Abdelmalek Sellal acculé par la baisse des cours du pétrole
Suite à la baisse du cours des hydrocarbures avec les risque de répercussions sur la sécurité nationale, le Premier ministre Abdelmalek Sellal devrait présider une importante réunion avec les responsables du secteur de l’Energie, renvoyant à l’urgence d’un nouveau management stratégique de Sonatrach.
La situation actuelle rend de plus en plus urgent le management stratégique et une transparence de la gestion de Sonatrach devant reposer pour toute démarche scientifique et opératoire du général au particulier, afin de saisir les interactions et pouvoir procéder à des actions par touches successives (1).
1.- Quelle est l’organisation actuelle de Sonatrach ? Créée le 31 décembre 1963, la Sonatrach a vu ses statuts modifiés à trois reprises par décrets présidentiels, dont le dernier a été pris le 11 février 1998 avec pour souci de mettre en adéquation les statuts de la Sonatrach (sociétés par actions) suite à la création, en avril 1995, du Conseil national de l'énergie. Le chapitre III du décret du 11 février 1998 consacré à «l'organisation et au fonctionnement des organes» la dote de trois organes : l'assemblée générale, le conseil d'administration et l'exécutif. Par ailleurs, un décret présidentiel en date du 13 septembre 2000 apporte une légère modification au décret portant statuts de la Sonatrach, concernant exclusivement les aliénas 2 et 5 de l'article 11, qui stipule que «les vice-présidents et les directeurs généraux adjoints sont nommés par décret présidentiel» au même titre que le président-directeur général de la compagnie. Au niveau des prérogatives, ce n'est plus à Sonatrach d'octroyer les périmètres d'exploitation selon la nouvelle loi sur les hydrocarbures du 28 avril 2005 amendée par l'ordonnance du 29 juillet 2006 mais à une agence dépendante du ministère de l'Energie Alnaft, entretenant donc des relations fonctionnelles avec cette structure autant qu'avec une autre agence, l'autorité de régulation chargée de suivre les mécanismes des prix.
La nouvelle loi a fixé à au moins 51% la part de Sonatrach sur les périmètres octroyés par Alnaft et moins de 49% aux compagnies pétrolières. En nous tenant à l'organisation actuelle du secteur des hydrocarbures, il y a lieu de distinguer plusieurs structures opérationnelles. Le Conseil national de l'énergie qui a été créé par décret présidentiel le 19 avril 1995, qui dans son article 6 stipule que «le Conseil se réunit périodiquement sur convocation de son président», le président de la République dont le secrétariat (article 5) est assuré par le ministre de l'Energie et composé des ministres dits de souveraineté (Défense nationale, Affaires étrangères, Energie et Finances), du gouverneur de la Banque d'Algérie et du délégué à la planification.
L'article 6 stipule que "le Conseil national de l'énergie est chargé d'assurer le suivi et l'évaluation de la politique énergétique nationale à long terme, notamment de la mise en œuvre d'un plan à long terme destiné à garantir l'avenir énergétique du pays; d'un modèle de consommation énergétique en fonction des ressources énergétiques nationales, des engagements extérieurs et des objectifs stratégiques à long terme du pays ; de la préservation des réserves stratégiques du pays en matière d'énergie; des stratégies à long terme de renouvellement et de développement des réserves nationales en hydrocarbures et leur valorisation ; de l'introduction et du développement des énergies renouvelables ; des schémas d'alliances stratégiques avec les partenaires étrangers intervenant dans le secteur de l'énergie et des engagements commerciaux à long terme». Nous avons l'Assemblée générale composée du ministre de l'Energie et des Mines -du ministre des Finances - du gouverneur de la Banque d'Algérie - du délégué à la Planification - d'un représentant de la présidence de la République. L'article 9.3 précise que l'assemblée générale est tenue de se réunir «au moins deux fois par an en session ordinaire» et en «session extraordinaire à l'initiative de son président ou à la demande d'au moins trois de ses membres, du ou des commissaires aux comptes ou du président-directeur général de la Sonatrach". Au terme de chaque session, l'assemblée générale est tenue d'adresser son rapport au président du Conseil national de l'énergie qui est le président de la République. Vinet suite le Le Conseil d'administration-Il est composé du président-directeur général de Sonatrach - du président-directeur général de Sonelgaz - du vice-président Amont - du vice-président Aval - du vice-président transport par canalisation - du vice-président de la commercialisation - du directeur général des hydrocarbures du Ministère - un autre représentant du Ministère - de deux représentants du syndicat de Sonatrach. Enfin le