À vous démocrates, patriotes, progressistes et humanistes
Je souhaite m’adresser à ce que ce pays compte encore de militants progressistes, de patriotes et d’humanistes. Alors que des innocents croupissent en prison, votre silence assourdissant recouvre l’arbitraire d’un épais voile avilissant. On aurait pu croire que l’étude critique de l’attitude du pouvoir devant le printemps amazigh de 1980 aurait empêché la plupart d’entre vous de trébucher, mais il semble que vos mémoires soient oublieuses.
En 1980, pour justifier la répression contre un mouvement populaire, le régime avait servi les fables de la manipulation étrangère, de l’inféodation à l’étranger, du complot impérialiste et que sais-je encore ? Trente-cinq ans plus tard, l’encadrement politique issu du printemps amazigh compte toujours parmi les plus sûres valeurs du camp patriotique, des défenseurs de la République et de la démocratie.
Entre-temps le pouvoir a remisé ses alibis socialistes, tombé le masque de sa patriotardise et dévoile peu à peu l’imbrication de ses intérêts avec ceux de l’islamisme. Ce qui ne l’empêche pas, une nouvelle fois, de reprendre la même rengaine populiste pour justifier que sa main de fer écrase des citoyens dont le seul tort est de chercher à se défendre face à une violence qui, au minimum, bénéficie d’une complicité passive de l’État lui-même.
Vous vous interrogez tous sur la persistance de la crise du M'zab, les plus hardis d’entre vous osent même des interrogations sur le rôle de l’Etat. Mais il semble que vos problèmes de mémoire vous "incapacitent" lorsqu’il s’agit de trouver des réponses.
Souvenez-vous que, le 14 juin 2001, ce régime avait soulevé au cœur même de la capitale des hordes arabo-islamiques pour, disaient-ils (les hordes et le pouvoir) renvoyer les Kabyles chez eux. Et,"ils s’en retournèrent d’où ils sont venus", concluait ce macabre journal télévisé de la télévision d’Etat ! Vous vous étonnez alors que, dans la vallée du M 'zab, des "Arabes" se croient investis d’une mission sacrée de purification ?
Vous vous en remettez à l’autorité, civile ou militaire, pour rétablir l’ordre. Mais quel ordre ? Celui d’un wali qui pense qu’un Z amazigh estampé sur un mur équivaut aux professions djihadistes de Daeech ? C’est à cet ordre-là que vous vous en remettez ? À celui du général major commandant de la région militaire qui pense que se dire "arabe" est républicain, mais se dire amazigh en est l’antinomie. Un militaire brut de coffrage qui traite des citoyens d’énergumènes au prétexte de leurs opinions ?
En 1985, des citoyens, dont l’engagement patriotique et républicain est aujourd’hui reconnu de tous, s’étaient retrouvés devant la Cour de sureté de l’Etat. Accusés d’attenter à la sûreté, à la stabilité et peut-être l’existence même de l’Etat. Trente ans plus tard des citoyens sont replongés dans ce cauchemar. Et par qui ? Par un régime qui applaudit à la présence française dans le Sahel. "Remerciez le président Hollande pour ce qu’il fait" ! disait la voix de ce "président" patriotard devant l’éternel. Vous ne faites pas le lien entre la cécité des capitales occidentales sur le manifeste despotisme du régime algérien et les largesses économiques que ce dernier concède à tour de bras ?
Progressistes, patriotes, libéraux, que vous vous dites, après le troisième mandat, après le quatrième, vous pouvez encore considérer ce régime comme capable d’une approche authentiquement nationale ? Après toutes les révélations sur leurs acquisitions à l’étranger ?
C’est échaudés par ce régime que des pans du camp démocratique versent dans solutions de repli. C’est en désespoir de cause qu’ils s’affirment autonomistes, indépendantistes,… En tout état de cause ils ont raison sur un point : ce régime est le danger qui menace l’Algérie et qui travaille à sa perte. S’ils se trompent sur la perspective qu’ils entrevoient, cela vaut toujours mieux que de se tromper sur la nature du régime et la dangerosité de ses desseins.
Réveillez-vous ! Ce qui peut être attendu de militants qui ont vos idéaux, c’est l’expression de positions de principes, c’est la condamnation de l’arbitraire et de la répression. La divergence ne dispense pas de la solidarité.
Le tort de l’"énergumène"». Kameleddine Fekhar est d’assumer sa citoyenneté alors que la tradition des siens est de l’abdiquer dans l’espoir de faire oublier leur particularisme. Fekhar n’a agressé personne, n’a prôné l’agression contre personne. C’est en désespoir de cause qu’il s’est adressé au secrétaire général de l’ONU. Vous savez tous qu’il ne suffit pas d’appeler "l’ONU" pour qu’elle vienne, les questions sont bien plus complexes que cela. Alors prendre prétexte sur cet appel pour jeter en prison des dizaines de citoyens est inacceptable. Et, se cacher derrière ce prétexte pour se soustraire à un devoir de solidarité est irrecevable.
Plutôt que de donner un blanc-seing à ses geôliers, interrogez-vous sur l’irresponsabilité de l’implantation de communautés de repentis dans la vallée du M’zab. Sur le déséquilibre que les recrutements locaux ont créé dans les effectifs de police et de gendarmerie. Sur la tolérance et même l’encouragement à l’égard de la prolifération du discours islamiste à Ghardaïa et ses environs. Enfin, sur le sens et la résonance de ce cri bestial "Irhal" jeté au visage des héritiers de l’Etat Rostomide. "Irhal"» le Zenète ! "Irhal", l’Amazigh ! Irhal l’Algérien ! L’"Arabe", le Saoudien veut faire place nette.
Mohand Bakir
Commentaires (2) | Réagir ?
Da Lmouloud Nath Maamar
Quand trop de sécheresse brûle les cœurs,
Quand la faim tord trop d'entrailles,
Quand on rentre trop de larmes,
Quand on bâillonne trop de rêves,
C'est comme quand on ajoute bois dur bois sur le bûcher,
À la fin, il suffit du bout de bois d'un esclave,
Pour faire,
Dans le ciel de dieu,
Et dans le coeur des hommes
Le plus énorme incendie
M. mameri