Le bal insipide des visites ministérielles a de beaux jours devant lui !
Depuis des lustres, les visites ministérielles à l’intérieur du pays se succèdent, se ressemblent et manquent d’intérêt pour le citoyen sceptique, qui ne voit que du folklore inutile et des attitudes déplorables.
La venue d’un ministre est annoncée à l’avance, on prépare les lieux et on chronomètre le parcours. On cire l’asphalte, on nettoie les écuries, on badigeonne les murs, on peint les bordures des trottoirs, on étend les banderoles et les guirlandes et on dresse le chapiteau. Le jour «j», le comité d’accueil est trié parmi les «notables» (un terme fourre-tout), on étale les tapis, puis vient le cortège de voitures des officiels et de sécurité, les gyrophares tournent et les klaxons strident, les médias et la presse conviés, on fait ramener les crieuses de youyous et la fantasia, les qarqabous, les danseuses du ventre, les mannequins en «Chedda tlemcenienne», les filles d’honneur avec le tbaq de dattes, les souffleurs de cornemuse et de ghaita, les timbales et les gallals entonnent. On offre le burnous en poil de dromadaire, le Hayek tlemcenien de soie et autres présents. On coupe le ruban d’inauguration, on arrose l’hôte de pluie de confettis. Tout cela pour l’impressionner et avoir ces faveurs et sa bénédiction. Les fous aiment amuser les rois et la galerie. Sous la khaïma l'essentiel se dissout dans l'accessoire, jusqu'à ce qu'il ne reste rien, tout se dilue dans les panses: le méchoui et autres plats et mets, le thé à la menthe et les fruits secs, les gâteaux traditionnels et le sfouf à la cannelle et au rayeb,...
Les têtes grisées et ivres de joie, satisfaits des artifices louant la providence, parce que nul parmi eux n'est payeur. L'arroseur comme l'arrosé, sont dans une symbiose curieuse. Comment devient-on arrosé puisque on n'a pas encore séché de la pluie d'hier, c'est l'insatiabilité propre au genre. L'arroseur dans sa logique, il sème pour récolter et se faire fructifier. Et l’arrosé, savoure son pouvoir ?! Au fait, quelle a été l'affiche de la comédie ou plutôt la tragédie ?! Personne ne le sait, seuls les dupes pensent le savoir, tout le monde a oublié. Reste quand même, la pièce qui était tellement intéressante qu'elle sera nominée aux Molières, elle aura le prix de la meilleure mise en scène, de la réalisation, des seconds rôles, du meilleur acteur et de la meilleure actrice. Le public a eu pour son fric, et la pièce passera sur les écrans du jour (Ennahar) comme ceux du levant (Echourouk), l'orpheline (ENTV) n'est plus seule. Ainsi le monde désargenté aura l'occasion de la voir à ses frais.
Quand cessera ce théâtre qui devient à la longue lassant et de mauvais goût ? Des ministres «se font mener en bateaux» sous l’œil amusé d’une population qui n’est plus naïve et sait que, des projets attendent la semaine des quatre jeudis pour se concrétiser, des budgets jamais totalement consommés, des routes en piteux état, la crise de logement est réelle, des hôpitaux datent d’avant 1962, les classes sont surchargées, le chômage est endémique, les marchés sont sales et non contrôlés, l’internet est englué dans ses câbles tissés en toile d’araignée, l’anarchie bureaucratique est contraignante, des lieux et des passages publics sont squattés, la mal-vie et le manque de moyens de distraction et villégiature les étouffent, les routes tuent, la circulation est anarchique etc.. Comment des responsables de wilaya qui ne sont pas en mesure de réaliser 50 % des projets inscrits dans le programme de l’exercice budgétaire annuel, sont reconduits et confirmés à leurs postes ? Le problème de développement du pays n’est pas dû au manque de moyens qui, au contraire sont considérables, mais à la gestion des deniers publics et leur concrétisation en infrastructures et services qui facilitent la vie quotidienne des citoyens.
Ahmed Farrah
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