Comité exécutif qui est composé qui est la véritable cheville ouvrière de Sonatrach du président-directeur général de Sonatrach - du secrétaire général de Sonatrach - des vice-présidents Amont, Aval, canalisation et commercialisation - du directeur exécutif des finances - du directeur exécutif des ressources humaines - du directeur exécutif des activités centrales (DAG) - du directeur stratégie, planification- économie- du directeur exécutif santé, sécurité, environnement. Des holdings sont annexés aux vice-présidents dont pour l'amont il lui est rattaché le holding services pétroliers et parapétroliers, pour l'aval, le holding raffinage, chimie hydrocarbures (exemple Naftec), pour le transport il lui est rattaché canalisation le holding et participation et enfin pour la commercialisation le holding Sonatrach, il lui est rattaché le holding Sonatrach/valorisation des hydrocarbures (exemple Naftal). Au niveau international, le Groupe Sonatrach a mis en place un système de réorganisation de ses activités par le regroupement des compagnies filiales à l'étranger autour d'un Holding international (S.I.H.C) qui opère actuellement dans différents pays tels que le Yémen, Pérou, Venezuela et Espagne et dans plusieurs pays d'Afrique notamment en Libye et Niger. C'est une organisation qui combine à la fois l'organisation hiérarchique et l'organisation divisionnelle ce qui ne lui acquiert pas la souplesse de ses concurrents au niveau international sans compter la rigidité du système bancaire et surtout les interférences politiques. Certes cela est propre à toute entreprise publique où comme en France les PDG des grandes compagnies publiques sont nommés par le président de la République en Conseil des ministres. Mais à la différence notable qu'il est lié à un contrat de performance avec l'Etat actionnaire alors que la loi sur l'autonomie des entreprises publiques de 1990 a eu peu d'application.
2.- Comment manager Soantrach dans un environnement concurrentiel ? La faiblesse de la performance économique tant globale que celle de Sonatrach ne saurait s'expliquer par la seule crise mondiale, les raisons essentielles étant le système bureaucratique sclérosant et le manque de visibilité dans la démarche de la politique économique à travers une instabilité juridique perpétuelle, la rente permettant une croissance du PIB, un taux de chômage en baisse et une stabilité sociale artificiels. Rendre plus efficiente Sonatrach suppose plusieurs actions stratégiques : la replacer dans le contexte international et national ; un système d'organisation au temps réel se fondant sur des réseaux et non plus sur l'actuelle organisation marquée essentiellement sur une vision hiérarchique, des centres de coûts transparents incluant la gestion du partenariat ; une gestion rationnelle des ressources humaines et élément essentiel du management stratégique impliquer les cadres et être à l'écoute du collectif des travailleurs par un dialogue constructif permanent. L'ensemble de ces actions renvoie en fait à l'instauration de l'Etat de droit et de l'urgence d'une gouvernance renouvelée. Sur le plan interne à Sonatrach, le nouveau management stratégique doit avant tout diagnostiquer l‘impact de l‘environnement national et international sur Sonatrach et l‘appréciation des domaines où l‘interface Sonatrach/ environnement peut être amélioré afin de rendre plus performant l‘entreprise et la hisser au niveau de la concurrence mondiale. La description des opérations devrait permettre d‘identifier les gisements de productivité et les niches de gains de coûts (comparaison avec des compagnies tests)- volume, rentabilité et analyser la stratégie des principales institutions similaires dans le monde sur les plans : technologie- standards et normes- sous-traitance et enfin le conventionnement et ce, afin de réduire les coûts et d‘avoir une stratégie agressive afin de prendre des parts marché tenant compte de la concurrence. Il s’agira d‘élaborer un modèle de simulation donnant plusieurs variantes en fonction des paramètres et variables –fonction de contraintes qu‘il s‘agira d‘éliminer pour éviter des effets pervers, gérer étant prévoir surtout pour cette entreprise stratégique pour le pays. La démarche devra être de type itérative. Elle consistera à itérer les séquences en plusieurs étapes : fixer les objectifs d‘amélioration des performances reliés à chaque fonction où à chaque système de gestion, selon une démarche descendante et en vérifier le réalisme ( ratios, contexte) ; -évaluer l‘ordre de grandeur des impacts attendus (gains, qualité, délais, coût...) selon une démarche ascendante ; évaluer les moyens et les délais nécessaires (ordre de grandeur) et enfin vérifier qu‘à chaque objectif fixé peuvent être associés des indicateurs de performance faciles à mettre en œuvre. Cette