Séisme au sommet de l’Etat : l’Algérie retient son souffle
Le congédiement ou la mise à la retraite des meilleurs membres du service de renseignement algérien laisse la porte ouverte à une deuxième décente aux enfers de la population de ce pays pour préserver les intérêts du clan Bouteflika au pouvoir.
La situation économique et politique se détériore présentement à grande vitesse en Algérie. La destruction systématique des mécanismes de protection de la population ne présage rien de bon, tant pour l’avenir du pays que pour la paix sociale. Le monde de l’espionnage bouillonne en Algérie. Dans cette industrie, quand il y a un doute, c’est qu’il n’y a pas de doute. Le clan Bouteflika tente actuellement désespérément de reprendre le contrôle d’une situation qui lui échappe.
L’arrestation le 27 août de l’ancien chef des services de renseignements, Abdelkader Aït-Ouarab dit le général Hassan, qui a été jusqu’à fin 2013 à la tête du service de coordination opérationnelle et de renseignement antiterroriste (Scorat) est un indicateur clair que le gouvernement est en crise. Cette arrestation vient se rajouter à la purge qui a été précédemment effectuée à la tête de plusieurs services de sécurité et la perte de prérogatives pour le DRS cette dernière année. Après le retour du chef de l’État de son séjour médical à Paris à l’été 2013, le puissant colonel Faouzi, directeur de l’information du DRS a été limogée et le directeur de la Sécurité intérieure, le général Bachir Tartag, démis de ses fonctions.
C’est une destruction à grande échelle d’actifs de l’État algérien. Le Service de l’Intelligence économique (SIE) qui dépendait du Département des renseignements et de la sécurité a été dissout par décret présidentiel. Un nombre important d’officiers de renseignement et de sécurité ont aussi été mis prématurément à la retraite. En une année, le DRS aura perdu la sécurité de la présidence, de l’armée et le pouvoir de police judiciaire, qui lui a permis dans le passé de faire des enquêtes sur des affaires de corruption. Le signal envoyé est clair. Le clan au pouvoir a peur d’en être évincé et élimine toute opposition qui peut le faire.
La réactivation de Madani Mezrag par Bouteflika qui l’a rencontré en personne va dans la même ligne de pensée. Il faut se rappeler que le président et le DRS ont évité à cet islamiste de subir le sort qu’il a imposé à beaucoup d’Algériens dans les années 90. L’homme est donc débiteur du clan au pouvoir et un très bon épouvantail pour apeurer les Algériens qui voudraient insuffler un peu de démocratie dans ce gouvernement qui ne tient en place que par le népotisme et la corruption. On voit donc l'ancien chef de l'AIS, comploté publiquement pour enfreindre ses devoirs face à la Charte pour la paix et la réconciliation nationale en créant un parti politique.
Il y a aussi une raison pour laquelle cette situation se produit maintenant. En 15 ans Bouteflika n'a pas été capable de mettre en place une économie productrice de richesse. L’Algérie est au cœur de la crise économique. Elle a fermé l'entrée des capitaux et empêché l'endettement extérieur des acteurs entrants en les obligeant à se financer sur le marché domestique. La politique des quotas érigée en instrument de gestion du pouvoir politique depuis 1999 fait de plus primer l’appartenance au clan sur la compétence ou la formation. La conséquence est qu'une grande partie des leviers de la diversification industrielle recherchée aujourd'hui n’existent pas. L’incompétence de Bouteflika a fait régresser le pays. Il est significatif que la peste éradiquée avant son arrivée au pouvoir soit réapparue sous son régime. Maintenant que le prix du baril de pétrole est de moins de la moitié qu’il était il y a deux ans, ce pays mono industriel gouverné sur une base de corruption se retrouve au bord du précipice.
Cette situation commence donc a engendré des tensions sociales et cela ne fait que commencer. Le pouvoir d'achat est déjà touché par la chute de 35 % du dinar. La réduction prévue des dépenses publiques de près de 9 % en 2016 entravera les programmes de logements sociaux et de recrutements en plus de toucher les salaires des travailleurs. Pour réduire la facture d’importation, le niveau des engagements extérieurs par signature d’une banque ne doit pas dépasser une fois ses fonds propres depuis le 1er août. Cela limitera l’accès aux crédits bancaires pour les importateurs qui auront plus de difficultés à y accéder ce qui conduira plusieurs petites entreprises algériennes à la faillite. Tout cela se fait alors que l’accélération des réformes économiques devient plus que nécessaire.
Bien qu’il tente de s’attirer les faveurs de l'Organisation de la coopération islamique (OCI), de l’Iran et de la Chine en ce temps de grand danger, le clan Bouteflika sait bien qu’il aura des problèmes a sécurisé un prêt important. Si la Chine est le premier fournisseur de l'Algérie et son 10e client depuis 2013, elle est affaiblie depuis l’éclatement de sa bulle spéculative en bourse. L’extension des relations bilatérales entre Alger et Téhéran peut, pour sa part, renforcer les principes que défendent les deux pays sur la scène internationale. Cet allier avec des ambitions nucléaires pourrait cependant être d’ici peu de temps beaucoup plus embarrassant qu’utile.
De plus, après la présidentielle de 2014 l’oligarchie au pouvoir a resserré sa mainmise sur l’économie du pays, nommé des ministres, des walis et des chefs de Daïra. Elle tire sa richesse de l'opacité du système financier algérien et ne tient absolument pas à la changer pour supporter les conditions que les bailleurs de fonds vont exiger pour soutenir l'Algérie. Le gouvernement n’est même pas capable d’accepter les règles l’Organisation mondiale du commerce qui gère pourtant 97 % des échanges commerciaux sur la planète ! Le secrétaire général de l’OCI, Iyad Amin Madani, devra établir des contrats en béton pour ne pas perdre des sommes astronomiques aux mains du Président de la République qui est actuellement la cause principale du gouffre financier de son pays qui va sans cesse grandissant.
Il n’est donc pas surprenant de voir les Français demander des informations au gouvernement algérien sur sa situation. La diplomatie algérienne vient de faire deux visites dans le pays de Molière en l'espace d'un mois. Pendant la dernière en date, Ramtane Lamamra a été appelé en France le 6 septembre par son homologue, Laurent Fabius, qui s’inquiète pour les intérêts de son pays. En éliminant la tête du renseignement algérien en ces temps de fortes tensions sociales, Bouteflika met non seulement son pays en danger, mais fait un énorme trou dans la défense de l’Europe. Ajoutez à cela que chacun des migrants qui se lancent actuellement à l’assaut du vieux continent pour fuir les combats en Syrie est un terroriste potentiel et on peut facilement comprendre l’inquiétude de l’État français. De plus, la visite en Algérie du 8 au 11 septembre du président républicain du sénat français, Gérard Larcher, qui vient préparer la campagne électorale de Nicolas Sarkozy en 2017 augmente la dangerosité de la situation. Rien ne ferait plus plaisir à l’ancien chef d’État que de voir François Hollande perdre le contrôle des extrémistes sur le territoire français.
Michel Gourd
Commentaires (4) | Réagir ?
Vous avez perdu !!
Place aux gens honnetes.
quelques fois votre imagination est très débordante !!! et elle voue joue des tours !!!