L'indépendance et la fumée de l'encens
L'anniversaire de notre indépendance est passé et tout est terminé comme nos gloires qui se conjuguent toujours au passé avec notre personnalité effacée et notre espoir dont le dossier est classé à jamais.
À l'occasion de cet anniversaire, qu'aurais-je pu faire ou dire ? Crier ma colère ? Me taire comme mes frères ? Ou applaudir comme les actionnaires de la rente pétrolière ?
Au fait, pourquoi parler du cinq juillet ? Y a-t-il encore une seule chose qui luit dans ce pays ? Les cerveaux l'ont fui, le jour est troqué contre la nuit, le misérable creuse au font du puits, le traitre jouit de la belle vie, le cœur du droit est cuit par ce qu'il subit et le fruit de ce juillet est dans la bouche du maudit.
À quoi sert-il de parler de l'indépendance en absence de ceux qui pensent ? Le pays est ruiné, la fumée de l'encens remplace le bon sens et devient l'espérance. Le peuple s'est transformé en agneau doux et peureux devant les frileux qui craquent leurs dents. Par la misère et la souffrance le sans sou se met à genoux et accepte les coups ou rejoins les cons pour imposer leurs règles à ses semblables miséreux ou adhère aux fous de Dieu qui règnent par le sang et le feu.
Parler des chouhada, qui ont sacrifié ce qu'ils avaient de plus cher ici-bas ? Ou faire un pèlerinage à Oujda et crier : À bat le prolétariat et vivent les caïds et les parrains qui ont méprisé le peuple d'en bas après avoir séquestré les ossements du lion du Djurdjura, Amirouche Aït Hamouda ? Ces fans de Gamal qui ont pendu Abane. Ces maîtres du crime qui ont assassiné Krim. Ces loups qui ont abattu Chabou. Ces charognards qui nous ont tout pris ont explosé la tête de Ahmed Medeghri. Comme je ne peux guère citer tous les assassinés, je conclus par l'affaire Ali Mecili éliminé en plein Paris et si Tayeb El Watani qu'ils ont exécuté en direct à la télé pour nous défier par le message : "voici le sort réservé pour ceux qui osent nous défier pour sauver la patrie".
Si je parle de la Kabylie, la liste sera longue, alors je me contente d'un court épilogue en commençant par la négation de sa langue ainsi que leurs idéologues et leurs misologues qui lui imposent sans dialogue leur mortelle drogue. Ces Terminators qui ne viennent guère du futur, mais des années de la peste, de la guerre et de la mort pour faire taire et anéantir l'identité millénaire et arracher 128 impubères des bras de leurs pères et de leurs mères avec un mépris amer comme s'ils étaient engloutis par la mer. Ces lâches qui lâchent leurs chiens poilus venant d'une ère révolue avec leur haleine qui pue et les dents pointues pour lui imposer leur salut qui tue.
Saluer l'Algérie libérée ? J'ai envie de me soûler pour ne pas voir la vérité. Oui, je veux m'enivrer avec du vin ou du divin.
Si je choisis l'eau-de-vie, j'échapperai à la réalité et je vivrai dans le monde calme de Kheyyam ou je prends place dans celui de Nouas. Le temps de l'ivresse, je le vivrai sans stress, je ne virai plus tous les complots qui se tissent et ceux qui nous poussent au précipice.
Si je choisis le divin, je prendrai les hommes pour des ovins et des bovins que je sacrifierai pour qu'ils m'ouvrent le chemin vers l'éternel. Là-haut, j'aurai mon château et mes houris dont je ne rêve même pas dans mon Algérie. Je serai un soldat fort qui se vengera de tous les torts que l'on m'a inculqués à l'école et je vomirai ce venin sur les êtres humains pour oublier les nains qui m'ont imposé ce malheureux destin.
Je crois que j'ai trop dit, je me réfugie dans une taverne ou en dans une mosquée et je suis en paix. Un morceau de pain, une bouteille de vin, un rêve divin et je laisse la patrie festin aux chiens.
Rachid Mouaci
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