irrespirable. Insupportable, surtout pour Nabou. Laquelle avait tenu bon et a accouché de jumeaux. Un blanc et un noir. L’histoire de ces deux enfants était comme écrite sur la couleur de leur peau. Dans une société rétrograde, conservateur qui n’admet pas la différence, leur destin était inévitable. Si le blanc s’en tire, Salim à la peau noir sera victime comme sa mère de la couleur de sa peau.
"Le mariage du plaisir" est un voyage dans les pratiques de la société d’hier tout en nous rappelant que celles-ci perdurent aujourd’hui. Le mépris de l’autre, le racisme, le jugement de son prochain sur la simple couleur de sa peau…
Kassia G. A.
"Le mariage de plaisir", roman de Tahar Ben Jelloun aux Editions Gallimard
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merci bien pour les informations