simulation permettra la mise en place de deux ou trois scénarios d‘amélioration des performances de Sonatrach tenant compte de l‘évolution erratique tant du cours du dollar, de l‘euro que du cours du pétrole et du gaz, permettant d‘ identifier chaque action, décrire le contenu, évaluer les moyens, les délais, les coûts associés à l‘action, vérifier le niveau de gain attendu éventuel, rédiger une fiche descriptive de chaque action accompagné d‘un tableau récapitulatif des moyens, coûts et gains attendus et enfin établir un tableau récapitulatif des indicateurs de performance à prévoir. Sonatrach, société par actions et propriété exclusive de l‘Etat devra faire face aux mutations quant à son nouveau rôle de société économique et commerciale créatrice de richesses et aux changements dans son mode de fonctionnement en vue d‘évoluer dans un environnement international de plus en plus concurrentiel. Comme démontré dans plusieurs de mes contributions nationales et internationales, Sonatrach s'assimile pour l'instant à toute l'économie algérienne exportant pour 98%y compris les dérivées inclus dans la rubrique hors hydrocarbures et important à plus de 70% des besoins des ménages et des entreprises publiques et privées dont le taux d’intégration ne dépasse pas 15%.
Le groupe au niveau intérieur est donc le véritable moteur de l'économie algérienne, un fournisseur essentiel de revenus d'exportations, de revenus fiscaux, d'emplois. La sécurité du pays étant posée, cela implique l'urgence de la volonté politique d'amorcer une production et exportation hors hydrocarbures loin de la logique rentière, supposant un réaménagement profond de la logique du pouvoir. Ainsi, l'Algérie pourrait faire face à une crise interne de financement dans les prochaines années, si le prix international se maintient à son niveau actuel ainsi que les actuelles prévisions d'exportation et de consommation intérieure. Aussi la question stratégique qui se pose est la suivante : avec l'hémorragie de ses cadres ayant acquis des dizaines d’années d’expérience, la Sonatrach a-t-elle les capacités de faire des découvertes intéressantes rentables financièrement, une prospection coûtant et lorsque la rentabilité n'étant pas assurée, ce sont des fonds perdus? Sonatrach a-t-elle les capacités d'investir seule sans un bon partenariat sans le partage des risques à l'aval sans être assurée de la commercialisation sachant que pour diminuer les coûts, il faut une grande capacité des installations et que le marché intérieur est limité? Quelle est la rentabilité financière des investissements de Sonatrach à l'étranger tant dans sa participation que dans des fonds d'investissement qu'elle aurait réalisé? Quelle est la rentabilité, Sonatrach s'étant fortement dispersé depuis 2000, devenant un Etat dans un Etat s'étant éloigné de ses métiers de base, faisant double emploi avec les départements ministériels, dans l'aviation, dans la construction et dans les unités de dessalement de l'eau de mer. Sonatrach doit revenir à ses métiers de base. Sur le plan des résultats financiers, faute d'une clarté dans la gouvernance de Sonatrach, on ne discerne pas nettement ce qui est imputable à une bonne gestion interne et ce qui est imputable aux aléas internationaux qui sont déterminants. Sur le plan opérationnel de Sonatrach, comme mis en relief précédemment, nous avons la division amont chargée de l'exploration, la division canalisation du transport, la division aval des unités de production et la division commercialisation comme son nom l'indique que tant de la commercialisation tant interne qu'extérieure. Sur le plan comptable, Sonatrach, bien qu'existe une direction d'audit au niveau de la direction générale, établit souvent un bilan consolidé où l'on ne cerne pas correctement les centres de coûts du fait de ce que les économistes appellent les comptes de transfert, pouvant voiler la mauvaise gestion d'une division. Par ailleurs, au niveau des unités de production, la comptabilité établit une valeur globale pour des ventes similaires de certains produits, résultante de la consolidation de produits exportés au prix international et de produits écoulés sur le marché interne à un prix largement plus bas. Aussi, faute de comptes physico-financiers à prix constants, les ratios de gestion sont d'une signification limitée pour apprécier la performance. Il en résulte l'urgence de mettre en place des comptabilités analytiques et de mieux adapter les structures organisationnelles à la mission et aux contraintes de Sonatrach, de définir la structure des responsabilités et de concevoir un système d'information efficace, fonctionnant sur le principe de réseaux. D’où l’importance pour plus de transparence de centres de coûts en temps réel et des nouvelles règles du droit des affaires (droit des sociétés).
