Accord trouvé sur un plan de sortie de crise pour la Grèce
Les dirigeants de la zone euro ont conclu lundi un accord unanime sur un plan de sortie de crise qui permet de maintenir la Grèce dans l'union monétaire, au prix pour Athènes de la perte d'une partie de sa souveraineté et d'une nouvelle cure d'austérité.
Après une nuit blanche pour les chefs d'Etat et de gouvernement, un accord de principe a été arraché au petit matin qui "permet à la Grèce de rester dans la zone euro", s'est félicité le président français François Hollande en saluant un "accord historique".
Alexis Tsipras, le Premier ministre grec, s'est dit lui aussi satisfait de l'accord qui l'oblige pourtant à ravaler ses promesses électorales et risque de faire imploser son gouvernement du fait de l'hostilité de certains ministres.
"Clairement l'Europe de l'austérité l'a emporté", a ainsi déclaré le ministre des Réformes Georges Katrougalos à la radio BBC. "Soit nous allons accepter ces mesures draconiennes, soit c'est la mort subite de notre économie du fait de la non-réouverture des banques. C'est donc un accord qui nous est pour ainsi dire imposé". Les banques grecques, fermées depuis le 29 juin, devraient rouvrir jeudi, ont dit des sources bancaires à l'issue d'une réunion au ministère des Finances à Athènes.
Après cinq mois d'âpres négociations qui ont failli dégénérer à la réunion de l'Eurogroupe ayant précédé le sommet de dimanche à Bruxelles, un échec aurait acculé Athènes à la faillite et plongé la zone euro dans l'inconnu. "L'accord a été laborieux mais il a été conclu. Il n'y a pas de Grexit", a annoncé le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, à l'issue des 17 heures de tractations.
Il a nié que Tsipras ait été humilié même si le communiqué final insiste à plusieurs reprises sur la surveillance dont feront l'objet les mesures grecques. "Dans ce compromis, il n'y a pas de gagnant et de perdant", a dit Juncker. "Je ne pense pas que le peuple grec ait été humilié, ni que les autres Européens aient perdu la face." Tsipras lui-même, élu il y a à peine six mois sur la promesse d'en finir avec cinq années d'austérité, a dit avoir mené une "dure bataille" et réussi à faire échec à "un plan d'étranglement financier."
A condition de mettre en œuvre des réformes douloureuses, Athènes a obtenu l'ouverture prochaine de négociations sur un nouveau plan d'aide de 86 milliards d'euros sur trois ans qui lui serait octroyé par le Mécanisme européen de stabilité (MES).
Dans l'intervalle, le gouvernement peut espérer un prêt-relais pour honorer les échéances immédiates de sa dette, notamment un prêt de 3,5 milliards d'euros à rembourser le 20 juillet à la Banque centrale européenne (BCE).
Pour débloquer l'ouverture de négociations sur un troisième plan d'aide en cinq ans, les députés grecs devront se prononcer d'ici mercredi sur une série de réformes, notamment la hausse de la TVA et la réforme des retraites. L'accord devra ensuite être avalisé par d'autres parlements nationaux de la zone euro, notamment le Bundestag allemand vendredi.
La chancelière allemande Angela Merkel a dit qu'elle recommanderait aux députés d'autoriser l'ouverture des négociations si d'ici là la Vouli, le Parlement grec, a approuvé l'accord et adopté les premières mesures du programme.
Face aux critiques, les lieutenants d'Angela Merkel ont présenté le compromis comme une victoire pour la zone euro. "L'Europe a gagné", a twitté Peter Altmaier, le directeur de cabinet de la chancelière, ajoutant que "l'Allemagne a participé à trouver la solution du début à la fin".
François Hollande, soucieux d'insister sur la solidité du couple franco-allemand pourtant mis à rude épreuve, a souligné de son côté que "l'intérêt général" de l'Europe avait primé et ajouté que chacun avait manifesté une "volonté de compromis jusqu'au bout".
Les Grecs, eux, ont accueilli la nouvelle de l'accord avec des sentiments contrastés, où se mêlent le soulagement et un fort ressentiment, dirigé avant tout contre l'Allemagne qui avait pendant le week-end évoqué une sortie temporaire de la Grèce de l'euro. "C'est une forme de victoire, mais une victoire à la Pyrrhus car ces mesures sont très strictes", se désolait Marianna, une Athénienne de 73 ans. "Les Grecs ont souffert ces cinq dernières années et ce n'est pas fini."
LE RÉÉCHELONNEMENT ENTÉRINÉ
Priée de dire si les conditions draconiennes imposées à Athènes pouvaient rappeler le Traité de Versailles imposé à l'Allemagne en 1919, Angela Merkel a répondu : "Je ne suis pas adepte des comparaisons historiques, surtout quand je ne les fais pas moi-même."
Elle a ajouté que la détérioration de l'économie grecque depuis la victoire du parti Syriza en janvier, et tout particulièrement au cours des deux dernières semaines, avait fortement accru les besoins en financement du pays.
Un responsable européen a calculé que la crise politique et économique avait coûté entre 25 et 30 milliards d'euros au gouvernement grec. Un diplomate communautaire a de son côté avancé le chiffre de 50 milliards d'euros.
Alexis Tsipras, qui va aussi devoir réduire les dépenses publiques et libéraliser le marché du travail, a cependant réussi à éviter, avec le soutien de la France, qu'un fonds regroupant des actifs publics grecs destinés à être privatisés soit domicilié au Luxembourg.
Ce fonds, ont précisé plusieurs dirigeants, permettra de rembourser la dette à mesure que les actifs seront cédés. La moitié de sa valeur, soit 25 milliards d'euros, servira aussi à la recapitalisation des banques grecques.
La question du rééchelonnement d'une partie de sa dette, qui représente 175% du produit intérieur brut (PIB) du pays, a aussi été entérinée par François Hollande qui a évoqué un allongement des maturités des prêts et des aménagements sur les intérêts.
L'aménagement de la dette suscitait de fortes réticences dans certains pays comme l'Allemagne mais constitue le principal argument d'Alexis Tsipras pour faire accepter par ses compatriotes les nouvelles mesures d'austérité. Il pourra aussi faire valoir un programme d'investissement de 35 milliards d'euros par l'intermédiaire du plan Juncker.
Reuters
Commentaires (3) | Réagir ?
Accord sur une sortie de crise, c'est bien un grand mot, c'est plutôt un accord trouvé pour enfoncer un peu plus l'Europe qu'autre chose.
C'est une abération que de demander aux grecs d'être aussi compétitifs que des allemands !!! les sociétés de l'europe du nord sont aux antipodes de celles de l'europe du sud !!! leurs modes de vie aussi !!! ce sont des sociétés différentes !!!