Une quinzaine de peines dans le procès de l'autoroute Est-Ouest
La justice a prononcé jeudi une quinzaine de peines de prison lors d'un retentissant procès pour corruption dans le cadre de la construction d'une autoroute, un des plus importants projets du chef de l'Etat Abdelaziz Bouteflika.
Seize personnes et sept sociétés étrangères étaient jugées depuis le 19 avril pour corruption, blanchiment d'argent et dilapidation de deniers publics lors de ce procès dans lequel des noms de ministres ont été évoqués comme bénéficiaires de pots de vin.
Les deux principaux accusés ont été condamnés à dix ans de prison ferme. Il s'agit du consultant en finances Chani Medjdoub, détenteur de la double nationalité algérienne et luxembourgeoise, et d'un ancien cadre du ministère des Travaux publics, Mohamed Khelladi.
Le tribunal a également prononcé une amende de 30 000 euros contre les deux hommes, derrière les barreaux depuis plusieurs années, et ordonné la saisie de tous leurs biens mobiliers et immobiliers. M. Medjdoub a été arrêté en septembre 2009 par les services secrets qu'il a accusés de l'avoir détenu au secret pendant trois semaines et de l'avoir torturé.
Les sept entreprises étrangères, en majorité européennes et asiatiques, ont écopé d'une amende de 50 000 euros chacune.
Un autre ancien cadre du ministère des Travaux publics et un homme d'affaires ont été condamnés à sept ans de prison ferme, tandis que trois ans de prison ont été prononcés contre deux accusés, dont un ancien colonel des services secrets, en poste au ministère de la Justice au moment des faits.
Chantier phare de la présidence Bouteflika, la construction de l'autoroute est-ouest avait été lancée en 2006, confiée aux entreprises Citic et Cojal, et devait durer quatre ans. À la base d'un budget de six milliards de dollars, elle a vu son coût grimper à 13 milliards, selon des estimations officielles, et à 17 milliards, selon d'autres sources.
"Scandale du siècle"
La presse évalue à 5 milliards de dollars le montant des pots-de-vin versés. Le «chantier du siècle» a ainsi été rebaptisé par la presse «scandale du siècle». La construction de cette autoroute de 1.200 km traversant le nord de l'Algérie est toujours inachevée.
Lors du procès, l'ancien ministre des Travaux publics, Amar Ghoul, aujourd'hui aux Transports, a été mis en cause par l'un des accusés selon lequel il aurait perçu un quart des sommes versées en pots de vin. Des accusations rejetées en bloc par M. Ghoul.
A été également cité comme bénéficiaire de pots de vin l'ancien ministre de la Justice et des Affaires étrangères Mohamed Bedjaoui.
Le tribunal criminel d'Alger a rendu son verdict alors que se tient à Blida le nouveau procès de l'ancien banquier Rafik Khalifa, dont le groupe éponyme s'est effondré en 2003, entraînant des pertes évaluées entre 1,5 et 5 milliards de dollars à l'État et aux épargnants.
Le même tribunal abritera le 6 juin un procès concernant le groupe pétrolier Sonatrach qui réalise un chiffre d'affaires annuel de 60 milliards de dollars. Le procès implique les compagnies italienne Saipem et allemande Funkwerk et l'ex-PDG de Sonatrach, Mohamed Meziane.
Un autre procès concernant Sonatrach est à l'instruction et implique l'ancien ministre de l'Énergie Chakib Khellil, un proche du président Bouteflika, désormais installé aux États-Unis, ainsi que son épouse et ses enfants. La justice italienne enquête aussi sur ce dossier où Saïpem est soupçonnée d'avoir versé des pots-de-vin pour obtenir des marchés en Algérie.
À ces procès s'ajoutent des accusations contre des membres du gouvernement formulées par les députés du Parti des Travailleurs (opposition de gauche). Leur porte-parole, Louiza Hanoune, a affirmé mercredi que «30% des ministres actuels sont liés aux affaires et suspects de conflits d'intérêts».
La corruption, favorisée par l'abondance des recettes pétrolières du pays, touche aussi les collectivités locales. Selon le quotidien El Khabar, un millier d'élus et un millier de fonctionnaires font actuellement l'objet de poursuites devant les tribunaux.
AFP
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Les donneurs d'ordre, les fondés de pouvoir, les responsables en haut lieu et les galonnés qui tirent les ficelles sont tranquillement mis à l'abri de l'intransigeance et de la rigueur de la Justice. Une justice arbitraire à deux poids deux mesure. Que représente alors la responsabilité d'un homme d'Etat dans ce pays? C'est quoi alors la responsbilité d'un responsable politique ? des responsables politiques mouillés jusqu'au cou des scandales de corruption et de malversations et qui sont maintenus au poste comme une insulte à la collectivité. Il y a quelque part un Ali BaBa qui les protège et leur assure la retraite.