L'objectif est l'évaluation objective du bilan des contrats toujours en termes de standards internationaux, du partenariat et l'impact de la généralisation des avis d'appel d'offres et des contrats gré à gré prévus par la loi, l'évaluation de la position financière de Sonatrach, ses perspectives et sa structure des coûts d'exploitation, tenant compte des comparaisons internationales. Cela passe nécessairement par la description des opérations suivantes : évaluation de la position financière, structure du bilan, charges (produits), de la reconstitution des centres de coûts pour l'exploitation, de l'évaluation des systèmes de gestion et de l'identification des centres de coût. La mise en place de ces instruments nécessaires dans toute entreprise d'envergure internationale devrait permettre une amélioration de la gestion des contrats et du développement du partenariat, des projections économiques et financières et enfin la simulation/modélisation, ces actions devant aider à la prise de décision en temps réel.
En résumé le pivot de la réussite du nouveau management tant du ministère de l'Energie que de Sonatrach repose avant tout sur la ressource humaine et son adaptation aux nouvelles mutations énergétiques mondiales. C'est que la croissance ou pas de l'économie mondiale joue comme un vecteur essentiel dans l'accroissement ou la diminution des recettes de Sonatrach, tenant compte des coûts, pouvant découvrir des milliers de gisements mais non rentables financièrement. Cela impliquera un changement notable du modèle de consommation énergétique reposant sur un MIX énergétique, qui se dessine entre 2015/2020.
Dr Abderrahmane Mebtoul, Professeur des Universités, Expert international et directeur d’Etudes Ministère Energie/Sonatrach 1974/2007
(1) Voir pour plus de détails "Pour un nouveau management stratégique de Sonatrach" – revue HEC Montréal Canada novembre 2010 (52 pages) et l’ouvrage collectif paru dans la revue internationale Stratégie "AGIR" n°50, sous la direction du général Eric de La Maisonneuve -chef d'état-major de l'armée de Terre française (1997-98), intitulé «La Méditerranée, enjeux et avenirs», septembre 2012 Paris France ( 250 pages) ont contribué -Claude Nigou-Jean Dufourcq-Didier Billion- Gérard-François Dumont- –dont la contribution d’Abderrahmane Mebtoul "Sonatrach face aux mutations énergétiques en Méditerranée et en Afrique".
Commentaires (2) | Réagir ?
merci
Les charognards qui s'agglutinent autour de la rente des hydrocarbures, ils vont s'acharner encore dans le dernier élan de ce quatriéme mandat sur les restes des reserves de change jusqu'à les réduire à 38 Milliards de Dollars en 2019 selon les déclarations de A. Sellal. Pourquoi l'échéance de 2019 ? Jusqu'à nous renvoyer à la débandade de A. Brahimi &Consorts sous le régne de Chadli, pour nous annoncer en 2019, toute honte bue, que les caisses de l'Etat sont vides. Non ! On ne voudrait pas retomber dans cette bérezina financiére et toutes ses conséquences catastrophiques. Ne touchez pas aux reserves de changes si c'est pour acheter la paix sociale et faire de la charité donnant-donnant pour rempiler aux élections. Dites-nous enfin ce que vous n'avez pas pu faire pour nous éviter cette situation avant de verser dans le catastrophisme à venir ? Pas ce que vous avez fait pour tricher et tromper ce peuple.